Les collections d’entreprise s’unissent

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 30 juillet 2007 - 488 mots

La vie des collections d’entreprise n’a rien d’un long fleuve tranquille. Si leur avenir est souvent sujet aux fusions et acquisitions des sociétés, leur quotidien s’achoppe aussi à des problèmes juridiques ou logistiques. Pour les résoudre, plusieurs conservateurs de collections d’entreprises européennes et américaines viennent de se réunir dans l’International Association of Corporate Collections of Contemporary Art (IACCCA) dont la première assemblée se tiendra le 14 juin à la Foire de Bâle. Cette fédération est le fruit de tables rondes initiées en 2000 et 2002 sur Paris Photo, réactivées sur la foire DFOTO à Saint-Sébastien (Espagne) en 2005 et poursuivies en avril dernier au moment d’Art Brussels. À cette occasion, est née l’idée d’une association regroupant aussi bien des grosses collections comme celle de la Deutsche Bank, que de nouvelles comme celle du Banco Espirito Santo.
Le concept d’IACCCA emprunte beaucoup au modèle néerlandais. Quarante-cinq collections d’entreprises hollandaises se sont ainsi fédérées en 2005 dans la Vereniging Bedrijfscollecties Nederland (VBCN) pour soulever des questions comme le droit à l’image des artistes, aigu pour les reproductions d’œuvres dans des supports de communication. Autre question, celle de la vidéo. « Lorsqu’on acquiert une vidéo, achetons-nous le droit de diffusion auprès des employés de la société ? Comment pouvons-nous conserver la vidéo ? », s’interroge Alexander Strengers, conservateur de la collection de la Nederlandsche Bank. L’association hollandaise lancera un protocole en septembre pour clarifier les choses sur ce sujet.

Réfléchir à la société
L’idée qui sous-tend la VBCN et l’IACCCA est aussi de favoriser les échanges, comme celui pratiqué voilà deux ans entre les collections Lhoist et Neuflize OBC. « C’était très productif car les clients et les employés ont vu que d’autres entreprises ont aussi des collections, et du coup en mesurent l’aspect muséal », souligne Jacqueline d’Amécourt, conservatrice de la collection Lhoist.
Il est toutefois des questions que l’association peinera à résoudre, comme le devenir d’une collection, lié au bon vouloir du P-DG. Certaines se retrouvent à l’encan comme celle de Refco chez Christie’s. Pour éviter la revente de la collection de la filiale néerlandaise du British American Tobacco, les autres collections du cru réfléchissent ainsi à l’éventualité d’acquisitions partagées de cet ensemble ou à une issue dans un musée. Étrangement la question budgétaire n’a pas été évoquée dans les réunions préliminaires de l’IACCCA, alors que celle-ci est cruciale. Elle témoigne au fond de l’engagement d’une entreprise dans un champ qui n’est pas son cœur de métier. « Une collection n’aide pas à résoudre les problèmes d’une entreprise, mais permet de réfléchir de façon différente car les artistes posent des questions en avance de dix ans sur les autres, souligne Jacqueline d’Amécourt. Le rôle d’une entreprise n’est pas seulement de fournir du travail mais de réfléchir à la société qui nous entoure. » Voilà dix-huit ans, le président de Lhoist s’était contorsionné pour voir à l’endroit six arbres tête-bêche photographiés par Rodney Graham. Il a alors lancé à ses cadres : « j’aimerais que vous regardiez les problèmes de toutes les façons possibles ! »

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°260 du 25 mai 2007, avec le titre suivant : Les collections d’entreprise s’unissent

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