Les clubs de collectionneurs

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 14 septembre 2001 - 533 mots

Alors qu’à la fin des années 1980 de nombreux clubs d’investisseurs en art avaient émergé sous l’impulsion d’apprentis sorciers spéculateurs, les groupes de collectionneurs actifs à ce jour récusent toute velléité d’investissement.

Alors qu’à la fin des années 1980 de nombreux clubs d’investisseurs en art avaient émergé sous l’impulsion d’apprentis sorciers spéculateurs, les groupes de collectionneurs actifs à ce jour récusent toute velléité d’investissement. À la différence des clubs d’investisseurs, destinés à décrypter les mécanismes boursiers et dégager à terme des plus-values par la gestion d’un portefeuille de valeurs, les collectionneurs revendiquent une finalité non-lucrative. Jean de Kervasdouë souligne la vocation didactique des cénacles informels et confidentiels qu’il orchestre depuis vingt-cinq ans : “Il n’y a pas d’idée de spéculation. Les œuvres ne sont pas vendues au terme de l’association et la règle veut qu’elles ne le soient pas au cours des cinq années suivantes.” Le club qu’il dirige actuellement, “Honoré 91”, existe sous la forme juridique d’une association en indivision, renouvelable tous les quatre ans. Elle compte aujourd’hui 22 adhérents déboursant une cotisation trimestrielle de 4 000 francs. Le responsable des achats présente, chaque trimestre, les dernières acquisitions qui circulent alors entre les membres. “On ne critique pas le choix de l’acheteur. Notre objectif premier est d’aider les artistes vivants. Nous ne réalisons pas d’achats dépassant 35 000 francs”, explique Jean de Kervasdouë.

Dans une démarche similaire, “le club du 31 décembre 1990”, dissous en 1999, s’est constitué pour sa part à partir de dix couples d’amis. “Les trois quarts des membres n’avaient aucune relation avec le monde artistique. Je m’étais imposé comme mission de leur faire découvrir l’art contemporain par des visites d’ateliers d’artistes, des expositions, des dîners avec des critiques, des conservateurs...  Les statuts du club étaient assez simples. On ne pouvait acheter que des artistes vivants avec une préférence pour les jeunes. C’était un club très stalinien. J’étais le seul à décider. Lorsqu’on faisait nos dîners trimestriels, je présentais les achats sans jamais parler d’argent parce qu’on ne jouait pas en Bourse. On ne sait pas ce qui en restera. Personne ne connaît le montant des acquisitions sauf au moment de la dissolution. Au terme des dix ans nous avions 70 pièces que nous nous sommes répartis”, explique le grand ordonnateur qui a récidivé cette année avec un nouveau club baptisé “La Peau des Fesses”, clin d’œil à “La Peau de l’Ours” constitué en 1914.

Cette nouvelle assemblée comprend 11 membres, parmi lesquels quelques célébrités cathodiques ainsi qu’un finaliste de l’équipe de France de football. La volonté de ce club est d’alterner les achats d’artistes émergents et de plasticiens confirmés par le biais d’une cotisation mensuelle de 2 000 francs. La palette des artistes sélectionnés (Claude Viallat, Tom Wesselmann, Bertrand Lavier, Jean-Pierre Raynaud...) laisse toutefois perplexe au regard de la modestie des sommes engagées. S’il est vrai que les artistes français sont moins onéreux que leurs homologues anglo-saxons, on a peine à croire que le budget annuel de 264 000 francs puisse couvrir ces achats. “Lorsque j’achète directement aux artistes, je ne négocie pas car l’objectif est de les aider. Par contre, avec les galeries, je retrouve mon rôle d’homme d’affaires”, explique laconique le maître d’œuvre de ce club.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°132 du 14 septembre 2001, avec le titre suivant : Les clubs de collectionneurs

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