Vide-greniers

Les brocantes vont être plus strictement encadrées

Le Journal des Arts

Le 7 octobre 2005 - 735 mots

Le législateur veut lutter contre la concurrence jugée déloyale des particuliers vis-à-vis des professionnels du marché de l’art.

 PARIS - Chaque année se dérouleraient en France, selon les estimations, 50 000 vide-greniers réunissant un million d’exposants, pour moitié des particuliers. Ces manifestations constituent un fait de société ; nouvelle forme de loisirs, elles représentent aussi un moyen d’animation pour les communes, notamment en milieu rural, et une source de financement pour nombre d’associations. Mais une bonne partie des exposants particuliers exercent en réalité une activité commerciale générant une concurrence déloyale à l’égard des professionnels du marché de l’art. Aussi le législateur vient-il d’adopter une disposition complétant l’article L. 310-2 du code de commerce relatif aux ventes au déballage, qui encadre strictement la participation des particuliers à de tels événements. Cette disposition est issue d’un amendement à la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, déposé par le député Jean Lemière, à qui le ministre chargé du commerce et de l’artisanat a confié une mission sur la réglementation du « paracommercialisme ».
Aux termes de cette clause, les particuliers sont soumis à trois restrictions, portant sur la nature des biens vendus, la fréquence et la localisation des manifestations auxquelles ils participent. Tout d’abord, les biens vendus doivent être exclusivement des objets personnels et usagés. Ensuite, les particuliers ne peuvent s’inscrire à plus de deux brocantes par an. Enfin, ils doivent avoir leur domicile ou leur résidence secondaire dans la commune, l’intercommunalité ou l’arrondissement départemental, ou, pour les villes de Lyon, Marseille et Paris, dans l’arrondissement municipal où se tient la manifestation.
La première limitation est traditionnelle et ne prête pas à débat. La seconde paraît, dans son principe, en voie d’acceptation par les milieux associatifs. En revanche, la restriction géographique est contestée car, selon Paul Mumbach, président de la Fédération française de bénévolat associatif (FFBA), « dans les petits villages, les autochtones représentent à peine 10 % des exposants ».
Par le passé, des arrêtés préfectoraux ont été publiés aux fins de limiter la présence des particuliers aux seules personnes domiciliées dans la commune ou dans une commune proche. Mais ces arrêtés ont été abrogés à la demande du ministère de l’Intérieur, pour se conformer à un avis rendu par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand. En effet, le juge a considéré qu’il s’agissait d’un cas de rupture d’égalité des citoyens devant la loi, la différence de traitement entre les habitants de la commune ou des communes avoisinantes et ceux des autres communes n’étant pas fondée sur une réelle différence de situation.
On ne peut donc pas écarter l’éventualité de recours pour excès de pouvoir à l’encontre du décret que l’administration prépare en vue d’appliquer la loi.
Rappelons que les pouvoirs publics disposent de bien d’autres moyens de lutte contre la concurrence déloyale des particuliers, notamment depuis la loi du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat.
Ainsi, toute vente au déballage doit être autorisée par le maire ou le préfet. La demande comporte les renseignements suivants : identité sociale de l’organisateur, dates de la manifestation, localisation et surface affectée à l’opération, nature des marchandises vendues. La chambre de commerce et d’industrie et la chambre des métiers sont informées de l’opération projetée et peuvent faire connaître leurs observations dans un délai de quinze jours. L’organisateur tient un registre journalier mentionnant les nom, prénom, qualité et domicile de chaque exposant, et décrivant sa pièce d’identité. Ce registre doit être coté et paraphé par le commissaire de police ou, à défaut, par le maire de la commune du lieu de la manifestation. Il est tenu à la disposition des services de police et de gendarmerie, des services fiscaux, des douanes et des services de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes pendant toute la durée de la manifestation. À l’issue de celle-ci, le registre est déposé à la préfecture ou à la sous-préfecture.
Il est vrai que, comme le regrette le député Lemière, « l’exploitation de ces registres par les différents services de contrôle est malaisée et insuffisante en l’absence de gestion centralisée ».
On peut néanmoins s’inquiéter des effets pervers d’une mesure qui renforce les contraintes exercées sur le domaine public : les « faux particuliers » ne s’orienteront-ils pas vers les sites d’annonces et de courtage en ligne sur lesquels le contrôle du commerce des biens culturels est déficient ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°222 du 7 octobre 2005, avec le titre suivant : Les brocantes vont être plus strictement encadrées

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