Les adieux d’Anthony d’Offay

Le marchand londonien cesse son activité à soixante-deux ans

Le Journal des Arts

Le 12 octobre 2001 - 642 mots

Éminent marchand d’art contemporain britannique, Anthony d’Offay a pris subitement la décision de mettre fin à ses activités. Celui-ci préfère désormais se retirer « alors que la galerie est à son apogée ». Onze de « ses » artistes étaient invités à la dernière Biennale de Venise.

LONDRES (de notre correspondante) - La récente nouvelle du retrait d’Anthony d’Offay de la scène artistique a suscité la plus grande surprise dans le monde du marché de l’art. La galerie, prospère, avait reçu plus de 50 000 visiteurs pour son exposition “Bill Viola” ; onze de ses artistes ont été invités à la dernière Biennale de Venise et la colonne monumentale en résine de Rachel Whiteread brille de tous ses feux à Trafalgar Square. Cette année a été marquée par l’arrivée notable des directeurs Mark Francis et Graham Southern, et de l’artiste Michael Craig-Martin. En outre, la galerie projetait de déménager en 2002 dans de nouveaux locaux situés à Haunch of Venison Yard. “Ce fut une vraie surprise. Nous avions des artistes prêts à exposer et les affaires tournaient normalement”, a déclaré un cadre supérieur de D’Offay. Les directeurs et le personnel ont été prévenus le 4 septembre, le jour même de la parution d’un communiqué de presse dans lequel Anthony d’Offay s’expliquait. “J’aurai soixante-deux ans en janvier et je ne rajeunis pas. Ce n’est jamais le bon moment d’annoncer son départ à la retraite, mais je préfère me retirer alors que la galerie est à son apogée et je pense que c’est le cas actuellement. Je suis en excellente santé et continuerai à m’investir dans le monde de l’art puisque je me propose d’offrir aux artistes un service de soutien.” Tandis que la galerie de Dering Street fermera à Noël, Anthony d’Offay prend les dispositions nécessaires concernant son écurie d’artistes (qui réunit les grands noms des cinquante dernières années) “afin que leurs intérêts soient pris en charge dans un futur proche”. “C’est une décision individuelle et interne, qui n’a été influencée par aucun élément extérieur, a déclaré un proche. Il a décidé de partir tant qu’il était leader dans son domaine. Il a eu beaucoup de travail ; il est très fatigué et psychologiquement incapable de déléguer.” Les hypothèses, selon lesquelles des problèmes d’organisation liés à l’installation de la galerie dans le nouveau bâtiment de Haunch of Venison Yard auraient précipité la fermeture de la galerie, ont été fermement démenties par le camp d’Offay. “Nous avions rejeté dès le début de l’année le projet proposé par Norman Foster pour le nouveau bâtiment, et discutions activement avec de nouveaux architectes pour qu’ils terminent le bâtiment de Haunch of Venison Yard dans les plus brefs délais et sans trop de complications.”

L’ouverture à Londres d’une succursale de la galerie new-yorkaise Gagosian ne représentait aucunement un danger pour d’Offay. “Si un artiste décide de traiter avec Gagosian, c’est qu’il veut une exposition à New York, et non pas dans une galerie londonienne. Bon nombre d’entre eux ont fait ce choix, depuis Martin Maloney jusqu’à Howard Hodgkin. Anthony a le plus grand respect pour Larry [Gagosian] et voit en lui un concurrent sérieux, mais il n’a jamais considéré qu’il représentait une menace.” Même si la décision d’Anthony d’Offay a semé la stupeur, tous s’accordent à penser qu’elle a été mûrement réfléchie. La vente de sa maison new-yorkaise conçue par Philip Johnson au cours de l’année dernière et le choix de ne pas organiser d’expositions d’automne en 2001 semblaient être les éléments avant-coureurs de la décision d’Anthony d’Offay. Si la formule “un service de soutien pour les artistes” reste énigmatique, il est fort probable qu’il n’opèrera pas en solo. En effet, lors de la Biennale de Venise et à l’occasion de certaines expositions récentes présentées à la galerie – “Francesco Vezzoli” et “Chris Cunningham” par exemple –, il était souvent accompagné de la jeune Italienne Chiara Bersi Serlini.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°134 du 12 octobre 2001, avec le titre suivant : Les adieux d’Anthony d’Offay

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