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Lectures de croisière

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 27 avril 2011 - 688 mots

Organisé du 29 avril au 1er mai, le Salon international du livre ancien, de l’estampe et du dessin se stabilise.

PARIS - Après avoir vu son calendrier bouger selon le bon vouloir du Grand Palais, le Salon international du livre ancien, de l’estampe et du dessin a finalement trouvé sa vitesse de croisière et accru sa visibilité. « Le salon de Paris est pour moi le Maastricht du livre, c’est la plus belle foire dans cette discipline en terme de présentation », résume le libraire parisien Laurent Coulet. La bibliophilie reste toutefois une passion confidentielle et pour la rendre plus médiatique, les organisateurs ont choisi, cette année, le thème « Politiquement correct ? ». Les libraires parisiens Anne Lamort et Élie Szapiro ont orchestré sept vitrines en empruntant à leurs confrères quelques ouvrages autour de cette question, notamment une affiche de maison close de la fin du XIXe siècle… La librairie des Neuf Muses (Paris) joue aussi le jeu en présentant notamment un manuscrit de Crébillon, auteur libertin mais aussi censeur, ou encore un exemplaire non caviardé de La Liberté ou l’amour de Desnos avec un envoi à Man Ray précisant que le livre ne porte pas sa ceinture de chasteté…

Tous les exposants ne se plient pourtant pas à la consigne. Laurent Coulet présentera ainsi un rouleau imprimé de 1520, généalogie de François Ier qui rêvait alors de se faire élire empereur du Saint Empire romain germanique. Surtout, l’événement est véritablement syndical, montrant à la fois les grandes locomotives de la profession comme les Parisiens Jean-Claude Vrain ou Thomas Scheler, mais aussi des petits wagons sympathiques. « Nos clients, même les plus grands, aiment ce mélange, ils aiment les livres précieux et en contrepoint ceux de documentation », indique Alain Nicolas, président du Syndicat national de la librairie ancienne et moderne. Celui-ci admet toutefois que, comme dans tous les domaines, les exemplaires modestes entre 200 et 1 000 euros traînent la patte. Évolution du goût oblige, les livres de documentation sont remisés au profit des grands illustrés modernes ou des livres d’heures. 

Militantisme
Dominée par les piliers parisiens comme Terrades ou Prouté, la section « estampe » voit revenir la galerie Maeght (Paris). L’adjonction du dessin, l’an dernier, a donné de l’oxygène à ce secteur, sans toutefois en gauchir l’identité. Parmi les nouveaux venus, on remarque les Parisiens Thessa Herold et Thierry Mercier, ce dernier présentant un ensemble d’encre d’André Girard et un pastel de Jacques-Émile Blanche. Patrick Lancz (Bruxelles) fait aussi son entrée avec un Portrait d’homme par Khnopff et un ensemble du petit maître belge Albert Delstanche.

Malgré les avancées du salon, le travail de prêche n’est pas encore terminé. « L’estampe est une spécialité très compliquée à défendre, très méconnue du grand public qui confond unique et original, regrette Mireille Romand, présidente de la Chambre syndicale de l’estampe, du dessin et du tableau. Ce n’est pas un sous-produit artistique, mais un exercice précieux, difficile. Or, ce qui est paradoxal, c’est que la France, qui a été à l’origine de nombreuses inventions de l’estampe, la soutienne si peu au XXIe siècle. » Le militantisme s’impose même du côté des livres. Ainsi, dans la revue Esprit à paraître en mai, le libraire parisien Michel Bouvier déclare-t-il : « Il faut rappeler que le marché du livre ancien pèse peu, notamment en comparaison avec le marché des tableaux. Pourtant, le patrimoine porté par ce marché-là vaut largement celui du patrimoine pictural. Globalement, c’est un petit marché, qui a du mal à se faire entendre des pouvoirs publics, comme les bibliothécaires d’ailleurs. L’achat des manuscrits de Casanova s’est fait récemment grâce au mécénat d’une grande entreprise publique, mais est resté très discret. » 

LIVRE ANCIEN, ESTAMPE ET DESSIN

Organisateurs : Syndicat national de la librairie ancienne et moderne ; Chambre syndicale de l’estampe, du dessin et du tableau

Nombre d’exposants : 137 (livres) et 50 (estampes)

Tarif des stands : 2 600 euros par libraire (stand de 9 m2 partagé à deux) ; 28 000 euros (stand de prestige de 36 m2) ; 350 euros le mètre carré pour l’estampe

Nombre de visiteurs en 2010 : 20 000

SALON INTERNATIONAL DU LIVRE ANCIEN, DE L’ESTAMPE ET DU DESSIN

Du 29 avril au 1er mai, Grand Palais, 75008 Paris, www.salondulivreancienparis.fr et www.salondelestampe paris.fr, tlj 11h-20h

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°346 du 29 avril 2011, avec le titre suivant : Lectures de croisière

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