Dissidence

« Le Rendez-vous », première !

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 30 août 2016 - 701 mots

Mécontents des nouvelles options prises par la Biennale, dix galeristes de Saint-Germain-des-Prés organisent des expositions d’exception, destinées à une clientèle haut de gamme.

Dix antiquaires parisiens dont deux accueillant des marchands étrangers et un joaillier ont créé « Le Rendez-vous », une micro-foire dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, essentiellement concentrée rue de Seine et dans les rues adjacentes, à Paris. Chaque exposant a, pour l’occasion, préparé une exposition d’envergure. Parmi les instigateurs du projet, Robert Vallois (galerie Vallois), ainsi que Christian Deydier, marchand en art d’Asie et ex-président du SNA congédié en juillet 2014, qui montre pour l’occasion de précieuses soieries réalisées aux VIIe et VIIIe siècles par les Sogdiens, un peuple nomade d’Asie centrale. « La Biennale des antiquaires ne nous convient pas, donc il fallait faire quelque chose. Nous avons alors réuni dix grands marchands et créé “le Rendez-vous”, explique Robert Vallois. Nous faisons un événement luxueux, très élitiste et réservé à la “crème de la crème”. On vise le haut de gamme, comme nous l’avons toujours fait. Notre option est l’inverse de la Biennale d’aujourd’hui. »

Parmi les participants, on retrouve les dissidents de la première heure face à la nouvelle formule de la Biennale, ceux qui ont toujours été contre son annualisation, à l’instar de Robert Vallois et Christian Deydier ; mais aussi ceux qui n’apprécient pas sa gestion, lui reprochant ses cafouillages ; ou encore des candidats malchanceux tels Phoenix Ancient Art (Genève) : « Nous avons fait la Biennale depuis 2006 en dépensant à chaque fois des sommes colossales, proches du million d’euros. Or, en décembre [2015], les organisateurs nous ont adressé une lettre pour nous dire que nous étions sur liste d’attente. Finalement, fin janvier, toujours sans nouvelles, nous avons envoyé un courrier signifiant que nous ne participerions pas », explique Michael Hedqvist, le directeur de la galerie. Pour Le Rendez-vous, ce dernier confronte les toiles néoclassiques de De Chirico des années  1920 (prêtées par la galerie Helly Nahmad, New York) avec statues, mosaïques et vases grecs et romains. D’autres raisons sont invoquées : « La Biennale est extrêmement coûteuse. Le Rendez-vous me coûte dix fois moins et puis, si j’avais fait la Biennale, je me serais retrouvé tout seul dans ma discipline. Personne ne serait venu me voir alors même que le Parcours des mondes se déroule en même temps », observe le marchand bruxellois Didier Claes, qui organise pour l’occasion une exposition consacrée à l’art Songye, avec une vingtaine de pièces allant de 20 000 euros à plusieurs centaines de milliers d’euros. Son confrère parisien Bernard Dulon, qui a lui aussi déserté l’événement du Grand Palais (il était présent en 2014), présente une importante exposition, composée de 25 chefs-d’œuvre de la statuaire Tsogho du Gabon. La plupart des pièces n’ont jamais été vues et leur rassemblement a nécessité plusieurs années de travail.

Paul Iribe chez Vallois
Autre exposition d’envergure, celle de Paul Iribe (1883-1935), présentée à la galerie Vallois, spécialisée dans l’Art déco. « Cela faisait vingt ans que je voulais l’exposer. C’est un créateur qui répond à mes goûts. Il est très sophistiqué, précieux, et ses créations sont extrêmement personnelles », explique Cheska Vallois. La galerie montre une douzaine de meubles (dont cinq seulement sont à vendre), ce qui est un exploit quand on sait qu’Iribe s’est consacré durant seulement une dizaine d’années à la création de meubles, avant de se tourner vers l’illustration. « Mon exposition ne montre que des meubles conçus entre 1911 et 1915 », souligne la galeriste. Parmi les pièces les plus remarquables, une commode en acajou et ébène sculptée, recouverte de galuchat rose, vers 1914, ou encore un fauteuil Nautile sur pieds hauts, en hêtre sculpté, vers 1913 (ancienne collection Jacques Doucet). Les autres participants proposent, à la galerie Le Minotaure, un ensemble d’œuvres de Serge Férat, de Léopold Survage et de François Angiboult, à partir de 1910, soit en pleine éclosion du cubisme ; des sculptures de Jean Tinguely des années 1960 à l’occasion des 25 ans de sa disparition (galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois) ; un focus sur le designer Roger Tallon (Jousse Entreprise) ou encore la découverte de pièces archéologiques, petites mais « d’une importance majeure », chez David Ghezelbash.

« Le Rendez-vous a vocation à se tenir tous les deux ans, je pense. Il y a dix exposants cette année, nous pourrons en accueillir jusqu’à quinze, grand maximum », conclut Robert Vallois.

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<b>Le Rendez-vous</b><br/>
du 9 au 24 septembre, quartier Saint-Germain-des-Prés (rue de Seine, des Beaux-Arts, Jacques-Callot, Jacob), 75006 Paris, <a href=www.lerendezvous.paris, horaires habituels des galeries. Participants : galeries Didier Claes (accueillie par Vallois), Christian Deydier, Bernard Dulon, David Ghezelbash, Le Minotaure, Montbrison, Joussse Entreprise, Phoenix Ancien Art (galerie Rauchfeld), Vallois, Georges-Philippe & Nathalie Vallois.

    Légende Photo :
    Paul Iribe, Commode, vers 1914, acajou et ébène, galuchat rose, dessus en marbre noir. © Galerie Vallois, Paris. Photo : Arnaud Carpentier

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°462 du 2 septembre 2016, avec le titre suivant : « Le Rendez-vous », première !

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