Le grand revival des seventies

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 24 juillet 2007 - 734 mots

Le design des années 1970 connaît un boom sur le marché grâce à l’engouement des collectionneurs américains. Toutefois, la revalorisation des seventies n’en est qu’à ses débuts…

De plus en plus d’amateurs et de marchands, découragés par les prix prohibitifs du mobilier des années 1950, guignent les seventies. La redécouverte de cette décennie a d’abord touché les créations en plastique coloré dans un esprit pop, et depuis peu les déclinaisons plus racées en verre et métal. Sous l’impulsion de l’antiquaire Yves Gastou, le revival des années 1970 s’était même frayé un chemin à la Biennale des antiquaires en 2004.

Le match Italie-France
Les seventies confirment surtout la suprématie italienne. Le design transalpin se démarque par son aspect prospectif et expérimental. Après Archizoom et Superstudio, collectifs créés en 1966, le groupe Alchimia formé en 1969 s’impose en laboratoire pour un design radical. En 2004, la galerie Mouvements Modernes, l’une des plus pointues dans ce domaine, présentait à la Fiac un bar d’Andrea Branzi pour Alchimia (1979) pour 12 000 euros. La même année, une lampe Moloch (1970) de Gaetano Pesce décrochait le prix record de 145 561 euros chez Artcurial. Mais la fragilité de certaines pièces suscite des réticences. Car les années 1970 ont aussi été pour une bonne part l’ère du gonflable et de l’éphémère. L’humeur était davantage aux projets globaux d’habitat qu’au mobilier meublant (Lire notre article sur Joe Colombo, p. 52).
La France reste, quant à elle, dans le registre du sur mesure. C’est sur ce mobilier haute couture que jouait le Français Michel Boyer, en créant aussi bien pour les Rothschild que pour les ambassades à l’étranger. Son travail a longtemps été présenté sous l’étiquette « anonyme » en vente publique. Mais depuis l’exposition que lui a consacrée la galerie Jousse Entreprise en 2003, ses prix ont sensiblement progressé. Un tabouret de forme X qu’on trouvait pour 1 000 euros voilà quatre ans, vaut aujourd’hui le triple.
Mais c’est la Française Maria Pergay qui a depuis quelque temps le vent en poupe. Ses prix ont explosé depuis trois ans, grâce à l’intérêt que lui portent de puissants marchands comme le New-Yorkais DeLorenzo. En septembre 2005, une table de salle à manger des années 1970 s’est envolée pour 126 000 dollars chez Wright à Chicago. En mars dernier, au Pavillon des antiquaires, la galerie Jousse Entreprise proposait une paire de fauteuils de Maria Pergay venant de l’appartement de l’acteur François Périer pour 70 000 euros. Voilà encore cinq ans, cette paire n’aurait guère excédé les 20 000 euros. « Il y a sept ans, une banquette plate de Maria Pergay se vendait difficilement à 4 000 euros. Depuis trois ans, les pièces prennent tous les ans 10 000 euros de plus », observe le galeriste Matthias Jousse. De son côté, la galerie Jeanniard-Rivière proposait au Pavillon des antiquaires une table basse de 1968 pour 35 000 euros et une armoire de 1977 pour 90 000 euros.

Un marché encore récent
Les seventies trouvent leur pleine expression dans le luminaire. En France, la cote de Yonel Lebovici a grimpé de manière vertigineuse, inflation entretenue par l’ouverture en 2003 d’un musée dans le XVe arrondissement. Des modèles qui valaient 5 000 euros voilà six ans frisent aujourd’hui les 20 000 euros. Lors de la vente Bruno Mouron chez Artcurial en 2003, un lampadaire Épingle à nourrice est ainsi parti pour 31 286 euros.
Hormis le boom observé autour de Maria Pergay, l’engouement n’a encore rien d’outrancier. « C’est un marché récent. Il n’est pas évident de trouver des pièces car les gens continuent de vivre avec. Soit ceux qui en ont ne savent pas qui sont les créateurs, soit ils n’ont pas forcément envie de s’en séparer », remarque le galeriste Florent Jeanniard. Ce qui n’empêche pas les marchands d’avancer des prix costauds pour des créateurs encore inconnus. Jousse Entreprise proposait ainsi une table basse de Benoît Melk, collaborateur notamment de Maria Pergay, pour 10 000 euros. Un prix encore prématuré dans un marché toujours en construction.

Repères

Maria Pergay (née en 1930). Adepte de l’acier inoxydable, Maria Pergay crée au milieu des années 1960 un mobilier tout en ondulation. Grâce au mécénat de Pierre Cardin, elle exportera ses créations aussi bien aux États-Unis qu’au Moyen-Orient. Roger Tallon (né en 1929). Connu pour avoir dessiné le TGV, ce designer français a aussi conçu des sièges et tabourets M 400 composés d’un piétement en fonte d’aluminium et recouverts de mousse alvéolée noire. Michel Boyer (né en 1935). Utilisant l’acier, le lamifié ou la fibre de verre, ce créateur a séduit aussi bien les Rothschild que L’Oréal avec ses créations sobres et sans tapage.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°592 du 1 juin 2007, avec le titre suivant : Le grand revival des seventies

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