Evénement

Le Carré Rive Gauche en vitesse de croisière

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 12 mai 2006 - 663 mots

Du 18 au 21 mai, le Carré Rive Gauche vogue dans des eaux sereines. Il s’appuie notamment sur une clientèle de collectionneurs passionnés.

 PARIS - Depuis l’an dernier, un vent de sagesse plane sur le Carré Rive Gauche. Foin des récriminations et rideaux de fer rageusement baissés lors du vernissage ! Le bureau dirigé par le marchand Didier Cramoisan a su pacifier les troupes. Après des révolutions salutaires mais abruptes, les antiquaires du quadrilatère aspiraient à un retour aux bonnes vieilles habitudes, notamment au thème de l’« Objet extraordinaire ». Une rhétorique pourtant éculée, car les fameux objets extraordinaires jouent souvent à l’Arlésienne. Qu’importe, les marchands optent, une fois n’est pas coutume, pour un discours pugnace. « On a repris du poil de la bête depuis mars avec notamment des clients russes sérieux. On sent un frémissement », assure Nicole de Pazzis-Chevalier. Celle-ci prévoit notamment une tapisserie flamande sur le thème de « Diane et Actéon », dont l’achat a été patiemment négocié sur plusieurs mois. « Les marchands du quartier se battent pour leurs spécialités, dans une période difficile à l’achat comme à la vente, renchérit le marchand Guirec Armengaud. Aujourd’hui, il est plus facile de vendre des œuvres en dessous de 9 000 euros ou au-dessus de 40 000 euros. Dans la gamme intermédiaire, c’est difficile, car la clientèle intéressée a été matraquée fiscalement. » Installé depuis août 2005 rue du Bac, le spécialiste des objets italiens Paolo Spadafora observe pour sa part que « le Carré a vécu des moments plus excitants, mais les clients passionnés y restent attachés ». Des clients que le Carré cherche à fidéliser depuis l’an dernier avec une nocturne hivernale, prévue le 6 décembre.
Sans être toujours renversantes, les nombreuses expositions initiées cette année témoignent du volontarisme des antiquaires. Au détour des fantaisies en ferronnerie de l’Allemand Goberg chez Jacques Lafon ou du réalisme poétique du peintre iranien Houshang Pezeshknia chez Joëlle Mortier-Valat, les visiteurs pourront s’attarder sur les meubles des années 1950 de Louis Sognot chez Arcanes. Dans ces créations joyeuses, présentées entre 5 000 et 30 000 euros, l’ébéniste marie le classicisme du macassar à des matériaux moins nobles comme le Formica rouge.

Lunettes esquimaudes
Habituée à des accrochages très soyeux, Myrna Myers ne faillit pas à sa réputation avec une douzaine de costumes japonais de l’époque Edo, nantis de motifs empruntés aussi bien à la mythologie qu’à la botanique. La trentaine de masques présentée par Jean-Claude Guérin et Marc Withofs promet de constituer un des points forts du parcours. Des lunettes esquimaudes au masque de samouraï en forme de bec d’oiseau, de la protection faciale pour les tankistes de la guerre de 14-18 aux crânes en bois ou en ivoire, l’exposition couvre des périodes, des aires géographiques et des symboliques variées. Antoine Laurentin a en revanche préféré ouvrir l’exposition d’André Devambez le 8 juin, plutôt que se caler sur le calendrier du Carré. « Je pense avoir plus de visibilité  que noyé dans la manifestation, observe-t-il. Techniquement, je n’avais pas non plus la possibilité de  faire autrement. » Il n’en prévoit pas moins quelques mignardises, comme un papier peint de Maurice Denis ou une tête de Foujita.
Les amateurs d’objets singuliers peuvent enfin s’en donner à cœur joie avec les pots à artifices datés de 1733 (20 000 euros) chez Véronique Girard ou un berceau vénitien (15 000 euros) chez Spadafora. Honneur encore au XVIIIe chez Denis Dervieux, lequel affiche pour 11 000 euros un baromètre en bois sculpté et doré, dont le corps principal présente des volutes de branchage. Le Faubourg Saint-Honoré garde l’apanage des grands meubles, mais les objets de charme ou insolites restent l’attrait du Carré. L’événement gagnerait d’ailleurs à troquer le vocable « extraordinaire » pour celui de « curiosité ».

CARRE RIVE GAUCHE, « OBJETS EXTRAORDINAIRES, LE PRINTEMPS DES DÉCOUVERTES »

18-21 mai, quai Voltaire, rues des Saints-Pères, de l’Université, du Bac, de Beaune, de Verneuil, Allent, www.carre rivegauche.com, les 18, 19 et 20 mai 11h-22h, le 21 11h-18h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°237 du 12 mai 2006, avec le titre suivant : Le Carré Rive Gauche en vitesse de croisière

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