Le blanc et le noir

Vallotton graveur à la galerie Dina Vierny

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 16 janvier 1998 - 504 mots

Pour son cinquantenaire, et parallèlement à l’exposition des « Nus de Félix Vallotton » au Musée Maillol, la galerie Dina Vierny présente une quarantaine de bois gravés de l’artiste. Ces œuvres, pour la plupart des années 1890 – tirages originaux ou posthumes réalisés par la famille de Vallotton – proviennent de collections privées européennes et sont proposées entre 10 000 et 150 000 francs.

PARIS - “L’accrochage est serré, mais correspond à l’espace de la galerie”, explique Olivier Lorquin. Car, au 36 rue Jacob, il n’est pas question de toucher aux lieux : les œuvres se plient à leur configuration. Depuis son ouverture, le 20 janvier 1947, la galerie n’a subi aucune modification. “Elle est restée dans son jus”, souligne fièrement son responsable, heureux de pouvoir évoluer dans un cadre entièrement décoré par Auguste Perret, que “Matisse avait présenté à Dina”. Ancrée dans sa tradition de défense “d’une certaine idée de l’art, qui prône plus la mise en avant d’un regard qu’une démarche commerciale”, la galerie est particulièrement à l’aise pour présenter un artiste réputé inclassable, à la fois anarchiste et bourgeois, qui a porté sur son époque un œil vigoureusement critique.

On connaît la part prise par Vallotton dans la renaissance de la gravure sur bois au tournant du siècle. Cette exposition est l’occasion de retrouver toute l’étendue de ses dons, son habileté à jouer des blancs et des noirs, son talent de spectateur – ou de voyeur – pour donner, avec une extrême économie de moyens, une image lucide, acerbe, toujours prodigieusement vivante, de l’actualité et des mœurs de son temps.

L’accrochage a le mérite de réunir aussi bien des œuvres auxquelles leurs qualités décoratives, chères aux Nabis, valent la faveur du public d’aujourd’hui que d’autres qui privilégient l’esprit documentaire et la critique sociale. Dans la première catégorie, les deux œuvres maîtresses que sont Le Bain – beau tirage posthume à 140 000 francs – et La Paresse, voisinent avec les deux séries des Instruments de musique (tirages posthumes sur Japon à 35 000 francs) et des acides Intimités : La santé de l’autre, et sa jumelle Cinq heures, Le triomphe, chacune  dans son premier état à 100 000 francs. Puis les “classiques” des mœurs du temps, tels que Le Bon Marché, Le joyeux Quartier Latin, La foule à Paris, Le coup de vent, Le couplet patriotique – entre 25 et 45 000 francs. À noter aussi deux séries plus rarement vues : L’Exposition universelle, de 1901, images d’un Paris bon enfant avec un admirable feu d’artifice (signée, 120 000 francs) et C’est la guerre, de 1916, dont le style dépouillé traduit efficacement les horreurs du conflit. Une vingtaine de dessins de nus – de 20 à 50 000 francs – complètent cette exposition ramassée mais homogène, qui mérite qu’on traverse le boulevard Saint-Germain au sortir du Musée Maillol.

LES BOIS GRAVÉS DE FÉLIX VALLOTTON, exposition-vente jusqu’au 10 mars, galerie Dina Vierny, 36 rue Jacob, 75006 Paris, tél. 01 42 60 23 18, du mardi au samedi de 10h-12h30 et de 14h30-19h30.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°52 du 16 janvier 1998, avec le titre suivant : Le blanc et le noir

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