Ventes aux enchères

La peinture impressionniste, des cotes élevées

Par Marie Potard · L'ŒIL

Le 26 février 2024 - 841 mots

Malgré la légende, les toiles de Monet, Pissarro ou encore Caillebotte ont vite trouvé des acheteurs, publics ou privés. Et c'est après la Seconde Guerre mondiale que les prix commencent à s'envoler.

Le 15 avril 1874 ouvrait à Paris, dans les anciens ateliers du photographe Nadar, boulevard des Capucines, la première exposition impressionniste, aujourd’hui devenue mythique. Regroupés sous le nom de Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs, 31 artistes – parmi lesquels sept seulement sont aujourd’hui internationalement connus –décident de s’affranchir des règles académiques en organisant leur propre exposition, en marge du Salon officiel. Le noyau dur du groupe se compose alors de Monet, Renoir , Degas, Caillebotte, Pissarro et Sisley.

capter l'instantanéité

À cette exposition, Monet présente son fameux tableau Impression, soleil levant (conservé au Musée Marmottan mais prêté à Orsay le temps de l’exposition), peint en novembre 1872 quand le port du Havre et son activité industrielle s’éveillent. L’œuvre fait sensation, la critique se déchaîne. Voulant tourner en dérision le tableau, le critique d’art Louis Leroy titre son article du 25 avril dans Le Charivari, « L’exposition des impressionnistes », donnant ainsi le nom à ce mouvement.La préoccupation principale des impressionnistes est de capter l’instantanéité à travers les effets de lumière, tels que Pissarro, Sisley et Monet l’ont fait, tandis que Renoir, Degas et Caillebotte s'intéressent aux scènes de la vie sociale parisienne. Leurs tons sont clairs, la touche est enlevée. Ils mettent l’accent sur la sensation visuelle, ce qui donne parfois un aspect inachevé et légèrement flou à leurs œuvres. Dans les premières années, les impressionnistes dépendent de mécènes, comme Ernest Hoschedé (c’est lui qui achète à Monet Impression, soleil levant, pour 800 francs), mais à partir de 1886, le marchand Paul Durand-Ruel joue un rôle important dans le soutien et la diffusion de leurs œuvres, notamment en les exportant aux États-Unis. à partir de 1895-1900, le mouvement est mieux apprécié, entrant progressivement dans les musées. Mais un événement va propulser le marché dans une nouvelle dimension : la vente de la collection impressionniste de Jakob Goldschmidt chez Sotheby’s New York en 1958 – première vente du soir en tenue de gala, retransmise à la télévision. La Terrasse à Sainte-Adresse (1867) de Monet, vendue 588 000 livres le 1er décembre 1967 chez Christie’s Londres, marque aussi les esprits (acquise par le Moma). Le marché a ensuite explosé dans les années 1980 avec une importante flambée des prix. Depuis, les chefs-d’œuvre, quand il y en a, se vendent toujours plus cher.

43 M€ acquise par le musée d’Orsay 

2_ Gustave Caillebotte  - Cette toile a été acquise par l’État grâce au mécénat du groupe LVMH en 2023 – elle avait été classée trésor national en janvier 2020. L’œuvre – dite aussi parfois Canotier au chapeau haut de forme– appartient à un ensemble d’une dizaine de peintures et pastels sur une thématique particulièrement emblématique des impressionnistes : la représentation de « la vie moderne » et des nouveaux loisirs de la bourgeoisie urbaine. Le cadrage photographique et cinématographique est tout à fait inédit pour l’époque. Témoin privilégié de son temps, Caillebotte, millionnaire à 25 ans, aide ses confrères et collectionne leurs œuvres qu’il lègue à sa mort à la France.

29,10 M€ Sotheby’s, New York, 03/11/2008 

1_edgar Degas  - Les Danseuses de ballet sont apparues en 1870 dans l’œuvre de Degas. Dans ces compositions, l’artiste s’invite en coulisses et fait découvrir l’envers du décor, les efforts et les souffrances des « petits rats » de l’Opéra. Surtout, il dénonce les conditions de vie de ces jeunes filles, généralement issues de milieux défavorisés, contraintes de se prostituer. Malgré ces pratiques sordides, dont Degas avait conscience, les ballerines sont restées le sujet le plus constant du peintre tout au long de sa carrière – près d’un millier de ses toiles et dessins y sont consacrés, atteignant les prix les plus élevés aux enchères.

8,5 M€ Sotheby’s Londres, 01/03/2017 

3_ Alfred Sisley  - Ce Peintre était spécialisé dans les paysages et les scènes de plein air, avec une prédilection pour les effets atmosphériques. Comme Monet, il suit l’exemple de Courbet en s'intéressant aux paysages enneigés. Ce thème séduit les impressionnistes car il leur permet d’étudier les variations de la lumière et de jouer des différentes nuances de leur palette. Grâce à des petites touches colorées posées sur la toile, le sol n’est pas uniformément blanc, mais parsemé de reflets bleutés, jaune pâle ou gris. Si les paysages ruraux ont aujourd’hui moins la cote, les scènes de neige restent très demandées.

98,70 M€ Sotheby’s New York, 14/05/2019 

4_claude Monet  - Cette Œuvre, qui avait été acquise par le marchand Paul Durand-Ruel le 2 juillet 1891, est un record pour l’artiste français et pour une toile impressionniste. C’est également la première fois qu’un tableau impressionniste franchit le seuil des 100 M$ (110,7M$). Le tableau appartient à une série peinte par Monet durant l’hiver 1890-1891, dans sa maison à Giverny (Normandie). Cette série sert de prétexte à un travail sur la lumière et les effets atmosphériques. Au fil des tableaux, les saisons passent et les conditions météorologiques changent, offrant à Monet des situations nouvelles.

À voir
« Paris 1874. Inventer l’impressionnisme »,
Musée d’Orsay, esplanade Valéry Giscard d’Estaing, Paris-7e, du 26 mars au 14 juillet.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°773 du 1 mars 2024, avec le titre suivant : La peinture impressionniste, des cotes élevées

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