En cette année anniversaire du mouvement Art déco et les nombreuses expositions qui lui sont consacrées, voici une bonne occasion d’étudier d’un peu plus près le marché du bijou Art déco, dont les prix restent soutenus.
Les prémices de l’Art déco sont visibles dès 1905 avec la naissance des mouvements d’avant-garde qui commencent à émerger dans toute l’Europe (cubisme, expressionnisme, abstraction).
Après la Première Guerre mondiale, la société française connaît de grandes transformations et l’art, un nouveau style fondé sur la géométrie et la pureté des lignes. L’Exposition des arts décoratifs et industriels modernes qui se déroule à Paris d’avril à octobre 1925 invite les artistes de tous les domaines à devenir modernes. Cette exposition fait date dans l’histoire de l’art et donne a posteriori son nom au style Art déco, réellement baptisé ainsi en 1966 à la suite d’une exposition rétrospective.
En ce qui concerne les bijoux, le changement est aussi radical : les lignes sinueuses de l’Art nouveau sont abandonnées au profit des lignes simplifiées et géométriques ; la pâte de verre et les couleurs diaphanes sont mises de côté tandis que la création est centrée sur les pierres précieuses, qui vont effacer la monture. L’art de la joaillerie explose, de nouvelles tailles de pierres sont inventées (le diamant taille baguette, etc.). « On distingue deux périodes : les années 1920, avec des couleurs vives et contrastées (saphir, rubis, émeraude, turquoise, lapis-lazuli, corail, ivoire, jade…), qui illustrent la fantaisie des Années folles, puis les années 1930 qui instaurent un bijou principalement noir et blanc (onyx, perles, diamants), en accord avec la dépression qui suit le krach boursier de 1929 », explique Laure Dorchy, expert et historienne en bijoux anciens. Le platine est le métal de prédilection (plus cher que l’or à l’époque), tandis que la typologie des bijoux suit la mode vestimentaire.
Aujourd’hui, le marché du bijou ancien se porte remarquablement bien et la côte du bijou Art déco se maintient au regard de la qualité des pierres et de l’intemporalité du style. Les enchères récentes le confirment. Cependant, l’engouement était plus marqué il y a une vingtaine d’années – le goût du public se tourne actuellement vers les années 1950 à 1970. Les pièces signées des grandes maisons de joaillerie, comme Van Cleef & Arpels, Cartier, Boucheron, mais aussi des noms plus confidentiels comme Raymond Templier ou Gérard Sandoz atteignent toujours des prix conséquents. En règle générale, tous les bijoux de qualité ont la faveur des acheteurs, tandis que la rareté des pièces d’exception renforce leur valorisation. Enfin, la hausse significative du prix des pierres de couleur (émeraude, saphir et rubis) – stimulé par la chute de la cote du diamant due à l’arrivée en masse des diamants de synthèse – joue également un rôle dans l’augmentation des prix.
40 000 €
1. Clip - Au sortir de la Première Guerre mondiale, les hommes ayant été mobilisés, les femmes ont dû mettre la main à la pâte pour participer à l’effort de guerre et faire bouillir la marmite. Terminé la femme engoncée dans son corset ! Elle s’émancipe et conquiert une liberté qui la rapproche de l’homme, facilitée par les jupes raccourcies, les coupes « à la garçonne » et le pantalon. La typologie des bijoux suit la mode vestimentaire. Pour accessoiriser les vestes, un nouveau type de bijou apparaît : le clip de revers, à l’instar de celui-ci.
Pauline’s Jewellery Box,
Bruxelles.
2. Pendants d'oreille - Le style vestimentaire de la femme a influencé les créateurs de bijoux. La tendance pour les robes flapperà large encolure et les cheveux courts mettaient parfaitement en valeur les boucles d’oreilles pendantes, à l’instar de ce modèle. Le corail et l’onyx étaient souvent associés dans les bijoux Art déco ; l’époque aimait les contrastes. L’onyx noir profond et le corail rouge-orangé ou rose créaient une opposition saisissante qui correspondait parfaitement à cette esthétique. L’association du clair et du foncé était très prisée pour son effet graphique et sophistiqué. Par ailleurs, l’Art déco s’inspirait de nombreuses civilisations anciennes (Égypte, Orient, Antiquité gréco-romaine) où ces matériaux étaient beaucoup employés.
Joalie,
Maison d’édition joaillière, Paris.
3. Bague - Ce bijou, réalisé en France vers 1930 (poinçon tête de chien), incarne le savoir-faire joaillier de l’époque. Son design géométrique emblématique illustre parfaitement l’esthétique Art déco, qui séduit un large public, attiré par son élégance moderne. L’influence du style reste forte dans la création contemporaine : de nombreuses maisons de joaillerie s’en inspirent encore aujourd’hui, revisitant avec plus ou moins de succès ses codes pour répondre aux attentes d’une clientèle en quête d’intemporalité et de modernité. Par exemple, les bagues Art déco sont particulièrement prisées comme bagues de fiançailles.
Maison Riondet,
Lyon.
4. Bracelet Ruban - Les bracelets, omniprésents dans les années 1920 avec la mode des bras dénudés, se portent par multiples, aussi bien au poignet qu’en haut du bras, soit de type rubans – comme ici – ou rivière, soit sous forme de manchette. Le bracelet ruban, emblématique du mouvement Art déco, est conçu comme un ruban articulé et épouse parfaitement le poignet. En novembre 2019, chez Sotheby’s Genève, un bracelet Cartier créé en 1927, issu d’une collection américano-asiatique, serti d’un saphir cabochon birman de 46,07 carats, a été adjugé à un collectionneur asiatique pour 6,1 millions de dollars [5,5 M€].
Artcurial,
Paris.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
La cote du bijou art déco se maintient
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°785 du 1 mai 2025, avec le titre suivant : La cote du bijou art déco se maintient