Droit public

La colonne Vendôme interdite de sortie du territoire

Par Jean-Marie Schmitt · Le Journal des Arts

Le 17 décembre 2004 - 376 mots

Un fragment de la colonne, disparu depuis 1875, est réapparu récemment, posant la question de son appartenance ou non au domaine public. Le tribunal administratif a tranché.

Paris - Un jugement du tribunal administratif de Paris a récemment confirmé un refus d’exportation du ministère de la Culture portant sur un fragment original de la colonne Vendôme.
La colonne Vendôme, érigée par Napoléon à la gloire de ses armées avec le bronze des canons saisis à Austerlitz, a été détruite par la Commune de Paris en 1871. Lorsqu’elle fut reconstruite, en 1875, on constata que six bas-reliefs, sur les quatre cent vingt-cinq que comptait l’ouvrage, avaient disparu.
Cent vingt-cinq ans plus tard, une demande d’autorisation d’exportation de l’un de ces fragments a été présentée au ministère de la Culture. Cette demande a été rejetée. Le demandeur a saisi le tribunal administratif pour voir annuler la décision de refus du certificat de libre circulation.
La discussion a tourné autour de subtiles considérations : la démolition de la colonne lui avait-elle fait perdre son caractère de monument de l’État pour la rabaisser à un ensemble de fragments mobiliers ? La décision de la Commune de Paris ordonnant la destruction avait-elle constitué une décision régulière de déclassement ? Motif des débats : si le bien ou ses reliefs avaient quitté le domaine public de l’État, ils avaient par la même occasion perdu leur caractère imprescriptible et inaliénable. Dès lors, un particulier avait pu en devenir propriétaire et le fragment était exportable.
Dans sa décision du 9 avril 2004 (1), le tribunal administratif a souligné que le changement de nature du relief litigieux, devenu meuble, ne lui avait pas fait quitter le domaine public de l’État. Par ailleurs, la Commune de Paris, autorité municipale, n’avait pas autorité pour déclasser un bien de l’État.
Conclusion : le bas-relief restait la propriété de l’État et son détenteur ne pouvait valablement en requérir l’exportation.
CQFD. Reste à savoir si l’État va considérer le possesseur comme un fidèle gardien de la mémoire nationale ou au contraire revendiquer la restitution du bas-relief.

(1) N° 0102686/7.
La décision publiée dans L’Actualité juridique du droit administratif (AJDA) du 20 sept. 2004, p. 1709, comporte une intéressante note d’Olivier Le Bot sur la notion de domaine public de l’État.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°205 du 17 décembre 2004, avec le titre suivant : La colonne Vendôme interdite de sortie du territoire

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