La collection Levy ne connaît pas la crise

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 15 octobre 2008 - 727 mots

Les meubles et objets d’art XVIIIe réunis par Léon Levy en une vie de collection ont triomphé malgré la baisse de la Bourse.

PARIS - Le marché de l’art n’en revient pas des enchères extraordinaires obtenues le 2 octobre à Paris chez Sotheby’s pour les meubles et objets d’art XVIIIe et XIXe rassemblés par l’homme d’affaires genevois Léon Levy en près de cinquante années d’acquisitions. Les 59 lots ont presque tous trouvé preneur pour un montant global de 12,2 millions d’euros, soit deux fois l’estimation basse. Plus de 80 % des lots ont dépassé leurs estimations hautes. La maison de ventes enregistre son plus important montant pour une collection vendue dans sa salle parisienne. Selon Brice Foisil, directeur du département de mobilier chez Sotheby’s à Paris : « Les excellents résultats sont le signe d’un marché soutenu porté par des collectionneurs internationaux et de nouveaux acheteurs à la recherche d’objets majeurs et rares. Les amateurs sont venus nombreux de France et d’Europe rendre hommage au goût de M. Léon Levy (1 500 visiteurs en cinq jours d’exposition). » « Malgré la crise financière, les enchérisseurs étaient plus nombreux et d’origine plus variée (notamment des acheteurs russes) que pour la collection Mavrommatis que nous avons dispersée avec succès le 8 juillet à Londres [80 lots adjugés pour 10,4 millions de livres sterling (13 millions d’euros)] », précise Mario Tavella, directeur international du département. Le lot phare était une paire de candélabres d’époque Louis XVI, auréolés d’une provenance historique. Formés de figures en biscuit de Sèvres d’après Simon Louis Boizot et d’une monture en bronze doré attribuée à Pierre Philippe Thomire, ils furent offerts par Louis XVI en 1785 à la princesse des Asturies, future reine d’Espagne. Plus tard, ils furent vendus par la reine Isabelle II, qui partit en exil à Paris vers 1870, avant d’entrer dans la collection Rothschild au château de Mentmore en Angleterre. La paire est partie à 1,4 million d’euros (son estimation haute), soit un record mondial pour des candélabres.

Gloire aux porcelaines montées
Un ensemble de porcelaines montées dont Léon Levy raffolait constituait le cœur de la collection. La plus belle enchère est allée à une exceptionnelle garniture de trois vases en porcelaine bleue de Chine d’époque Kangxi (1662-1722), à monture de bronze doré d’époque Louis XV, attribuée à Jean-Claude Duplessis et adjugée 1,15 million d’euros. Une paire de vases pots-pourris en porcelaine de Chine céladon gaufré d’époque Kangxi, à monture de bronze doré d’époque Louis XV, a également atteint le million d’euros. Issu de l’ancienne collection Nelson A. Rockefeller, une paire de cygnes en porcelaine de Meissen du milieu du XVIIIe siècle, modelée par Johann Kändler, sur une base en bronze doré d’époque Louis XV, s’est envolée à 660 750 euros. Les pièces XIXe, dopées par l’effet collection, n’ont pas démérité, à l’instar d’une grenouille en porcelaine de Chine émaillée bleue turquoise d’époque Kangxi, sur une monture en bronze doré de style Louis XV, estimée 10 000 à 15 000 euros et adjugée 34 350 euros. Ayant appartenu à Florence J. Gould, elle a bénéficié d’une prime au pedigree.
À l’égal des objets, les meubles prestigieux de Leon Lévy ont emballé les amateurs. Une paire de cabinets en placage d’ébène et marqueterie de laiton et étain gravé, d’époque Louis XVI, estampillés E. LEVASSEUR, a été emportée pour 1,16 million d’euros, contre une estimation déjà gourmande de 500 000 à 800 000 euros, sachant que cette paire avait été acquise pour 300 000 euros à la galerie Jacques Perrin à la Biennale des Antiquaires de Paris en 1992. Estimée 250 000 à 400 000 euros, une suite de chaises en bois doré d’époque Louis XVI, estampillées L.C. CARPENTIER et livrées pour le prince de Condé au Palais-Bourbon, a suscité une belle bataille d’enchères, jusqu’à 840 750 euros. Et deux commodes dessertes de la fin du XIXe, de style Louis XVI, réalisées par Henry Dasson dans le goût de Weisweiller, ont trouvé preneur à 168 750 euros alors que Sotheby’s en attendait au mieux 120 000 euros.
Le goût et la passion de Léon Levy ont payé, dans un domaine parfois jugé comme suranné. Les collections de qualité, constituées dans le temps, semblent capables de faire face aux vicissitudes des marchés financiers.

COLLECTION LÉON LEVY

- Estimation : 6 à 10 millions d’euros
- Résultats : 12,2 millions d’euros
- Nombre de lots vendus/invendus : 55/4

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°289 du 17 octobre 2008, avec le titre suivant : La collection Levy ne connaît pas la crise

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