Trois questions à

Jean-Pierre Osenat, président du Syndicat national des Maisons de ventes volontaires (Symev) et commissaire-priseur à Fontainebleau

« Faire bouger l’image des ventes aux enchères »

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 8 juillet 2005 - 696 mots

 Pourquoi votre profession n’a-t-elle actuellement pas bonne image ?
À l’occasion du renouvellement des membres du Conseil des ventes volontaires, organe de régulation des ventes publiques, la presse écrite et audiovisuelle dénonce de récentes affaires qui entachent l’image du marché de l’art français, laissant entendre que celui-ci a besoin d’être « moralisé ». S’il est vrai que certains professionnels ont tenté récemment d’écouler des objets douteux avec la complicité de pseudo-experts, des mesures ont été prises conduisant à leur retrait et à des sanctions disciplinaires. On peut lire dans la presse « que certains veulent nettoyer le marché de l’art et mettre un terme aux magouilles supposées » ; cela peut être préjudiciable à tout le marché. Certes il y a des activités malsaines, mais le Symev est le premier à ne pas tolérer les rares écarts qui portent atteinte à l’éthique d’une profession réglementée offrant toute garantie de transparence et de confiance. Le Symev ne se place pas sous l’éclairage des médias. Pour autant, il ne reste pas inactif ; il a proposé dès 2004 à ses adhérents une charte d’engagement qualité qui garantit à leurs clients des services accrus et une parfaite transparence des pratiques. Par ailleurs, nous avons donné des recommandations à nos adhérents pour qu’ils vérifient que leurs experts sont bien assurés et qu’ils ne mettent pas en vente des objets leur appartenant (lorsqu’ils participent à cette même vente). Chaque fois qu’un problème est apparu, nous avons alerté le Conseil des ventes et nous nous sommes très souvent joints à des actions initiées par des SVV (sociétés de ventes volontaires) dans des affaires d’intérêt collectif de la profession dans lesquelles nous intervenons discrètement. Généraliser des comportements marginaux (les ventes de biens neufs, les ventes montées par des organisateurs, les ventes de grossistes de vins, les faux en archéologie…) par des effets d’annonce ne peut que semer le doute et concourir à une délocalisation accélérée des ventes. Il en va de la vitalité du marché de l’art français et de ses 360 sociétés de ventes. Nous pensons qu’un marché sain et transparent est une garantie de survie et nous y travaillons activement avec une équipe d’administrateurs très impliqués et bénévoles ainsi que des avocats spécialisés.

Quels sont les objets qui vous ont marqué dernièrement ?
Je suis stupéfait par le prix atteint par les six fauteuils d’Eileen Gray chez Camard le 1er juin à Drouot, de 1,1 à 1,7 million d’euros l’unité. Je constate qu’il y a un décalage entre les objets rares, dont les prix ne cessent de grimper, et les objets de qualité moyenne, qui se vendent plus difficilement. À part cela, je fais continuellement de nouvelles découvertes sur l’aventure napoléonienne et je suis encore plus étonné par les gens qui s’y intéressent. Napoléon transcende tout : les pays, les générations, les couches sociales. D’une manière générale, l’Histoire est devenue primordiale dans le désir d’acquisition. La provenance des lots est déterminante. Les collectionneurs achètent les objets en partie pour leur environnement culturel et social. De plus en plus d’amateurs, nostalgiques du passé, déçus des difficultés de la vie présente, se tournent résolument vers l’histoire et l’art qui lui est lié.

Quelle est l’actualité du Symev ?
Nous organisons des Journées nationales des ventes aux enchères qui se dérouleront les 19 et 20 novembre, dans toute la France. 87 % des Français n’ont jamais acheté ni vendu dans un hôtel des ventes (1). Par ailleurs, nous nous sommes rendu compte que les nouveaux acheteurs venaient aux enchères grâce aux nouvelles habitudes de consommation qu’offre l’Internet (en l’occurrence eBay). Notre campagne veut montrer qu’on fait mieux qu’eBay en termes de compétences, de savoir-faire et de garanties. Avec une stratégie de communication innovante, nous voulons faire bouger l’image des ventes aux enchères et séduire un nouveau public plus jeune. Aujourd’hui, nous évoluons dans un monde de compétition où nous avons notre carte à jouer. C’est en fédérant les professionnels que nous représentons autour d’actions positives et modernes que nous réussirons à convaincre nos clients vendeurs et acheteurs de la qualité des services français. Ces journées Portes ouvertes, je l’espère, perdureront comme les Journées du patrimoine ou la Fête de la musique.

(1) Étude SYMEV-HEC 2002

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°219 du 8 juillet 2005, avec le titre suivant : Jean-Pierre Osenat, président du Syndicat national des Maisons de ventes volontaires (Symev) et commissaire-priseur à Fontainebleau

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