ART CONTEMPORAIN

Françoise Pétrovitch avance masquée

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 18 octobre 2017 - 491 mots

À la galerie Semiose, une douzaine de nouvelles toiles et sculptures explorent le motif du double.

 Paris. On a d’abord connu Françoise Pétrovitch en lavis et aquarelle, puis dans un second temps en céramique. À l’occasion de sa troisième exposition à la galerie Semiose depuis 2013 (elle était auparavant à la galerie RX), on la retrouve en peinture et en bronze, belle preuve de sa volonté à se renouveler.

S’il fallait trouver un thème à l’ensemble d’une dizaine de toiles et deux sculptures toutes inédites ici présentées, on miserait volontiers sur celui du double. Le double explicitement incarné par les deux bronzes puisque le premier, Fille au masque, évoque, comme son titre l’indique, une tête de jeune fille pourvue de cheveux rouges et d’un masque d’animal lui cachant le visage. Tandis que le second, Ile, montre un buste posé dans un bassin en zinc végétalisé et surmonté d’un visage découvert portant le masque sur le sommet du crâne. Les deux œuvres permettent en outre à l’artiste d’introduire la couleur dans la sculpture, avec une vraie peinture rouge pour la chevelure sur la première et du vert pour les plantes aquatiques dans l’eau du bassin de la seconde.

Le double se dédouble ensuite avec les toiles réparties en deux séries. L’une, la bien nommée « Nocturne », est constituée de toiles aux fonds brun sombre ou noirs, au milieu desquels émergent ici une main gantée violette, là une branche de fleurs rouges, ailleurs un garçonnet avec un masque (encore) sur la tête et la peau rouge. Chacun des sujets semble sortir de la pénombre dans un éclat de couleur qui vient de la peinture, comme une lumière intérieure, comme une braise.

Fluidité du trait
La seconde série, toute récente et sans titre, prend le parti inverse. À la densité, à la profondeur, à l’immobilité suspendue des précédentes répond ici un travail sur la clarté, sur la fluidité du trait, sur la rapidité d’exécution, sur la surface palpable qui rappelle les splendides transparences et la liberté dont témoigne habituellement Françoise Pétrovitch dans ses aquarelles. Face à ces toiles, on a l’impression de voir la peinture en train de se faire. Nul doute que dans cette discipline, l’artiste a grandi. Tout comme les enfants qui peuplaient auparavant ses œuvres et qui sont maintenant des jeunes gens ou des adolescents, que Pétrovitch profile avec tendresse et précision dans les gestes et attitudes qui les caractérisent, alanguis, indolents, rêveurs, mélancoliques. Même s’il reste du vert dans certains tableaux, le paradis des amours enfantines semble « déjà plus loin que l’Inde et la Chine » comme l’écrivait Baudelaire.

De façon moins poétique, les prix vont de 4 000 à 22 000 euros pour les tableaux et jusqu’à 35 000 pour le plus grand bronze. Des sommes logiques pour une artiste (née en 1964) qui, après plus de vingt ans de carrière et doté d’un univers et d’une écriture bien à elle, est de plus en plus installée et présente sur la scène artistique.

Françoise Pétrovitch,
jusqu’au 28 octobre, galerie Semiose, 75003 Paris.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°487 du 20 octobre 2017, avec le titre suivant : Françoise Pétrovitch avance masquée

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