Empire

Fontainebleau confirme

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 19 novembre 2004 - 678 mots

 FONTAINEBLEAU - « Chaque année depuis trois ans, on m’attend au tournant en pensant que la marchandise va s’épuiser », raconte Jean-Pierre Osenat. Pourtant, le commissaire-priseur de Fontainebleau a cette fois encore fait le plein pour un rendez-vous qu’il ne voulait surtout pas manquer et auquel les amateurs du monde entier ont répondu présents. La vente anniversaire du bicentenaire du sacre de Napoléon a ainsi engrangé 3,3 millions d’euros (le double que prévu) pour 95 % de lots vendus sur trois jours, du 6 au 8 novembre à l’hôtel des ventes de Fontainebleau. Avec un catalogue de plus de 800 lots dont quelques chefs-d’œuvre historiques inédits, une armée internationale d’amateurs de l’Empire s’est mise en branle. Dans une ambiance théâtrale, une douzaine de grenadiers de la Garde impériale coiffés de leur casque à poils noirs (tirés tout droit de l’une des reconstitutions historiques que connaît de temps à autre la ville de Fontainebleau) sont venus saluer le début de la vacation portant sur les livres et autographes. Les enchères ont été vives pour les livres aux grandes armes de Napoléon Ier, à l’instar des 17 950 euros enregistrés pour neuf tomes de l’ouvrage Histoire par Hérodote qui, outre les armoiries impériales, portaient le cachet de la bibliothèque de Sainte-Hélène et des annotations de l’Empereur.
Les gros lots ont défilé le deuxième jour : la Légion d’honneur de l’Empereur, en or et argent, sertie de diamants et d’émeraudes, réalisée par l’orfèvre-joaillier Nitot et estimée 150 000 à 200 000 euros, a été emportée pour 231 100 euros par un acheteur français . Fine fleur du mobilier Empire, la paire de consoles estampillées Jacob en acajou et bronzes dorés, estimée 200 000 à 250 000 euros, a été achetée pour 287 680 euros par le beau-frère du maire de Moscou. « Il s’agit de pièces rarissimes. Le musée de Fontainebleau n’a même pas de meubles de cette qualité », commente Jean-Christophe Chataigner, directeur du département Empire de la maison de ventes Osenat. Une salière double en argent ciselé du service de l’impératrice Joséphine exécutée par Biennais d’après un dessin de Percier, estimée 150 000 euros, est également partie en Russie pour 174 520 euros. La nationalité de l’acquéreur de l’édition originale illustrée de l’album du sacre de Napoléon, une pièce adjugée 185 836 euros, n’a pas été dévoilée. Pour Jean-Pierre Osenat, « il est clair que les Russes ont marqué la vente. Ils étaient davantage présents que les Américains cette année. Demain, ce sera les Chinois. Les Japonais sont déjà passionnés, mais ils n’ont pas les moyens ».
Les collectionneurs se sont aussi battus pour un important dessin à la mine de plomb du peintre David représentant Bonaparte à cheval. L’œuvre a fait le bonheur d’une fondation suisse pour 100 249 euros, le double de l’estimation. En outre, un Portrait de Pauline Bonaparte par Bosio a été vendu 80 199 euros contre une estimation haute de 30 000 euros, et une petite huile sur toile montrant le jeune Napoléon II dans son bain est partie à 32 433 euros, contre une estimation de 8 000 euros. En revanche, un tableau de la Cérémonie du Sacre, le 2 décembre 1804, de l’atelier du peintre David, estimé 150 000 à 200 000 euros, n’a pas trouvé acquéreur.
Du côté des « reliques », le coffret de chirurgie dentaire de l’Empereur réalisé par Biennais et Grangeret a été emporté par un amateur français dans son estimation pour 76 661 euros. Une paire de bas portés par l’Empereur à Sainte-Hélène, provenant de l’ancienne collection du prince Victor Napoléon, a atteint le record de 47 176 euros, et un mouchoir de Napoléon Ier à Sainte-Hélène en très bon état, ramené par le général Bertrand, est monté à 9 671 euros, soit l’un des meilleurs prix pour un petit bout de tissu impérial. « L’État français reste le grand absent de la vente », regrette Jean-Christophe Chataignier. Il n’aura préempté qu’une poignée d’autographes pour les archives départementales corses, plusieurs lettres et une gravure des Adieux de Fontainebleau d’après Horace Vernet, le tout pour quelques milliers d’euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°203 du 19 novembre 2004, avec le titre suivant : Fontainebleau confirme

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