ENTRETIEN

Fati Fotouhi, architecte et collectionneuse, cofondatrice et présidente de l’association Les Centaures

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 26 mars 2008 - 642 mots

« Les belles rencontres n’ont pas de valeur ».

Vous mettez en vente aux enchères à Paris la collection d’art contemporain de l’association Les Centaures. Comment se sont créées l’association et la collection ?
En 1993, je me suis jointe à Christian Forestier, architecte d’intérieur, passionné d’art, à David Blecher et Bruno Vanryb, pour fonder la galerie d’art Askéo, 19, rue Debelleyme à Paris (fermée en 2006 après le décès de Christian Forestier). Parallèlement, sur une idée de Christian Forestier, nous avons créé une association capable de fédérer un certain nombre d’amateurs d’art plus ou moins initiés, afin de promouvoir la jeune création et de partager des émotions liées à l’art. L’activité des Centaures tourne autour de trois pôles : les visites d’expositions et de musées ; les visites d’ateliers d’artistes et l’achat d’œuvres en commun.

Comment fonctionne ce fonds commun d’acquisition ?
Les Centaures ne sont pas un club d’investissement, mais une association de passionnés d’art. L’idée est de réunir des œuvres de toutes techniques d’artistes vivants, choisies par un comité de sélection élu chaque année par l’assemblée générale de l’association. Les œuvres sont prêtées aux membres par roulement, pour une durée d’un an. La répartition se fait en fonction des préférences de chacun et par tirage au sort. Notre fonds d’acquisition est alimenté par une cotisation fixe mensuelle de 40 euros par adhérent (nous sommes une cinquantaine). Pour faire évoluer cette collection, nous avions projeté de revendre au bout de sept ans les œuvres que nous avions acquises les trois premières années, soit en 2000. Mais avec la crise, nous avons reporté la vente plusieurs fois. Aujourd’hui, après 15 ans de collection, nous vendons tout.

Comment avez-vous choisi votre maison de ventes ?
Nous sommes allés voir plusieurs commissaires-priseurs. Il était impératif pour nous de vendre la collection dans son ensemble, quelle que soit la différence de valeur ou de reconnaissance des artistes réunis.

Quels sont les artistes phares de la vente ?
Nous offrons quatre tableaux d’Olivier Debré que nous avons rencontré dans son atelier à Amboise (est. de 1 200 à 13 000 euros) et trois peintures sur toile de Claude Viallat (est. de 1 500 à 6 000 euros). De Jean-Pierre Pincemin, qui est sans doute l’artiste qui m’a le plus émue, nous avons acquis trois œuvres (est. autour de 2 000 euros). Piero Pizzi Cannella, Jean-Luc Parant, Bernard Pagès ou encore Geneviève Asse font partie de notre aventure collective. La sculpture est un médium qui nous a énormément séduits, notamment à travers les œuvres d’Étienne Jacobée, Odile de Frayssinet ou Henri-Georges Vidal. Nous suivons également depuis des années le travail de Fadia Haddad, peintre d’origine libanaise travaillant à Paris, dont nous présentons plusieurs huiles sur papier entoilé (est. de 1 000 à 6 000 euros). Une de ses œuvres, Songeur de synonyme, a été adjugée 22 100 livres (28 300 euros) chez Sotheby’s à Londres le 24 octobre 2007, trois fois son estimation ! Mais nous sommes aussi très heureux de faire découvrir d’autres talents, à l’instar de Jean-Gilles Badaire (est. de 250 à 1 500 euros) et du Congolais Gatien Mabounga (est. de 300 à 1 200 euros).

Après la vente, que deviendront Les Centaures ?
L’association se poursuit sur le même principe. Ceux qui voudront se retirer emporteront une somme calculée proportionnellement à leur apport de cotisant. Pour les autres, l’aventure continue. Et je suis sûre que certains d’entre nous voudront racheter des œuvres qu’ils ont eus chez eux et dont ils ne veulent plus se séparer. À l’issue de cette vente, nous pouvons très bien être financièrement gagnants ou perdants, mais les belles rencontres que nous avons faites n’ont pas de valeur.

- COLLECTION LES CENTAURES, vente le 4 avril 14h30 à Drouot, SVV Joron-Derem, tél. 01 40 20 02 82, www.joron- derem.com, expert : Anne Bossennec, nombre de lots : 110, estimation : 100 000 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°278 du 28 mars 2008, avec le titre suivant : Fati Fotouhi, architecte et collectionneuse, cofondatrice et présidente de l’association Les Centaures

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