Émirats arabes unis

Dubaï mise sur l’art

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 15 décembre 2006 - 603 mots

Bien que pauvre en ressources naturelles, Dubaï (comme sa voisine Abou Dhabi, lire p. 3) a connu en une décennie un développement exponentiel fondé sur le tourisme et le commerce. « Dubaï a été construite avec la philosophie de “construisez et ils viendront” », précise Lisa Ball-Lechgar, rédactrice en chef de Canvas, magazine d’art du Moyen-Orient. D’ici à 2015, la population devrait être de 15 millions d’habitants. Dans neuf ans, le nouvel aéroport aura une capacité plus grande que ceux de Chicago et Heathrow réunis. » De fait, ce carrefour commercial s’est doté d’une population à 80 % étrangère. « Il y a moins de règles à Dubaï que dans d’autres émirats. Les Occidentaux peuvent continuer à y vivre à l’occidentale, car la ville a besoin des étrangers, souligne Mehdi Ben Cheick, directeur de la galerie parisienne Itinerrance. Les événements en Irak ou au Liban n’ont pas de répercussion sur la dynamique de Dubaï. »
Ce potentiel n’a pas laissé Christie’s insensible. Celle-ci y a organisé le 24 mai une vente d’art contemporain générant 8,4 millions de dollars. La proportion de vendeurs et d’acheteurs de la région s’élevait respectivement à 85 % et 53 %. Des artistes moyen-orientaux, introduits parfois pour la première fois sur le marché, ont enregistré des prix douillets. Orbits of Praize, une œuvre de l’Égyptien Ahmed Moustafa, a même été vendue 240 000 dollars. En étendant son champ à la joaillerie, l’écurie de François Pinault mise désormais sur deux sessions de ventes annuelles. La première débutera les 31 janvier et 1er février 2007. « Dubaï attire toutes les communautés du Moyen-Orient, jusqu’à l’Inde, où se trouvent beaucoup de nos clients, déclare Jussi Pylkkanen, président de Christie’s Europe. Au cours de ces cinq dernières années, nous avons constaté une progression de 300 % des acheteurs du Moyen-Orient dans les ventes de bijoux et d’art moderne. » Et d’ajouter : « L’art contemporain du Moyen-Orient sera le cœur de notre activité dans les vingt années à venir à Dubaï. »

Une « Gulf Art Fair »
Les projets immobiliers intègrent aujourd’hui un volet artistique. Celui de Culture Village, dont l’ouverture est prévue en 2009 sur quelques centaines d’hectares, prévoit ainsi un îlot pour les galeries. Ces dernières se sont pour l’heure développées dans le centre moderne, le quartier historique de Bastakiyah et la zone industrielle d’Al Quoz. C’est dans cette zone qu’a ouvert en 2005 la galerie The Third Line, spécialisée dans l’art du Moyen-Orient. Sa clientèle se compose à 60 % d’Émiratis et à 40 % d’Occidentaux implantés dans la région. Claudia Cellini, codirectrice de la galerie, ne néglige pas l’impact de la vente inaugurale de Christie’s sur son activité. « Elle a légitimé ce que nous faisons, indique-t-elle. Nous n’avons pas eu de ventes massives par la suite, mais nos artistes ont été pris au sérieux. » Une œuvre de l’Iranien Farhad Moshiri, vendue par une entreprise iranienne, avait alors décroché 48 000 dollars, un prix largement supérieur au tarif pratiqué par la galerie.
The Third Line participera du 8 au 10 mars 2007 avec trente-sept autres galeries à la première édition de la « Gulf Art Fair » à Dubaï. Le salon a capté des enseignes internationales comme Pace Wildenstein (New York), Continua (San Gimignano, Pékin) et Baudoin Lebon (Paris). Les organisateurs misent sur 8 000 à 10 000 visiteurs. À cette occasion, des firmes locales pourraient aussi acheter des sculptures monumentales destinées à des espaces publics. Il est toutefois regrettable que l’événement n’ait pas été programmé simultanément à la Biennale de Sharjah, inaugurée le 4 avril. En terra incognitae, la synergie n’est pourtant pas un luxe !

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°249 du 15 décembre 2006, avec le titre suivant : Dubaï mise sur l’art

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque