Drouot met en appétit

Pour les Temps Forts, les commissaires-priseurs sortent leurs plus belles pièces

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 17 mai 2002 - 756 mots

Les Temps Forts de Drouot ouvrent leurs portes du 21 au 26 mai dans les prestigieux salons de Drouot-Montaigne, à Paris. Une sélection d’environ 400 objets parmi les plus beaux de leur catégorie est exposée, notamment un petit pâtissier et quelques grands plats pour donner l’appétit.

PARIS - L’air un peu timide, mains croisées devant lui dans une posture imposée par l’artiste, Le Petit Pâtissier, une huile sur toile marouflée sur panneau de 1927 (70 x 24 cm) signée Soutine, évocateur de mets sucrés délicieux, devrait aiguiser les appétits le 6 juin (étude Cornette de Saint Cyr). Estimée modestement 1 million d’euros, la peinture issue d’une série plaisante sur le thème des petits métiers est des plus réussies. “Dans les blancs dominants, le peintre a mis des effets bleutés”, s’extasie Arnaud Cornette de Saint Cyr. Dans la même vente, La Ville des sables, un grand tableau de Delvaux (1,5 x 2,6 m) réalisé en 1977 représente “dans un paysage de ruine antique, une femme habillée dans la posture des anges de l’Annonciation à côté d’une femme nue cachant son sexe. Mais on peut y voir une autre symbolique : l’allégorie de l’Amour sacré et de l’Amour profane”. Pour cette œuvre qui a été offerte par l’artiste aux actuels propriétaires belges, l’estimation de 800 000 euros devrait être dépassée. Poétique et mythologique est Le Matin, une huile sur toile (92 x 73 cm) datée de 1962 et signée Victor Brauner, l’enfant terrible du Surréalisme, qui montre une étrange créature féminine dotée de trois têtes, de quatre sexes et portant aux pieds des oiseaux. La maison Arcurial-Briest n’en attend pas moins de 230 000 euros le 3 juin à l’hôtel Dassault. Pour ce prix, on pourra peut-être emporter le LF, 1984 de Jean-Michel Basquiat, un tableau (218,5 x 172,5 cm) à l’acrylique et collage Xerox sur toile qui sera proposé de 18 juin par l’étude Digard. Toile inédite de 1915 (92 x 128 cm), à l’huile et à la cire, Le Marché au Minho de Sonia Delaunay est l’une des deux versions définitives de cette série – l’autre demeure au Centre Pompidou. Sur une estimation de 600 000 euros, cette recherche sur la couleur et la lumière, intensifiée par les effets vibrants de la cire, sera portée aux enchères le 14 juin par l’étude Calmels-Chambre-Cohen.

Plats de faïence et table de salon
“À mon avis, c’est le plus beau plat Renaissance qui passe sur le marché parisien depuis fort longtemps, observe l’expert Georges Lefèbvre à propos d’un large plat Deruta (diamètre 49 cm) daté de 1520 à décor polychrome sur fond bleu nuit illustrant un loup vêtu prêchant aux animaux, d’après un proverbe tiré de l’épopée animale d’Ésope. “La polychromie intense tire avantage de l’équilibre des couleurs. Ce plat est pratiquement le pendant d’un autre, exposé au Louvre.” Il sera proposé le 26 juin par l’étude de Nicolay sur une estimation de 100 000 euros dont les collectionneurs avertis pourraient ne faire qu’une bouchée. Un autre grand plat de faïence Iznik décoré d’une rosace bleue et turquoise, estimé 140 000 euros (vente du 6 juin, étude Poulain-Le Fur) devrait, selon l’expert Anne-Marie Kevorkian, faire saliver à la fois les collectionneurs de faïence, les amateurs de Haute Époque et la clientèle moyen-orientale. “Il est superbe et date d’une très bonne période de l’art Iznik, 1530-1535, avant les décors rouges en relief. On est en pleine époque Soliman le Magnifique.” Le mobilier aiguisera certainement les appétits avec cette paire d’encoignures en acajou massif de la garde-robe des petits appartements de Marie-Antoinette aux Tuileries, d’époque Louis XVI, précieusement estampillée J.H. RIESENER. Estimée 150 000 euros, la paire royale devrait toutefois laisser les enchérisseurs sur leur faim le 17 juin (études Rieunier-Bailly-Pommery et Poulain-Le Fur) car l’expert Guillaume Dillée pense à une préemption du lot. Le fauteuil en noyer sculpté relaqué blanc et daté vers 1770, à vendre le 12 juin (étude Libert, Castor), serait-il vraiment de BAUVE comme l’indique l’estampille ? Une autre hypothèse a été avancée : il s’agirait d’un prototype exécuté par Delanois ou son entourage d’après des dessins “retour à l’antique” de l’ornemaniste Charles Delafosse. Une table de salon en placage sur toutes ses faces de bois d’ébène et de sycomore teinté, d’époque Louis XVI, passera sous le marteau de Me Aguttes le 6 juin à l’hôtel Dassault. Elle est tout de même estimée 230 000 euros. Pour Guillaume Dillée, “les petits meubles sont particulièrement recherchés. Celui-là, avec sa marqueterie extraordinaire de losanges, est un vrai petit bijou”. Et son estampille M. CARLIN est la cerise sur le gâteau.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°149 du 17 mai 2002, avec le titre suivant : Drouot met en appétit

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