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Paris

Castellani, « père du minimalisme »

La galerie Tornabuoni Art ne présente pas moins de 45 tableaux d’Enrico Castellani

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 14 novembre 2011 - 743 mots

PARIS - Pour l’artiste américain Donald Judd (1928-1994), pourtant peu réputé pour ses compliments, Enrico Castellani a toujours été le père du minimalisme. Pas moins.

Pour Bernard Blistène, conservateur, directeur du développement culturel au Centre Pompidou et auteur de la préface du livre-catalogue, « il faut redécouvrir Castellani, car c’est l’artiste qui fait la synthèse des expériences esthétiques des années 60 de part et d’autre de l’Atlantique ». Pour Michele Casamonti, le directeur de Tornabuoni Art, l’actuelle exposition de Castellani est la plus importante présentée dans sa galerie parisienne depuis son ouverture en 2009. Et ce pour au moins trois raisons. D’abord parce qu’elle se tient au moment où l’intérêt pour cet artiste, né en 1930 à Castelmassa (Italie) et donc aujourd’hui âgé de 81 ans, n’a jamais été aussi grand, aussi bien de la part des collectionneurs privés que des institutions publiques. Ensuite parce qu’elle s’inscrit parfaitement dans la volonté de Michele Casamonti de faire de sa galerie « une vitrine internationale pour l’art italien de la deuxième moitié du XXe siècle ». Après avoir inauguré avec Lucio Fontana, il a, depuis, montré Alighiero Boetti, Mario Ceroli et Arnaldo Pomodoro. Enfin, la présentation est indéniablement de grande qualité et réunir une telle sélection relève du défi.

L’ensemble regroupe, en effet, 45 œuvres datées de 1958 – c’est-à-dire le tout début de sa carrière –, à 2008, soit cinquante ans de travail, avec notamment une bonne dizaine d’œuvres des années 1960, parmi lesquelles le fameux Dittico Rosso (« Diptyque rouge ») de 1963 qui fut présenté à la Biennale de Venise en 1964. Avec également une Superficie bianca de 1959, date clef dans la carrière de Castellani puisque c’est l’année où il met en place son concept et sa méthode : planter des clous dans un châssis et tendre par-dessus une toile monochrome. Ce qui induit un refus de la planéité et un jeu avec la surface, le relief qui place chaque œuvre à la croisée de la peinture, de la sculpture et de l’architecture. Car ainsi tendue, comme une peau, un tambour, sur ces pics, proéminences, protubérances, la toile devenue souple, « extra-flexible », élastique, ondule, dessine des rythmes et s’amuse des creux et des bosses, des monts et des vaux. Et ce dans le but clairement défini de saisir la lumière et l’ombre, c’est-à-dire également le temps et l’espace. On devrait même dire les lumières et les ombres tant celles-ci varient non seulement d’une œuvre à l’autre mais aussi à l’intérieur d’une même œuvre, en fonction des points de vue et des heures du jour.

Apparemment simple mais fondé sur une minutie et une grande maîtrise de la construction, le principe de départ va ouvrir un nombre considérable de possibilités plastiques et de variations sur un même thème, selon la façon, aléatoire, dont Castellani compose ses grilles, ses trames, ses alignements. C’est ce que révèle le parcours ici proposé qui résume bien la démarche radicale, constante et rigoureuse de celui qui fut le compagnon de route de Manzoni, avec qui il fonda en 1959 la revue Azimuth.

Une cote ascensionnelle
Étant donné la qualité de cette œuvre, son historicité et la reconnaissance dont elle bénéficie, il n’y a rien d’étonnant à ce que la cote de l’artiste ait triplé voire quadruplé depuis 2005. À la suite d’un record pour un tableau de 1963, vendu 970 000 euros en mai 2010 chez Sotheby’s à Milan, une œuvre de premier ordre peut ainsi dépasser aujourd’hui le million d’euros. Dans l’exposition, Dittico roso, un grand diptyque rouge de 1963 (157 x 152 x 20 cm) est ainsi affiché à 1 350 000 euros. Superficie alluminio, un tableau argenté de 1972 (156 x 70 cm) est proposé à 1 150 000 euros. Superficie bianca, de taille un peu plus modeste (130 x 163), est quant à lui annoncé autour de 800 000 euros. Les « petites bourses » peuvent se consoler avec de plus petits formats (50 x 50 ou 60 x 60), plus tardifs (de 2005, 2007 ou 2008), qui oscillent entre 80 000 et 100 000 euros. La cote des œuvres sur papier est plus accessible, 30 000 ou 40 000 euros, mais il n’y en a aucune exposée à la galerie.

Enrico Castellani

Nombre d’œuvres : 45
Gamme de prix : entre 80 000 et 1 350 000 €

Jusqu’au 17 décembre, galerie Tornabuoni Art, 16, av. Matignon, 75008 Paris, tél. 01 53 53 51 51, du lundi au samedi 10h30-18h30, www.tornabuoniart.fr

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°357 du 18 novembre 2011, avec le titre suivant : Castellani, « père du minimalisme »

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