Art Brussels, une foire à taille humaine

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 1 avril 2004 - 764 mots

Art Brussels, dont la 22e édition se déroule au début du mois d’avril, est une de ces foires d’art contemporain sans prétentions ni paillettes.

Prise en main par Artexis, qui possède aussi le salon Eurantica, la foire Art Brussels attire toujours les exposants français. Avec vingt-neuf participants, les galeries françaises représentent le second contingent le plus important après les exposants du cru. L’attachement consensuel des galeries hexagonales n’est pas anodin. Les marchands saluent volontiers l’esprit confraternel de leurs collègues belges. Beaucoup de professionnels européens s’avouent fâchés avec un art anglo-saxon trop fashion. D’autres aspirent à des coûts de transports raisonnables.

L’absence de barrière linguistique et la proximité géographique avec Bruxelles sont des avantages appréciables. « Bruxelles, c’est un peu l’annexe de Paris, comme Art Brussels est une foire jumelle de la Fiac », déclare le galeriste Jean Brolly qui y expose pour la première fois. Allez savoir qui de la Fiac ou d’Art Brussels ne savourera pas le parallèle… « C’est une bonne petite foire qui n’est pas pour autant au rabais. L’an dernier on a vendu une pièce de Keith Tyson au Smak, l’année d’avant c’était un Villeglé au palais des Beaux-Arts. Les gens s’habituent peu à peu à notre présence », affirme le galeriste Georges-Philippe Vallois qui présente un panachage de son écurie.

Mais l’irrésistible facteur d’aimantation vient des collectionneurs locaux. La Belgique compte une rare concentration d’amateurs au mètre carré. « En Belgique, nous avons une sensation d’air frais par rapport au regard des collectionneurs sur l’art. Les Belges ont une vraie culture, un vrai souci de l’artiste », insiste Christine Ollier, directrice de la galerie Les Filles du Calvaire. Fine mouche, elle a ouvert voilà deux ans et demi une antenne à Bruxelles. La Parisienne Nathalie Obadia estime que sur le salon « on peut ne pas vendre sur le coup, mais il existe une clientèle intéressante entre les Belges, les Français et les Français expatriés en Belgique. L’un dans l’autre, on se fait des contacts ». Elle avoue n’avoir rien vendu l’an dernier sur le stand. Mais trois mois plus tard, elle a concrétisé plusieurs transactions amorcées sur la foire. Déployant généralement des œuvres de grand format, elle prévoit dans son escarcelle des pièces de Carole Benzaken, Fiona Rae et naturellement Wim Delvoye, artiste belge choyé par les collectionneurs locaux. Christine Ollier précise que d’une année sur l’autre, les inégalités de résultats sont frappantes. « L’an dernier, j’ai fait mon plus gros chiffre d’affaires de l’année sur Art Brussels en vendant huit pièces de Karen Knorr alors que d’autres années, je ne vendais rien.

Le marché est petit et c’est à chaque fois l’aventure. » L’aspect aléatoire du négoce provoque
des participations parfois espacées. Chaque année connaît son lot d’éclipses et de retours.
Certaines grosses pointures, comme l’Américaine Barbara Gladstone, s’y hasardent pour la première fois cette année. C’est aussi le cas de la galerie Lelong qui vient « à titre d’essai ». Une solution de rechange sans doute pour cette grande enseigne parisienne qui, comme nombre de ses confrères français, est déçu d’Art Cologne. « La Belgique est un marché actif. Ça ne vaut pas le voyage pour montrer Tàpies, Miró ou Alechinsky, mais pour des choses moins chères, moins établies », explique Jean Frémon, codirecteur de la galerie. Le programme d’accrochage rendra compte des dernières expositions en galerie avec un florilège de pièces de Jaume Plensa et Kate Shepherd. Nouvelle recrue, la galerie new-yorkaise D’Amélio-Terras a préféré Bruxelles à la Fiac pour sa seconde incursion européenne. « On a envoyé notre candidature à la foire londonienne Frieze, qui se déroule en même temps que la Fiac. D’ailleurs, lorsque nous avions fait la Fiac voilà deux ans, nous avions
vendu essentiellement à des collectionneurs belges plutôt qu’à des Français. Autant aller les voir directement », explique Lucien Terras, codirecteur de la galerie.
Son petit stand s’organise opportunément autour de Tony Feher, un artiste exposé à la Serpentine Gallery et déjà introduit dans les collections belges.

Art Brussels est sans doute une petite foire qui, sans payer de mine, garde la barre. Elle a tout à gagner du délitement des grandes manifestations. Mais, comme le souligne très justement la galeriste belge Catherine Bastide, elle reste encore très régionale. En 2004, le nombre de galeries étrangères est sensiblement inférieur à l’an dernier. Pour jouer dans la cour des grands, Art Brussels devra s’inspirer de l’esprit festif et « événementiel » de la Madrilène Arco et de la Britannique Frieze.

Art Brussels, Brussels Expo, halls 3 et 4, place de Belgique, 1, tél. 32 (0)2 402 36 66, www.artbrussels.be, 1er-5 avril.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°557 du 1 avril 2004, avec le titre suivant : Art Brussels, une foire à taille humaine

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