Suisse - Foire & Salon

Art Basel prévisible et rassurante

Par Anne-Cécile Sanchez · lejournaldesarts.fr

Le 14 juin 2023 - 701 mots

BÂLE / SUISSE

La foire qui a ouvert ses portes hier est conforme, tant au niveau des artistes exposés que des ventes aux attentes.

Vue de l'édition 2023 d'Art Basel. Courtesy Art Basel
Vue de l'édition 2023 d'Art Basel.
Courtesy Art Basel

Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La formule de l’ancien président de la République est devenue un poncif de la prise de conscience climatique ; Jam proximus ardet, la dernière vidéo (2021), l’œuvre d’Adel Abdessemed projetée en ouverture du secteur Unlimited, en offre une variante maritime. Debout sur le pont d’un bateau en feu, l’artiste connu pour ses œuvres « coup de poing » accueille le visiteur d’Art Basel sur un écran géant. 

Le monde de l’art ne semble cependant pas en danger si l’on en croit les bons chiffres du marché en 2022, avec un montant global de 67,8 milliards, rappelait Christl Novakovic, présidente du directoire d’UBS Europe, partenaire de la foire. Art Basel, immuable d’une édition sur l’autre, entretient d’ailleurs une atmosphère apaisante. Une bulle au cœur de laquelle, cette année, des arbres ont été installés, formant au milieu de la cour intérieure une oasis, Treetopia, désignée par l’architecte paysagiste Enzo Enea pour faire passer un message écologique. 

D’une année sur l’autre, les valeurs sûres se renouvellent peu, seuls les approvisionnements varient en fonction des opportunités. On trouvera des tableaux et des dessins de Picasso, de Max Ernst, de Dubuffet, de Kees van Dongen, une sculpture d’Henry Moore, chez Landau Fine Art, qui ne vend que des « chefs-d’œuvre ». Un beau Paul Klee chez Di Donna (New York) s’est vendu entre trois et quatre millions de dollars. Et ici et là, des toiles de Baselitz, Cy Twombly, Soulages… Chez Tornabuoni, les Concetto Spaziale de Lucio Fontana (1965-1967), rutilants, semblent sortis de l’atelier. 

Il semble cependant que les artistes femmes, du moins les plus reconnues, ont davantage de place. Zwirner consacre une partie de son stand à la star Yayoi Kusama avec plusieurs séries de tableaux et une sculpture de son emblématique Pumpkin (2013). Louise Bourgeois est plus que jamais présente, avec une araignée spectaculaire épinglée au mur d’Hauser & Wirth, mais aussi une sculpture textile et des gouaches sur papier chez Xavier Hufkens, des bronzes chez Karsten Greve… Anne Imhof est mise en avant par Spruth Magers avec une moto placée sur le stand (My own private Idaho, 2022). Sadies Coles consacre son espace à l’œuvre délicate de Laura Owens. Thaddeus Ropac promeut inlassablement la peinture de Martha Jungwirth. Ce sont quelques exemples parmi d’autres. 

Quelques noms émergent parmi les artistes de la génération montante, comme celui d’Elias Sime, dont le mur de composants électroniques (Tightrope 4, 2009-2013) figure sur Unlimited et dont la galerie James Cohan a vendu plusieurs pièces. 

Comme dans les quartiers touristiques, il suffit parfois de faire quelques pas pour se retrouver à l’écart de la foule. L’impression de frénésie qui règne sur le stand de Gagosian, dont l’accrochage d’œuvres de très grands formats est surveillé par des gardiennes en uniforme Securitas, laisse la place à un sentiment de calme quand on quitte l’allée centrale pour la périphérie. Loin du cœur du réacteur, les visiteurs se font plus rares ce premier jour. 

Cela ne signifie pas forcément que les ventes sont moins bonnes. Balice Hertling, en troisième ligne au deuxième étage, avait ainsi vendu à des collectionneurs huit tableaux d’Owen Fu, une sculpture de Camille Blatrix et les deux peintures de Ser Serpas. « Pour nous, le premier jour de la foire est le dernier d’un dialogue continu et en profondeur que nous menons depuis des années avec des collectionneurs qui partagent les mêmes valeurs et des curateurs qui partagent notre vision de l’histoire de l’art moderne et contemporain  », rappelle Iwan Wirth, le président d’Hauser & Wirth où les ventes sont allées bon train. « Cette première journée a été excellente. Nous avons tout vendu sur le stand, ce qui n’avait pas été le cas les années précédentes. Je crois que dans cette période d’incertitude, les gens qui viennent à Art Basel ont besoin de se rassurer », estimait pour sa part Niklas Svennung chez Chantal Crousel. 

Enfin, parmi les rares changements que comporte cette édition bâloise, Kabinett, focus sur une présentation en solo d’un artiste sur moins d’une quinzaine de stands, offre quelques découvertes, notamment celle des xérocopies poétiques de Patti Hill (1921-2014) exhumées par Air de Paris. 
 

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