Une saison romaine

Du Palais Massimo au Palais Barberini

Le Journal des Arts

Le 28 août 1998 - 861 mots

L’ouverture complète du Palais Massimo, consacré à l’archéologie, et la restauration du Palais Barberini témoignent de l’intérêt dont bénéficient depuis quelque temps les musées italiens, après des années de négligence.

ROME (de nos correspondants) - Six mois seulement après l’inauguration du Palais Altemps, l’ouverture complète du Palais Massimo marque l’achèvement du second des trois pôles du Musée archéologique romain rénové. Créée en 1889, cette institution, l’une des plus importantes au monde dans le domaine de l’archéologie, rassemble toutes les pièces trouvées à Rome après 1870, au cours des travaux de transformation de la ville en capitale du Royaume, ainsi que les importantes collections acquises par l’État au fil du temps. Plus rien n’était visible depuis une vingtaine d’années, mais, avec le lancement en 1981 de la loi sur le patrimoine archéologique de Rome, l’agencement des musées a été totalement repensé et la ville en recueille aujourd’hui les fruits. Cette loi a permis l’étude scientifique et la restauration par lots successifs de toutes les pièces archéologiques, l’acquisition et la rénovation complète des palais Altemps et Massimo, et les interventions (en cours) aux Thermes de Dioclétien. Au Palais Massimo, trois ans après le rez-de-chaussée, les étages supérieurs et le sous-sol ont enfin ouvert. Cent vingt sculptures au premier étage, quelque soixante-dix mosaïques et deux importantes séries de peintures au second, des milliers de monnaies au sous-sol viennent s’ajouter à la centaine de pièces déjà présentées au rez-de-chaussée. Le parcours ordonne de façon chronologique non seulement la production artistique, mais aussi son usage et sa signification à Rome aux différentes époques, de l’agonie de la République au Bas Empire.

Un parcours cohérent
Le rez-de-chaussée illustre le tournant entre la fin de la République et l’avènement d’Auguste et de la dynastie julio-claudienne. Parallèlement aux conquêtes de régions et de populations lointaines, l’art perd son sens religieux primitif pour devenir un instrument de propagande au service de l’Empereur. L’iconographie romaine officielle – les bas-reliefs historiques, les portraits, les grands monuments publics – s’accorde aux nouvelles exigences “politiques” et finit par influencer également les commandes privées. Cette ligne d’analyse se poursuit au premier étage avec la période suivante, des Flaviens jusqu’à l’Antiquité tardive (IVe siècle). Un deuxième thème se développe en parallèle, qui éclaire le milieu culturel des villes impériales. L’engouement pour l’art grec et hellénistique explique le nombre toujours croissant de copies disséminées dans toutes les grandes villes et leurs faubourgs. L’installation regroupe autant que possible les collections de même origine, celle de la villa d’Hadrien à Tivoli et des villas de Néron à Antium et Subiaco, selon une distribution par thèmes et par sujets. Le deuxième étage poursuit dans le même esprit, en passant de la sculpture à la décoration en mosaïque ou picturale. Au sous-sol, sous la cour centrale, se trouve la collection de monnaies la plus grande et la plus intéressante d’Italie, ainsi que celle donnée par le roi Victor Emmanuel III.

La splendeur retrouvée du Palais Barberini
D’autres travaux importants viennent d’être achevés, notamment au Palais Barberini qui abrite la Galerie nationale d’art ancien. Sa renaissance avait débuté en décembre dernier avec la réouverture de onze salles à l’étage noble, où sont présentés les tableaux du XIIIe au XVIe siècle. Le bâtiment, pour lequel le cardinal Maffeo Barberini, futur Urbain VIII, s’était attaché les services des plus grands artistes du Baroque – Bernin, Borromini et Pierre de Cortone –, commence à retrouver sa splendeur originelle, comme en témoignent les secteurs de la Galerie ouverts cet été. Au-dessous du palais, le bloc horizontal de bâtiments abritant le cinéma et le fast-food sera temporairement masqué par une longue palissade, le propriétaire ayant présenté un projet de réhabilitation pour clore le contentieux avec la Surintendance.

La nouvelle entrée réintègre l’entrée principale de la rue Barberini et donne sur l’édifice qui abritait le théâtre de Pierre de Cortone (dont une partie avait été condamnée par le nouvel axe routier voulu par Mussolini). Sur la gauche du porche, une fresque romaine est en cours de restauration et, sur la droite, ont été installés les services annexes : billetterie, librairie... On passe ensuite par le somptueux escalier à jour carré du Bernin, qui a été littéralement “recousu” tant il était endommagé. Au deuxième étage, enfin, on peut visiter l’appartement du XVIIIe siècle de Cornelia Costanza, abondant en stucs, meubles, porcelaines précieuses, faïences et verres, qui était fermé depuis plusieurs années pour des raisons techniques. La visite se poursuit par le grand salon de réception, la bibliothèque du XIXe siècle et l’escalier hélicoïdal de Borromini. La restauration des décors de la bibliothèque du cardinal Francesco Barberini, frère d’Urbain VIII et bibliothécaire du Vatican, conseillé par l’érudit Cassiano dal Pozzo, constitue l’une des principales nouveautés, avec la présentation des cartons restaurés de Pierre de Cortone (la Vie de Constantin) et de Giovanni Francesco Romanelli (la Vie du Christ). Pour ce qui est de la sécurité des collections, la surintendante Lorenza Mochi Onori déclare : “Le directeur général, Mario Serio, a donné la priorité absolue à la mise au point du nouveau système de protection totale, constitué d’un réseau complet de caméras et d’enregistrements, et la protection “en rideau” de tous les tableaux : on n’ouvrira pas tant qu’il ne sera pas prêt.”

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°65 du 28 août 1998, avec le titre suivant : Une saison romaine

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