Le Musée de la chasse et de la nature s’étend

Par Jean-Michel Raingeard · Le Journal des Arts

Le 8 janvier 2008 - 683 mots

PARIS

Vingt-trois millions d’euros ont été investis dans un nouveau bâtiment et le projet muséographique financés sur les fonds propres de la Fondation éponyme. L’institution rouvrira le 6 février

PARIS - Consacré autant à la nature qu’à la chasse, le parcours muséographique de l’institution s’agrandit de l’hôtel de Mongelas – mitoyen de Guénégaud, l’ancienne implantation –, soit 1 500 m2 de plus pour cette institution privée créée en 1964 par François Sommer, un industriel des revêtements de sol passionné de chasse. Avec beaucoup de subtilité, l’architecte Antoine Vigne a réussi non seulement à caser les équipements indispensables à la sécurité, la conservation et la pédagogie (un auditorium de 115 places notamment), mais aussi à retrouver l’esprit d’un hôtel du Marais à partir d’un bâtiment dévasté et ce, sans céder au pastiche (cf. le grand escalier). De son côté, Claude d’Anthenaise, le conservateur, a conçu un nouveau programme scientifique et culturel pour une fois entièrement construit autour de « l’expérience de la visite » pour un flâneur en quête de culture, sensible à l’art mais aussi curieux du contexte et du sujet animal. Un parti pris délibéré, mais rare, d’une fréquentation de qualité plutôt que de quantité !

Voulu comme une sorte de « cabinet d’amateur », le musée n’est pas affaibli par son extension, au contraire la scénographie de Frédérique Paoletti et Catherine Rouland s’attache à préserver « l’esprit du lieu » en développant le nouveau programme. Avec ses riches collections et des prêts de grands musées (Louvre, Armées ou Sèvres), le parcours permet au visiteur d’apprécier des peintures (Rubens, Oudry, Chardin, de Dreux...), des sculptures, des armes et des trophées pour une défense et illustration de la chasse, certes, mais surtout du rapport de l’homme à l’animal à travers les âges dans un véritable scénario faisant appel à l’interactivité. Dans une ambiance « domestique » qui fait le charme de ce musée, alternent ainsi des salles à décors historicisés et des lieux d’études. Une ambiguïté Musée/Maison parfaitement maîtrisée. Comme le Musée Calvet à Avignon, le Musée de la chasse et de la nature est le phare d’un projet beaucoup plus ample, celui de la Fondation du même nom. Elle contribue à l’animation de Chambord, notamment par des prêts d’oeuvres au château et surtout elle gère le parc cynégétique de Bel-Val, dans les Ardennes, son « coeur » consacré aux grands animaux sauvages. Ainsi, se veutelle non seulement un outil de conservation mais d’éducation à la nature et à la faune.

Les vertus des fondations
C’est sur ses fonds propres que laFondation a pu « consacrer plus d’argent que Vinci n’en a investi pour la restauration de la Galerie des Glaces à Versailles », selon l’heureuse formule de Jacques- François de Chaunac-Lanzac, son directeur, réalisant le rêve des époux Sommer mis en oeuvre il y a déjà plus de 40 ans. Un investissement non soumis à la dictature du tourisme et de la fréquentation, une liberté qui n’est possible que supportée par la gestion dynamique d’un portefeuille d’actions. Mais Christian de Longevialle, son président, souligne que depuis 30 ans, le capital de la Fondation a doublé sans que le « pouvoir d’achat » de ses revenus consacrés au fonctionnement, aux collections et au mécénat ne subisse l’érosion monétaire ! Un type de gestion qui fait la force des fondations américaines.

La continuité dans l’action est une des qualités majeures des fondations, garantie par l’indépendance de conseils d’administration qui veillent au respect des volontés du fondateur, mais aussi souvent savent innover et développer ses voeux. L’obsession des biens de main morte ou de l’évasion fiscale (cf. le débat sur la fiducie) est bien mauvaise conseillère, la multiplication des tutelles ne garantit rien sinon l’immobilisme. L’État serait bien inspiré de promouvoir une philosophie nouvelle dans ce domaine, soutenir une gestion dynamique plutôt que l’obsession sécuritaire qui a conduit à la quasi-disparition des fondations du XIXe siècle. À un moment où l’État n’est plus capable d’assurer la pérennité d’une partie du patrimoine, il est bien mal venu de douter des fondations.

Musée de la Chasse, 60, rue des Archives, Paris 3e, tél. 01 53 01 92 40, www.chassenature.org

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°250 du 5 janvier 2007, avec le titre suivant : Le Musée de la chasse et de la nature s’étend

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