Art cinétique

Julio Le Parc éblouit

Par Alain Quemin · Le Journal des Arts

Le 13 mars 2013 - 710 mots

Le maître d’origine argentine adopté par la France offre une lumineuse exposition au Palais de Tokyo, en particulier dans les œuvres tridimensionnelles.

PARIS - Il en va des mouvements artistiques comme de tout phénomène soumis à la mode. En ce moment, l’art optique et cinétique effectue un retour en force sur la scène artistique, tout particulièrement à Paris. Figure majeure du courant, l’Argentin de naissance Julio Le Parc (1928), établi en France de longue date et résidant désormais à Cachan (Val-de-Marne), ne pouvait être oublié. Le Palais de Tokyo lui offre sa plus grande exposition à travers une sélection d’œuvres phares des années 1950 à nos jours.

Le travail de Le Parc est présenté simultanément dans l’historique galerie Denise René – grande prêtresse, disparue l’art dernier, de l’art optique – en son espace du Marais (jusqu’au 18 avril), mais aussi chez de plus jeunes galeries, Bugada & Cargnel (jusqu’au 13 avril) et Lélia Murdoch (jusqu’au 6 avril). Julio Le Parc figurera également en bonne place dans la prochaine exposition « Dynamo » consacrée à l’art optique et cinétique, qui se tiendra à Paris, au Grand Palais, du 10 avril au 22 juillet. Un véritable festival.

Si le parcours des expositions du Palais de Tokyo n’est pas toujours clair, celui de « Julio Le Parc » ne pose pas ce problème. La scénographie est très réussie, le visiteur se trouvant plongé, pendant une grande part de son cheminement, dans une semi-obscurité qui permet de donner toute leur puissance aux œuvres jouant sur la lumière. On regrettera toutefois que les cartels soient aussi peu fournis. Certes, toutes les œuvres proviennent de l’atelier de l’artiste, mais cela n’est jamais indiqué, pas plus, d’ailleurs, que les dimensions des œuvres. Dans un lieu qui insiste autant sur la médiation, il aurait été souhaitable que les cartels soient plus renseignés.

L’autre réserve tient fondamentalement au travail de l’artiste. Au vu des œuvres exposées, difficile de considérer Le Parc comme un très grand peintre. Les tableaux de la série des « Modulations » de 1980-1981, des « Alchimies » à partir de 1988, ou ceux des années 2000 relèvent d’une esthétique largement dépassée et, bien que récents parfois, paraissent plus datés que le reste de son œuvre. En revanche, les gouaches colorées de 1959 sont excellentes, tout comme l’ample Longue marche de 1974.

Dès que les œuvres accèdent à la troisième dimension, les réalisations de Julio Le Parc convainquent tout à fait. Un constat déjà vrai pour les tableaux incorporant à leur surface des bandes de métal qui se déforment sous l’action de mécanismes et qui ondulent. Dans ses travaux qui combinent action de la lumière, perception de mouvement, trouble visuel et engagement physique du spectateur, Le Parc fait montre d’une maîtrise magistrale. La recherche et l’innovation, un souci constant, ne se font jamais aux dépens de la dimension esthétique, laquelle devient proprement une expérience.

Perception rétinienne
L’exposition combine des réalisations techniquement très élaborées avec d’autres qui, en dépit d’une économie de moyens, produisent des effets visuels tout aussi saisissants, ainsi de celles composées de petites plaques de Plexiglas ou de métal reliées par de simples fils de nylon et qui reflètent la lumière. Si les dispositifs sont très divers, les préoccupations et la démarche restent les mêmes : c’est la perception rétinienne qui est toujours questionnée. D’où l’importance notamment des miroirs et du travail sur les surfaces réfléchissantes.

La troisième dimension de l’œuvre apparaît essentielle, surtout dans sa relation avec le spectateur, sans que l’on sache toujours déterminer si l’on est en présence de sculptures, d’installations ou d’environnements. La multiplicité des points de vue apparaît nécessaire pour apprécier, aux deux sens du terme, pleinement les œuvres. Parmi les plus belles pièces, certaines, récentes, ont été réalisées à l’aide de panneaux de tulle reflétant la lumière qui produisent une troublante impression de bruine. Si le début du parcours procède essentiellement du noir, blanc et argent, la couleur, rouge, éclate soudain, tout particulièrement dans une monumentale et somptueuse sphère composée de petites plaques de Plexiglas reliées par des fils transparents et les ombres portées dessinent de magnifiques effets de kaléidoscope. Chapeau, jeune homme !

Julio Le Parc

jusqu’au 12 mai, Palais de Tokyo, 13, av. du Président-Wilson, 75116 Paris, de midi à minuit, tous les jours sauf le mardi,www.palaisdetokyo.com

Légende photo

Affiche de la saison « Soleil Froid », avec l'exposition de Julio Le Parcc, au Palais de Tokyo du 27 février au 20 mai 2013 - source www.palaisdetokyo.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°387 du 15 mars 2013, avec le titre suivant : Julio Le Parc éblouit

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