Art ancien

XVIIIE SIÈCLE

La sculpture lorraine au XVIIIe siècle

Par Lorraine Lebrun · Le Journal des Arts

Le 29 octobre 2021 - 674 mots

Le château de Lunéville et le Musée des beaux-arts de Nancy programment deux expositions de qualité mettant à l’honneur l’histoire et le patrimoine lorrains.

Lunéville et Nancy. Berceau de grands sculpteurs, la Lorraine célèbre la sculpture du XVIIIe siècle par deux expositions complémentaires, présentées conjointement au Musée des beaux-arts de Nancy et au château de Lunéville. Mais elles sont aussi le prétexte à redécouvrir les lieux par le prisme de cet art.

À Lunéville, « La sculpture en son château. Variations sur un art majeur » est avant tout une invitation à redécouvrir le château, où certains des meilleurs architectes et sculpteurs de leur époque œuvraient au service du duc Léopold (1698-1729), de son fils François III (1729-1737), puis de Stanislas Leszczynski (1737-1766). Longtemps inaccessible après l’incendie de 2003, une grande partie du château reste encore fermée au public, mais de récents travaux ont permis la réouverture d’une vaste salle qui accueille une partie de l’exposition.

Le parcours dense de Lunéville

Cette exposition est donc la première d’envergure à s’y tenir et l’exigence du propos, érudit, révèle toute l’ambition qui est portée pour l’occasion. Le parcours se conforme à son titre de « Variations », cherchant à explorer tous les pans de cet art et ses aspects. Le portrait de souverain comme support de propagande politique ouvre ce cheminement qui conduit à un focus sur Germain Boffrand (1667-1754) et François Dumont (1687-1726) dont le Louvre prête le morceau de réception à l’Académie. L’architecte et le sculpteur travaillèrent au chantier du château – les mascarons sculptés de Dumont sont encore visibles dans la cour.

Les décors de boiseries des résidences royales, du mobilier et notamment de ce miroir de toilette en bronze de la duchesse Élisabeth-Charlotte illustrent aussi comment cet art de l’ornement s’immisçait dans le cadre de vie. Explorant également les différents styles, l’influence de la rocaille est portée par ses représentants Emmanuel Héré (1705-1763) et Barthélemy Guibal (1699-1757), qui travaillèrent au service du duc Stanislas Leszczynski.

Après un détour par la somptueuse chapelle du château, la seconde section de l’exposition, en sous-sol, expose la sculpture de jardin et des fontaines, ainsi que la céramique – le duc ayant en effet une manufacture de céramique à Lunéville, réputée pour sa riche polychromie.

L’ensemble donne un parcours éclectique, parfois dense. Bronze, marbre ou émail, ronde-bosse ou relief, grande sculpture et objets précieux, du plus classique au plus rocaille, le tout brosse à large trait les contours de cet art sans se limiter à la seule ronde-bosse.

La famille Adam

Le parti pris est tout autre au Musée des beaux-arts de Nancy. Au parcours thématique et fourmillant de Lunéville s’oppose la première rétrospective monographique consacrée aux Adam. Cette famille de sculpteurs prodiges, originaires de Nancy, œuvra tout au long du XVIIIe siècle. Principalement constituée de sculptures en ronde-bosse ou relief, en marbre ou en céramique, l’exposition est ici chronologique, riche de cent douze œuvres, qui permet de suivre chacun des membres de cette illustre famille. À commencer par le fondateur de la dynastie, Jacob Sigisbert Adam (1670-1747), qui pose encore la question du portrait de souverain, avec cette figure en terre cuite sans concession présentant un Stanislas à la mâchoire prognathe.

Ses fils, tous passés par Rome, réalisent quelques morceaux de virtuosité remarquables. Notamment, les bustes de Neptune et Amphitrite de Lambert Sigisbert Adam (1700-1759), prêté par le château de Postdam ou encore les bustes allégoriques des Quatre Éléments. Mais alors qu’ils menaient un brillant début de carrière, ce style fougueux et virtuose est passé de mode.

Dernier membre de cette illustre famille, Claude Michel dit Clodion (1738-1814) est, quant à lui, le représentant d’une veine tout aussi virtuose, mais plus légère et agréable. Un cheminement qui montre aussi l’évolution d’une époque et de son goût.

Les deux expositions ont également été pensées comme partie intégrante de leur ville respective, avec l’édition concomitante d’un livret de promenade urbaine permettant de compléter la visite, à Nancy comme à Lunéville, et d’offrir une immersion dans cet art de la sculpture au service du pouvoir ducal tout au long du XVIIIe siècle.

 

La sculpture en son château. Variations sur un art majeur,
jusqu’au 9 janvier 2022, Château de Lunéville, 54300 Lunéville ;
La sculpture en héritage. Les Adam, une dynastie lorraine,
jusqu’au 10 janvier 2022, Musée des beaux-arts, 3, place Stanislas, 54000 Nancy.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°576 du 29 octobre 2021, avec le titre suivant : La sculpture lorraine au XVIIIe siècle

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque