Une nouvelle scène de galeries

Des quartiers de galeries d’art contemporain se sont créés rue Burdeau et quai Rambaud - Aux enseignes déjà établies se sont ajoutés jeunes marchands et structures associatives

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 29 septembre 2009 - 830 mots

La capitale des Gaules a longtemps conservé sur le plan culturel l’image d’une ville à l’étuvée, tout droit sortie d’un livre de Simenon ou d’un film de Chabrol.

Sans connaître de révolution sidérale, les choses ont évolué depuis l’implantation du Musée d’art contemporain en 1995, dans la foulée du transfert en 1991 de la Biennale de Paris vers Lyon. Malgré l’appui de ces structures, les galeries locales ont eu fort à faire pour ouvrir à l’art actuel des Lyonnais encore pétris d’antiquités, plutôt portés sur la pierre et souvent réputés économes. Percer le tissu de notables discrets ne fut pas non plus une mince affaire. « Les Lyonnais sont collectionneurs, mais secrets, observe Jacques Damez, codirecteur de la galerie de photographie Le Réverbère. Dans l’exposition "Passions privées", organisée en 1995 au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, deux collections lyonnaises étaient montrées. On voit ici des collections que peu de Parisiens pourraient avoir, avec un Soulages à côté d’une installation de Kader Attia. Mais ce collectionneur-là, 80 % des galeries lyonnaises ne le connaissent pas. » Les marchands ont donc dû s’armer de patience. Pionnière avec trente ans d’existence, Le Réverbère compte aujourd’hui une clientèle à 60 % lyonnaise, alors qu’à ses débuts elle vendait principalement à l’extérieur de la commune. La pédagogie fait ses preuves puisque près de 80 % de ses clients y ont acheté leurs premiers clichés. « On a créé des collectionneurs, mais il faut remettre sans arrêt le métier sur l’enclume », remarque un autre vétéran, le galeriste Georges Verney-Carron. Si les grands soyeux ignorent encore l’art contemporain, industriels et professions médicales forment le gros de la clientèle locale. « Il existe depuis une dizaine d’années une nouvelle génération de collectionneurs qui n’est pas d’origine lyonnaise et qui a bousculé les habitudes. Certains viennent du dehors et ont choisi Lyon pour sa qualité de vie, et sa géographie, avec un accès à la montagne et à la mer », précise Catherine Dérioz, codirectrice du Réverbère. Son confrère Olivier Houg constate même le développement de petits groupes d’amateurs menés par cinq ou six prescripteurs. S’il est désormais moins difficile de séduire l’audience locale, il est aussi moins ardu de convaincre les artistes d’exposer à Lyon, ce d’autant plus qu’une petite scène artistique commence à bourgeonner rue Burdeau.

Une énergie et une synergie
Il y a vingt ans, Le Réverbère s’est installée dans cette rue nichée sur les pentes de la Croix-Rousse, dans un quartier alors sensible et encore couvert de graffitis. La galerie a fait des émules au point qu’une dizaine d’enseignes y ont depuis ouvert leurs portes, rejointe par des lieux associatifs comme La Salle de bains et Le Stand. Mais dans le lot, quelques galeries sont dignes de la place des Vosges… Restent des exceptions, comme Caroline Vachet. Ancienne collaboratrice de la curatrice Susanne van Hagen, celle-ci, à choisir entre Paris et Lyon, n’a pas hésité longtemps. « Ici, il y a une énergie et une synergie aussi. En un an, j’ai eu une quarantaine de clients, dont 70 % résident à Lyon, indique cette jeune battante qui a ouvert boutique en 2008. À Paris, il y a beaucoup de galeries et il est difficile de trouver sa place. » Un sentiment que connaît bien Georges Verney-Carron. Alors qu’il a disposé pendant cinq ans d’une antenne dans la capitale, ce dernier préfère de loin son assise lyonnaise implantée voilà une vingtaine d’années. « Paris, c’est mondain. Ici, je peux faire ce que je veux sans être ennuyé, précise-t-il. À Paris, pour prendre une décision, il faut cinquante personnes alors qu’ici quatre ou cinq suffisent. » Pour José Martinez, qui a ouvert une galerie en 2000 avec son associé Bruno Forges, il est évidemment moins onéreux d’animer une galerie à Lyon qu’à Paris. « Mais les gros collectionneurs préfèrent acheter à Paris. C’est parfois très frustrant alors que nous proposons les mêmes pièces », soupire-t-il. Celui-ci regrette ainsi que le collectionneur lyonnais de Pierre Buraglio préfère se fournir à Paris. Tel est souvent l’écueil pour les galeries-relais des enseignes parisiennes… Si le gros du contingent s’est installé rue Burdeau, Georges Verney-Carron et Olivier Houg ont misé depuis deux ans sur le quai Rambaud, dans le quartier en construction de La Confluence. Un périmètre très difficile d’accès, et à la signalétique sommaire. « Jusqu’à présent, les gens ne venaient pas, mais depuis trois mois, cela change, les travaux sont en phase finale. Il est aussi possible que le Musée d’art contemporain délocalise une partie de ses événements à la Sucrière », précise Olivier Houg. Après avoir forgé une audience locale, tout le pari des galeries sera de convaincre les collectionneurs nationaux et étrangers de se rendre à Lyon en dehors du vernissage de la Biennale. Une autre paire de manches.

GALERIES 
Le Réverbère, 38, rue Burdeau, 69001 Lyon, www.galerielereverbere.com
Caroline Vachet, 23, rue Burdeau, wwwgaleriecarolinevachet.com
José Martinez, 28, rue Burdeau, wwwgaleriejmartinez.fr
Georges Verney-Carron, 45, quai Rambaud, 69002 Lyon, www.galerie-verney-carron.com
Olivier houg, 45, quai Rambaud, wwwolivierhoug.com

Lieux associatifs
La Salle de bains, 27, rue Burdeau, 69001 Lyon, wwwlasalledebains.net
Le Stand, 19, rue Burdeau, 69001 Lyon, www.le-stand.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°310 du 2 octobre 2009, avec le titre suivant : Une nouvelle scène de galeries

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