Art Basel maintient le cap

Par Frédéric Bonnet · lejournaldesarts.fr

Le 14 juin 2013 - 921 mots

BÂLE [14.06.13] - Avec une très belle qualité générale et des prix à tous les niveaux la foire suisse connaît des débuts prometteurs dans une ambiance optimiste. « Liste » et « Unlimited » s’avèrent moins excitants.

Demandez à des marchands comment se porte le commerce sur Art Basel, dont la 44e édition se tient jusqu’au 16 juin ? Ils vous répondront assez invariablement que tout se passe bien et que les achats se font assez tranquillement.

Il y a moins d’effets de foule et plus d’amateurs qui se répartissent autant dans les allées que sur la durée. Des transactions qui parfois prennent un peu de temps pour se conclure mais rien de déraisonnable ni d’excessif. Les participants, affichaient au soir du 11 juin, au terme d’une première journée d’inauguration réservée aux porteurs de cartes vip, une mine satisfaite.

« Nous avons vu passer beaucoup de monde, rencontré beaucoup de clients, tous les collectionneurs qui comptent sont là, les gens prennent un peu de temps pour réfléchir mais pas trop, c’est un bon début », relatait ainsi Cécile Barrault sur le stand de Nelson-Freeman (Paris) / Peter Freeman, Inc. (New York), qui exposait notamment une belle peinture de Matt Mullican (très présent sur le salon en raison de sa présence à la Biennale de Venise et d’une immanquable peinture monumentale en ouverture de la section « Unlimited »), une belle installation de Robert Filliou ou encore Christian Marclay.

Au terme de cette première journée, c’est donc un bel optimisme qui règne sur les stands, la semaine étant loin d’être terminée. À peu près toutes les catégories d’œuvres semblent trouver leur public, d’autant que les effets de seuils sur les prix, parfois très marqués sur certains salons, semblent ici inexistants. Même les gros prix ne font ici pas peur dans une période toujours dominée par l’instabilité économique. Thaddaeus Ropac (Paris, Salzburg) s’est ainsi défait d’un remarquable tableau de James Rosenquist en quatre panneaux de 1977 pour un prix annoncé à 2 millions de dollars.

Le rez-de-chaussée de la foire n’est d’ailleurs pas avare en œuvres poids lourds, de très bonne qualité. Ici des Bacon (Marlborough, Londres), Dominique Lévy (New York), là des Rothko (un chez Pace, New York et deux chez Helly Nahmad, New York), qui a réuni également sept Concetto spaziale blancs de Lucio Fontana dans un cabinet séparé, ou encore la divine surprise d’une huile sur toile d’Oskar Schlemmer figurant deux visages féminins dans une composition dynamique et audacieuse (Dream Encounter, 1928) proposée par Richard Nagy (Londres). Dans leurs accrochages, les galeries ont mis les petits plats dans les grands, sans emphase excessive mais en mêlant à la rigueur une très belle qualité des œuvres. C’est toujours bien pour Art Basel, à Bâle, que sont conservées les meilleures pièces.

Au premier étage, c’est incontestablement Gavin Brown’s Enterprise (New York) qui remporte la palme du plus beau stand, remarquablement conçu et unifié par une moquette en carreaux de couleurs pensée par Martin Creed donnant une unité au tout ; on y retrouve également une formidable suite de 145 panneaux figurant des pandas tout en paillettes de Rob Pruitt ou un beau tableau de Laura Owens orné de roues de bicyclettes.

L’accrochage de Jan Mot (Bruxelles) a belle allure également qui mêle David Lamelas et Ian Wilson tout en faisant redécouvrir le travail de Philippe Thomas. Chez Bortolami (New York) le sol est signé Daniel Buren, tandis que Thomas Dane (Londres) a de nouveau réussi un très bel accrochage portant pour beaucoup sur la figure et la mémoire, avec des pièces de Michel François, Akram Zaatari, Jean-Luc Moulène ou Steve McQueen.

La très belle tenue du salon est parvenue à presque faire oublier les déceptions du début de la semaine, avec lundi l’inauguration d’une édition de Liste, la principale foire off, particulièrement médiocre, n’était-ce la belle présence de Meris Angioletti chez Schleicher/Lange (Berlin), ou les territoires poétiquement explorés par Regina de Miguel chez Maisterravalbuena (Madrid).

Quelques heures plus tard, le dévoilement d’une version agrandie de « Unlimited » n’était pas des plus palpitant, avec d’entrée une interprétation ratée d’un Bicho monumental de Lygia Clark. Alison Jacques (Londres) semble s’être fourvoyée dans la réalisation de cette sculpture toujours restée à l’état de projet (sans doute pas sans raison). La réalisation ici, en plus d’être laide à regarder (massive, épaisse, à l’opposée de la sensualité de la sculpture de Clark) semble être un non sens puisque nécessitant deux énormes chaines afin d’être arrimée en hauteur, ce qui interdit donc son installation en extérieur et la condamne, si tant est qu’elle trouve preneur, à rester dans un hangar !

Des 79 propositions exposées là, le dernier film de Pierre Huyghe (Marian Goodman, New York ; Esther Schipper, Berlin) s’imposait haut la main avec son univers clos et étrange. Avec une installation laissant de l’eau en provenance de la morgue s’écouler et s’évaporer sur des plaques de métal chaude, Teresa Margolles (Peter Kilchmann, Zürich) évoquait avec Plancha (2010) la disparition de manière touchante. Tandis que l’Atelier Van Lieshout invite avec son Hagioscop à repenser nos modes de vie avec un habitat à l’apparence troglodyte à l’intérieur, où sont distribuées toutes les fonctions nécessaires (Krinzinger, Vienne ; Grimm, Amsterdam ; Jousse Entreprise, Paris), Marc Camille Chaimowicz (Cabinet, Londres) redonnait vie à une installation de 1972, Enough Tiranny, où le faible éclairage, les fontaines en action et les divers objets abandonnés là plongeaient le visiteur dans une certaine mélancolie, loin de l’agitation ambiante.

Légende photo

Gavin Brown's enterprise, Art Basel 2013, MCH Messe Schweiz (Basel) - source Art Basel

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