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Le Musée de la préhistoire finistérienne à l’agonie

Par Sindbad Hammache · Le Journal des Arts

Le 20 mai 2021 - 629 mots

PENMARC’H

Bientôt centenaire, le musée de Penmarc’h, fermé depuis plus d’un an, se trouve sans perspectives claires pour l’avenir.

Musée de la préhistoire finistérienne à Penmarc'h. © Moreau.henri, 2016, CC BY-SA 4.0
Musée de la préhistoire finistérienne à Penmarc'h.
© Moreau Henri, 2016

Penmarc’h (Finistère). La mise en caisse d’une collection n’est jamais bon signe : c’est le sort qu’ont connu les quelque 3 000 objets archéologiques exposés et conservés jusqu’alors au Musée de la préhistoire finistérienne de Penmarc’h, remisés au centre départemental d’archéologie. « Quand on met des objets en caisse, on ne sait jamais quand ils vont ressortir », prévient Hervé Lelièvre, ancien responsable des collections paléontologiques du Muséum d’histoire naturelle à Paris, résidant à Penmarc’h. Fermé depuis janvier 2020, officiellement pour des raisons sanitaires liées au bâtiment, le musée ne semble pas prêt à rouvrir ses portes.

En 2019, la Communauté de communes du Pays Bigouden Sud (CCPBS) avait pourtant affecté une enveloppe de 2,7 millions d’euros au Musée de la préhistoire : valorisant le bâtiment et ses collections, ce plan prévoyait la création de quatre emplois pérennes. À l’issue des élections municipales de 2020, la présidence de l’intercommunalité change, et ce budget programmé dans le plan d’investissement 2020-2023 disparaît. « Les communes doivent d’abord financer, la CCPBS vient ensuite », s’est justifié Stéphane Le Doaré, son nouveau président et maire de Pont-l’Abbé, dans les colonnes du quotidien régional Le Télégramme.

Une charge trop lourde pour la commune seule

L’abandon du projet place la commune de Penmarc’h (5 000 habitants) dans l’incapacité d’assurer le maintien de l’activité de cet équipement culturel. « La Mairie se retrouve avec ça sur les bras, déplore Gilles Bernard, adjoint au maire chargé de la culture. Assumer 200 000 euros par an de fonctionnement, financièrement on ne peut pas. »

L’université Rennes-I, propriétaire des collections, continue d’assister la municipalité dans leur récolement. Hervé Lelièvre a quant à lui proposé son aide en voisin : le retraité du Muséum dépouille les archives locales pour retracer l’histoire du musée.

Fondé en 1923, le petit musée expose les découvertes locales d’une société savante, constituée de jeunes érudits venus de la capitale. Après guerre, il passe sous le giron de l’université rennaise, et reste dirigé pendant quarante ans par le préhistorien Pierre-Roland Giot. Sa collection réunit des pièces exceptionnelles : des haches polies, des objets protohistoriques en bronze et un intrigant ensemble de crânes trépanés du haut Moyen Âge, découvert dans une nécropole voisine.

En 2013, Rennes-I cesse de financer le fonctionnement du musée, qui jouit pourtant d’une réputation scientifique ; une décision le menaçant une première fois de fermeture. Il est sauvé en passant sous gestion de l’intercommunalité. Si cette première sommation avait mobilisé en son temps un comité de soutien dont l’activisme porta ses fruits, la fermeture de 2020 s’est faite à bas bruit : « Je trouve sévère la décision de fermer pour cause de sécurité, estime Hervé Lelièvre. Quand on décide de fermer un musée, on ne le décide pas brusquement comme ça. » Sans bénéficier d’aucune publicité, le petit musée recevait en moyenne 6 000 visiteurs par an.

Malgré son manque de moyens, la municipalité réfléchit à la destination d’un édifice dont la fermeture s’éternise. L’idée est de créer un espace mixte, mêlant l’histoire préhistorique à la création contemporaine des nombreux artistes installés à Penmarc’h. « Tout est envisageable, commente l’adjoint à la culture, mais la solution de revenir à l’identique me semble compliquée. »

Hervé Lelièvre défend de son côté un retour des objets préhistoriques dans leur musée et une relance du projet à 2,7 millions d’euros. « Avec Carnac, c’est le seul musée consacré à la préhistoire en Bretagne », rappelle-t-il. Le Musée préhistorique a quelques arguments à faire valoir : la grande qualité de ses collections, et son emplacement touristique idéal au bord de l’anse de Pors Carn. Reste à trouver le financement. « Pas insurmontable », assure Hervé Lelièvre, qui irait bien toquer à la porte de Vincent Bolloré ou de Michel-Édouard Leclerc, deux Finistériens fortunés.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°567 du 14 mai 2021, avec le titre suivant : Le Musée de la préhistoire finistérienne à l’agonie

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