Paris Photo 2013 presque au firmament

Par Christine Coste · lejournaldesarts.fr

Le 14 novembre 2013 - 1300 mots

PARIS [14.11.13] - Paris Photo déploie sous la verrière du Grand Palais sa sélection de galeries françaises et internationales qui rivalisent en propositions, en scénographies léchées et en solo shows radicaux dans leur choix. Si la scène américaine domine cette édition, les galeries françaises déploient une offre extrêmement variée.

Officiellement, le mercredi 13 novembre fut la journée réservée aux professionnels, collectionneurs, guest et vip en tout genre, invités à découvrir en avant-première, et avant l’ouverture au public, les différentes propositions des galeries sélectionnées pour l’édition 2013 de Paris Photo. En réalité, il n’en fut pas tout à fait ainsi puisque la veille, la banque J.P. Morgan, partenaire officiel du salon, avait réservé la primeur à ses invités lors d’une soirée privée.

Loin des litiges et des scandales qui la secouent, la banque américaine a reçu un parterre de financiers, personnalités et « people » que l’an dernier elle n’avait pas autant mobilisé et qui ont fait leurs achats ou du moins ont pris des options. Renos Xippas ne cachait pas sa satisfaction d’avoir vendu Paris Postcard de l’artiste brésilien Vik Munos (38 000 euros), ni la galerie Obadia satisfaite de la vente d’une photo de Andres Serrano de la série inédite sur Cuba (28 000 euros) et d’un jeu de la série Last Dance de Youssef Nabil montrée jusqu’à présent uniquement à la foire de Dubaï et vendue entre 55 000 et 65 000 euros selon l’édition (de trois).

Tout aussi satisfaites étaient les galeries Dupont et M B (Los Angeles) qui disaient avoir couvert les frais de location du stand si les ventes étaient confirmées. Certaines galeristes confiaient toutefois leur mécontentement face à cette preview qui les plaçait en porte à faux vis-à-vis de leurs collectionneurs habituels et tendait à créer un autre niveau d’invités qui se voyaient placer au-dessus des « guest » et des « vip ».

Dominante new-yorkaise dans l’emplacement Premium
Quoi qu’il en soit, mercredi matin les allées de Paris Photo étaient traversées par de forts accents américains en particulier dans les stands de l’emplacement dit « Premium » dominé encore plus que l’an dernier par les grandes galeries américaines, new-yorkaises en particulier. Telles Pace McGill, Howard Greenberg, Fraenkel, Bruce Silverstein, Edwinn Houk, David Zwirner pour ne citer qu’eux, les galeries allemandes Thomas Zander et Daniel Blau faisant face à Gagosian et la galerie française Karsten Greve à la galerie new-yorkaise Cheim & Read, nouvel entrant dans la foire avec 303 et Metro Pictures.

La lecture de la cartographie de ce bout de territoire pourrait certes aussi relever la présence des galerie parisiennes (Nathalie Obadia et Toluca) comme celle des nouvelles galeries ayant intégré Paris Photo comme Angels Barcelona, Klemm’s (Berlin), Rolf Art (Buenos Aires), Susanne Zander (Cologne)ou Michael Werner (Cologne).

Elle pourrait avoir également remarqué l’absence de la galerie Thaddaeus Ropac annoncée pourtant cet été parmi les nouveaux venus de poids avec un solo show de Robert Mappelthorpe placé sous le commissariat d’Isabelle Huppert. Le galeriste a finalement préféré reporter sa participation à l’édition 2014 afin de se positionner après et non avant l’exposition Mappelthorpe programmée au Grand Palais à partir de mars prochain

Des solo shows plus nombreux que d’habitude
Il reste que les solo shows de grande qualité ne manquent pas cette année. Citons le premier du genre chez l’Italien Guido Costa avec un auteur peu connu du marché, Paul Thorel, mais à la tapisserie tirée d’une photo digitale, et première du genre à Paris Photo, déjà fort remarquée. Radicalité tout aussi prégnante dans le choix de Marc Trivier par son galeriste Bernard Boucher. Tout aussi marquants sont les focus de Josef Hoflehner (Nikolaus Ruzicka), Jeff Cowen (Michael Werner), Horst Ademeit (Suzanne Zander) ou Stephan Crasneanscki (Ilan Engel) ou encore la mini rétrospective Joan Fontcuberta (Angels Barcelona) contrastant avec les ors de Robert Polidari (Karsten Greve).

Des choix audacieux qui ne sont pas sans risque et que partagent d’autres galeries dans leur parti pris ancré dans la jeune scène contemporaine et ses auteurs émergeants. Comme Bertrand Grimont qui, fort de son succès l’an dernier auprès des collectionneurs, poursuit son travail de promotion des œuvres d’Olivier Metzger, Arlette Kotchounian, Gilles Berquet, Patrick Bernatchez et Thomas Manneke qui interrogent notre rapport au réel.

Ailleurs ce qui frappe, comme d’habitude, trouve sa résonance dans la programmation des institutions parisiennes ou internationales. À la Rose Gallery, les clichés de Mark Cohen (exposés au Bal) jouxtent presque ceux de William Eggleston (actuellement au Jeu de Paume), mais ne se placent pas (encore) dans la même catégorie de prix (5 950 euros pour un cliché de Mark Cohen, entre 47 000 et 203 500 euros pour Eggleston). William Eggleston qui cette année est représenté par six galeristes (Cheim & Read (NY) Danziger (NY), Gagosian, Jörg Maass (Berlin), Stephen Daiter (Chicago), Thomas Zander. Un Eggleston, grand maître de la couleur battu néanmoins en représentation, mais pas en prix par les noir et blanc de Brassaï (actuellement exposé à l’Hôtel de Ville de Paris) et surtout ceux de Kertész et de Walker Evans présents dans pas moins de quinze galeries. Chez Vu, c’est un émouvant portrait d’Anders Petersen jeune (actuellement à la BnF) qui attire le regard, ce tirage unique (10 000 euros) est issu de l’exposition que fit en 1978 le mythique photographe suédois au café Lehmitz. Vivian Maier (au fascinant parcours raconté au Jeu de Paume à Tours) trouve cette année à la galerie Steven Kasher une résonance particulière. Avec toutefois des prix (2 200 euros par exemple pour un autoportrait) bien encore en deçà de ceux de Diane Arbus (39 000 euros).

Les oeuvres des photographes et artistes argentins aux propos politiques engagés (galerie Rolf Art) comme les pièces rares présentées par la galerie mexicaines Graphika La Estampa sont de leurs côtés des prémices de celles que l’on découvrira à partir du 19 novembre dans « America Latina 1960-2013 » de la Fondation Cartier.

Exposés enfin au Grand Palais, les clichés couleur de Depardon chez Magnum affichent des prix de 2 150 euros pour les petits formats à 10 000 euros et plus pour les grands formats de la dernière série produite par le photographe. Chez Polka ce sont les clichés de La Main de l’Homme de Salgado et non de sa dernière série Genesis qui sont mis en avant (47 000 euros pour un grand format de la série Koweit).

Des pièces rares à la pelle
Si la photographie américaine domine particulièrement cette édition, celle des années 1950 à 1970 notamment, toutes les périodes sont néanmoins représentées comme tous les genres et toutes les zones géographiques de l’Europe à l’Afrique, l’Asie et l’Amérique du Sud qui fait une entrée remarquée par la qualité de ses galeries.

De leur côté, les pièces à petits prix (entre 600 et 2 000 euros) sont aussi importantes que les pièces qui additionnent les zéros dominées dans cette catégorie par le Konditormeister (1928) d’Auguste Sander proposé à un million d’euros (Feroz) et le sublime portrait de Lee Miller par Man Ray accroché chez Edwynn Houk Gallery et « offert » à 850 000 dollars.

Bien plus discrets en prix mais remarqués tout autant Le mauvais garçon de Brassaï (Gitterman gallery), les trois clichés verre du tigre à l’arrêt d’Eugène Delacroix (Galerie Françoise Paviot, 23 000 euros les trois), le mythique portrait de Jean Moulin pris en 1939 par Marcel Bernard (galerie Lumière des Roses (30 000 euros) ou les contacts de The Americans de Robert Frank et l’ensemble des Sites of technologie de Lewis Baltz (Thomas Zander).

Aux galeries de constater maintenant, et durant ces quatre jours, si collectionneurs et amateurs suivent leurs choix. Enjeu premier d’une foire.

Informations pratiques Paris Photo

Du 14 au 17 novembre 2013, Grand Palais, avenue Winston-Churchill, 75008 Paris, www.parisphoto.com

Horaires : 14-16 novembre 12h30-20h, 17 novembre 12h30-19h

Plein tarif : 28 € - Tarif réduit : 14 €

Légende photo

Des oeuvres de William Eggleston à la galerie Cheim & Read - Paris Photo 2013 - © photo Ludosane

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