Correspondance

Lettres à un ami

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 24 juin 2005 - 482 mots

Les éditions Honoré Champion publient l’intégralité des échanges épistolaires entre Ingres et son ami d’enfance Jean-François Gilibert.

« Cette idée de revoir mon pays, et surtout de t’y revoir, mon brave et digne ami, le seul que je puisse
véritablement croire de ce nom, me met hors de moi de plaisir et d’espoir, de penser/peut-être que/notre réunion sera pour toujours, j’ai besoin de toi pour vivre heureux », déclarait Ingres à son camarade d’enfance Jean-François Gilibert, dans une lettre datant de 1821. La correspondance du peintre avec l’avocat Jean-François Gilibert, puis avec sa fille Pauline (qui deviendra Mme Montet-Noganets) s’étend sur plus de quarante années, de 1818 à 1862. Publiées d’abord en 1909, dans un ouvrage truffé de corrections, réécritures et erreurs, les lettres sont enfin éditées intégralement d’après les manuscrits originaux. L’ensemble est présenté et annoté par Daniel Ternois – ancien conservateur du Musée Ingres à Montauban, auteur de plusieurs ouvrages sur le peintre et professeur d’histoire de l’art – et son épouse, Marie-Jeanne, qui a étudié les relations de l’artiste avec sa ville natale, Montauban. « Nous avons voulu faire de cette source fondamentale un instrument de travail. Les aspérités des lettres d’Ingres les rendront peut-être moins agréables à lire que dans la version arrangée de Boyer d’Agen [celle de 1909], mais les textes seront plus proches de ceux qu’il a réellement écrits et plus révélateurs de sa “culture” », précisent les auteurs. La lecture des documents est facilitée par une introduction détaillée, un « Avertissement » précisant les principes de l’appareil critique et un descriptif du fonds épistolaire.

Musée montalbanais dédié au peintre
Dans cette correspondance riche en confidences, Ingres parle en détail de son travail et de ses œuvres, Virgile lisant l’Énéide, L’Âge d’or, La Grande Odalisque, Vénus anadyomène… Sans oublier ses portraits de la haute société, dont les modèles devinrent souvent des amis. Il évoque aussi les villes où il vécut, Paris, Rome, Florence et, bien sûr, Montauban. Il dépeint la société provinciale du XIXe siècle, avec ses indiscrétions et mensonges. Après avoir été élu en 1825 à l’Académie des beaux-arts et avoir ouvert un atelier d’élèves, le ton des lettres d’Ingres change radicalement. Enthousiaste, déterminé, égocentrique, il accable son ami de ses projets et succès. Les reproches que lui fera Gilibert donneront à Ingres l’occasion de se confondre en excuses avant de l’assurer de sa profonde amitié.
Ces écrits témoignent aussi de la manière dont les amis d’Ingres et la municipalité de Montauban
mirent tout en œuvre pour que l’enfant du pays, devenu l’un des chefs de file de l’école française, lègue à la ville une partie de son œuvre. Ce sera chose faite peu après l’ouverture, en 1843, du musée montalbanais dédié au peintre, sous la forme d’un premier don en 1851, suivi d’un généreux testament en 1866, année précédant sa mort.

Lettres d’Ingres à GilIbert, éditions Honoré Champion, 2005, 556 p., 100 euros, ISBN 2-74531-115-8

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°218 du 24 juin 2005, avec le titre suivant : Lettres à un ami

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