Entretien

Stéphanie Duplaix : « Les marchands n’attendent qu’une chose : que les couloirs aériens rouvrent ! »

Membre du bureau de l’association Marché aux Puces (MAP) et directrice générale de Paul-Bert-Serpette

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 17 mars 2021 - 735 mots

PARIS

Stéphanie Duplaix décrit la situation préoccupante des Puces de Saint-Ouen, privées de la clientèle étrangère. Le MAP, l’association qui réunit les différents marchés, ne reste cependant pas inactif.

Comment s’est déroulée l’année 2020, dans le contexte de la pandémie ?

Pour le premier confinement, nous avons fermé le 14 mars. L’annonce du gouvernement a été un vrai choc car les Puces, nées à la fin du XIXe siècle, ont résisté à tout – pendant la Seconde Guerre mondiale elles n’avaient pas fermé. Les marchands avaient encore de la trésorerie, donc c’est passé. Le 15 mai, nous avons été l’un des premiers grands sites à rouvrir à Paris. C’était assez joyeux, même si nous n’avions plus les étrangers, soit notre clientèle principale à hauteur de 70 % (dont 50 % d’Américains). Les trois premiers week-ends ont été magiques : le Tout-Paris était là. Les Puces, c’est la convivialité et celle-ci avait manqué à tout le monde. Nous avons perdu beaucoup de monde aussi avec la fermeture des restaurants – Ma Cocotte n’a toujours pas rouvert – car les gens venaient pour la journée. Aujourd’hui, la trentaine de restaurants propose de la vente à emporter. Il y a 1 145 structures et près de 3 000 personnes qui travaillent sur place à nourrir ! En été, traditionnellement, il y a toujours moins de fréquentation, mais là, avec le Covid, la trésorerie a fondu comme neige au soleil. En septembre, la fréquentation s’est effondrée car le calendrier culturel, dont nous dépendons beaucoup, était inexistant.

Des mesures ont-elles été mises en place pour aider les marchands ?

Depuis septembre, le MAP [l’association Marché aux puces] se bat pour que les marchands intègrent le plan [de relance] tourisme et les annexes du fonds de solidarité. En novembre, ils en ont bénéficié, sur le principe de la perte du chiffre d’affaires plafonné à 10 000 euros, et en décembre, ils ont intégré la liste « S1 bis », avec quelques cafouillages au début. Mais tout ce que les marchands souhaitent, pour être sauvés, c’est que les couloirs aériens soient à nouveau ouverts !
Nous avons également fait une demande pour être classés en zone touristique internationale (ZTI) ; nous ne le sommes toujours pas alors qu’en temps normal nous recevons 5 millions de visiteurs par an, presque autant que la tour Eiffel (7 M de visiteurs). Le dossier a été confié à la préfecture, qui est censée porter le projet devant l’Assemblée nationale. Nous attendons que l’arrêté soit pris car cela nous permettrait d’obtenir tout le soutien dont bénéficient ces zones qui sont sinistrées (comme l’exonération de CFE [cotisation foncière des entreprises] durant deux ans).
Enfin, les trois plus grands marchés, Paul-Bert-Serpette, Biron et Dauphine (ils sont 12 en tout, répartis sur 7 hectares, tous indépendants), se sont concertés et ont pris la décision au premier confinement d’abandonner les loyers. Au total, les marchands ont été exonérés de quatre mois et demi de loyers sur neuf.

Quelles ont été les répercussions des confinements successifs sur les Puces ?

Heureusement, les clients parisiens se sont enfin intéressés à nous, car, avant la pandémie, nous en avions peu, mis à part les professionnels. C’est une clientèle moins dépensière que la clientèle étrangère, mais au moins elle est présente. Paul-Bert-Serpette, le plus grand marché des Puces puisqu’il abrite un tiers des puciers, a pu tirer son épingle du jeu – même si les marchands gagnent à peine de quoi couvrir leurs charges. En tout cas, il n’y a pas eu de faillite. Et entre les départs à la retraite et les quelques marchands qui ont décidé de sous-louer certains de leurs stands quand ils en disposent de plusieurs, nous avons pu accueillir 15 nouveaux arrivants !

Quels sont les projets en cours ?

Les Puces, c’est une marque ombrelle qui comprend différentes propositions (le marché Dauphine est plutôt orienté pop culture ; Biron est axé sur le classique ; Vernaison, sur la brocante ; Paul-Bert-Serpette, sur le design…). Si chaque marché a son propre site Internet, le MAP a décidé de refaire un site commun d’informations – déjà en ligne – qui sera bientôt complété par un site d’annonces (mise en relation) : chaque antiquaire pourra ouvrir son interface et y publier ses pièces à vendre. Par ailleurs, nous allons tenter de maintenir la Fête des Puces en septembre, qui attire en temps normal environ 15 000 personnes dans la soirée. Nous avons une petite fenêtre de tir.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°563 du 19 mars 2021, avec le titre suivant : Stéphanie Duplaix :: « Les marchands n’attendent qu’une chose : que les couloirs aériens rouvrent ! »

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