Art Cologne

Le chemin du renouveau

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 19 novembre 2004 - 774 mots

Dans un contexte ultraconcurrentiel, les grands changements de la nouvelle direction, menée par Gérard Goodrow, ont été difficilement perceptibles.

 COLOGNE - Art Cologne a bouclé du 28 octobre au 1er novembre le marathon des foires d’octobre. Une certaine fatigue était perceptible chez les galeristes ayant participé à l’ensemble des raouts. Les stands s’en ressentaient. Même Gmurzynska (Cologne), qui n’avait participé qu’à Bâle, ne brillait que d’un Feu d’Yves Klein (800 000 dollars, 616 800 euros). Plusieurs marchands avaient choisi de se réunir pour combiner art contemporain et art non occidental, dans un esprit assez proche de Tefaf Maastricht. Même si le mélange archéologie et Nouveaux Expressionnistes chez le binôme Michael Werner-Gordian Weber (Cologne) semblait harmonieux, un regard attentif sur les peintures laissait les amateurs sur leur faim. Une seule œuvre se détachait du lot, un tableau de Baselitz de 1968 (600 000 euros), déjà présenté par Michael Werner à Maastricht en mars. Les redites étaient naturellement légion. Henze & Ketterer (Berne) avait opté pour un remake de la partie expressionniste de son accrochage de la FIAC.
Par un curieux jeu d’escamotage, un relief de Kurt Schwitters que Hans Mayer (Düsseldorf) présentait pour 390 000 euros à la FIAC se retrouvait sur le stand d’Annely Juda (Londres)... Mais il y eut tout de même quelques surprises avec la sélection remarquable de dessins d’Otto Dix, montrés pour la première fois chez Haas (Zurich), entre 20 000 et 138 000 euros, et, côté contemporain, une spectaculaire plaque en carton orange vif d’Adrian Schiess (33 000 euros) chez nächst St. Stephan (Vienne).
Le rez-de-chaussée était égal à lui-même, avec des kilomètres de barbouille d’où émergeaient miraculeusement quelques belles photos. Le stand d’Esther Woerdehoff (Paris) offrait un havre de repos avec une plage de Matthias Koch (3 200 euros) et des scénographies sophistiquées de Clark et Pougnaud (4 800 euros). « Certaines personnes qui ont acheté de la photographie objective commencent à en avoir assez et montrent une ouverture sur la photographie française », rapporte la galeriste parisienne qui a noté un intérêt pour les photos très douces et minimales de Loan Nguyen. On respirait aussi à pleins poumons la photographie sur les stands mitoyens de Martin Kudlek et Büro für Fotos (Cologne), avec notamment les prises de vue en camera obscura de Gábor Ösz (entre 8 500 et 14 500 euros).
À écouter marchands étrangers et locaux, les doléances sont les mêmes qu’à la FIAC. Les Français achètent français chez les Français et les Allemands, allemand chez les Allemands. Les dépenses ne furent apparemment pas négligeables lors du sneak preview organisé pour 600 collectionneurs la veille du vernissage. Selon la direction de la foire, ce prévernissage aurait généré 5 millions d’euros de ventes, dont 50 % déboursés par des collectionneurs étrangers. Pourtant le climat général semblait mou et l’humeur, les deux premiers jours, peu encline à la collectionnite. « Ce n’est pas euphorique, mais, au premier étage, tout le monde a travaillé », note Ursula Krinzinger (Vienne).

Politique agressive de Frieze
L’opération la plus incompréhensible était le « rheinschau. art cologne projects ». Bien que placée sous l’égide de la foire, les tickets d’entrée n’étaient pas jumelés ! Malgré ses allures de foire off, elle avait rallié des galeries installées comme Robert Miller (New York) ou Michael Janssen (Cologne). La qualité était tout aussi fluctuante qu’à Art Cologne, et sa finalité des plus floues, l’événement n’ayant pas vocation à se renouveler.
Les grands changements que la nouvelle direction de Gérard Goodrow devait enclencher ont été difficilement perceptibles. « La plupart des modifications ne sont pas visibles. Nous avons étendu le programme pour les collectionneurs avec le preview avant vernissage, précise Gérard Goodrow. On a aussi réussi à faire venir 40 nouvelles galeries. Le rez-de-chaussée a longtemps été horrible et cela commence à devenir O. K. On ne peut progresser que pas à pas. » Le rythme des avancées a pourtant intérêt à s’accélérer devant la concurrence aiguisée de Berlin et Londres. « Berlin n’est un danger que pour convaincre les galeries berlinoises. Le plus grand danger reste Frieze Art Fair, qui a une politique agressive et refuse toute négociation. L’une des trois foires d’octobre devra changer sa date, ce n’est qu’une question de temps », réplique Gérard Goodrow, qui a tenté en vain d’avancer ses dates en septembre. Ni la FIAC, ni Art Cologne ne peuvent modifier leur calendrier, tributaire des salons de la porte de Versailles ou du futur parc d’expositions pour lequel la foire germanique déménagera l’an prochain. En vrai hussard, Frieze n’a aucun intérêt à bouleverser ses habitudes tant qu’elle n’a pas épuisé ses concurrentes. La loi des foires est celle de la jungle !

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°203 du 19 novembre 2004, avec le titre suivant : Le chemin du renouveau

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