Anniversaire

Cologne se jette à l’eau

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 20 octobre 2006 - 622 mots

Pour souffler ses 40 bougies, Art Cologne fait un régime minceur avant de donner rendez-vous aux collectionneurs au printemps.

 COLOGNE - Tailler dans le vif. Cette tâche incombe à toute foire qui souhaite se bonifier. Passé 40 ans, Art Cologne a compris qu’elle ne pouvait plus tergiverser. 70 % des coupes concernent son secteur contemporain, principalement dans les rangs allemands. Le directeur de la foire, Gérard Goodrow, s’attend d’ailleurs à une dizaine de procès émanant des exclus. Les risques financiers d’un tel régime ne sont pas non plus négligeables. Goodrow table ainsi sur une perte en gains à hauteur de 1,4 million d’euros. Allégé, le salon ne s’est pas pour autant internationalisé, puisqu’il reste encore à 55 % germanique. Comparée à celle de la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), à Paris, la liste des exposants ne donne pas le tournis. Certes, une optimisation est à prévoir avec le retour de quelques poids lourds de Cologne comme Johnen & Schöttle et Luis Campaña. Mais de gros marchands locaux tel Michael Werner lui ont préféré la concurrente parisienne. Une donne qui aura peut-être du mal à changer même avec le futur calendrier printanier d’Art Cologne (1).
Face à la hype de Frieze Art Fair à Londres et au sursaut qualitatif de la FIAC, Art Cologne mise sur la constance des collectionneurs allemands. « Nous ne sommes peut-être pas aussi cool que d’autres foires, mais nous faisons de bonnes ventes, défend Gérard Goodrow. Les gens ne sont pas obligés d’acheter dans l’urgence. S’ils ont vu une pièce, ils peuvent réfléchir jusqu’au lendemain. »

« Tous les Allemands fréquentent la foire »
Actifs auprès des galeries allemandes, les visiteurs de la foire frappent plus difficilement aux portes des exposants hexagonaux, dont le nombre s’amenuise d’année en année. Malgré le retour de Sollertis (Toulouse), la ténacité des vétérans comme Anne Lahumière, Michel Rein ou Esther Woerdehoff (Paris), les Français ne se bousculent pas au portillon. Si certaines enseignes allemandes ont préféré la FIAC, Art Cologne a, quant à elle, récupéré certains refusés du salon parisien. « Nous avons été irrités par le refus permanent de la FIAC de nous faire entrer, indique Éric Dereumaux, codirecteur de la Galerie RX (Paris). À partir du moment où nous sentons une grosse demande outre-Rhin sur nos artistes comme Yuki Onodera ou Bea Emsbach, nous allons là où se trouve le marché. » Sceptiques quant à leur possibilité d’entrée à la FIAC, Jean-Luc et Takako Richard (Paris) capitalisent sur leurs trois artistes germaniques, parmi lesquels Christoph Wedding, pour franchir le Rhin. Autre débouté, Jean-Pierre Ritsch-Fisch (Strasbourg) réserve à Cologne un traitement VIP à huit de ses clients. Le marchand, qui prévoit des pièces du Japonais Hiroyuki Doi et de Michel Nedjar, a d’ores et déjà 40 % de son stand réservé par des collectionneurs.
Bien que d’origine allemande, la galerie Schleicher Lange (Paris) avoue des liens distendus avec l’Allemagne. Aussi est-ce pour nouer ou approfondir ses contacts qu’elle a accepté l’invitation de la section « New Contemporary ». Elle y prévoit notamment deux grandes œuvres de Timo Nasseri. On aurait pourtant plutôt imaginé cette jeune galerie sur Art Forum à Berlin. « Les gens sont peut-être snobs sur la question de Cologne ou préfèrent Berlin, mais tous les Allemands fréquentent la foire », défend Andreas Lange, codirecteur de la galerie. Malgré le buzz en faveur de ses concurrentes, Art Cologne garde au moins le crédit de l’ancienneté.

(1) L’édition 2007 se tiendra du 18 au 22 avril.

ART COLOGNE, 1er-5 novembre

Koelnmesse, halls 4 et 5, 1 Messeplatz, Cologne, www.artcologne.com, tous les jours 12h-20h. - Directeur : Gérard Goodrow - Nombre d’exposants : 214 - Tarifs des stands : 190,50 euros le mètre carré - Nombre de visiteurs en 2005 : 70 500

« Hidden Treasures », un secteur pour les gloires oubliées

Quand d’autres foires se complaisent dans le jeunisme, Art Cologne rafraîchit les mémoires avec l’opération « Hidden Treasures » (Trésors cachés). L’objectif est de valoriser, par le biais de one-man shows, six créateurs âgés d’au moins 40 ans ou décédés, et que le marché n’a pas su considérer à leur juste valeur. Il en va ainsi du peintre William N. Copley, présenté par Schönewald Fine Arts (Düsseldorf). Bien qu’il ait participé aux Documenta V (1972) et VII (1982), il a sombré dans l’oubli. Valie Export s’est fait remarquer dans les années 1970 par ses performances avant de s’effacer de la scène. Ordonnateur de son revival, la galerie Charim (Vienne) présente des photographies dont les prix oscillent entre 7 500 et 13 000 euros ainsi qu’une installation de 1994 pour 85 000 euros. Figure de proue de l’art abstrait géométrique français, Auguste Herbin est plus prophète à l’étranger que dans son propre pays. La galerie Lahumière en présente un panorama, de sa phase figurative à son alphabet plastique, dans une gamme de 8 000 à 150 000 euros. Fred Sandback, présenté par Margarete Roeder (New York), ne jouit que timidement de l’envolée des prix des artistes minimalistes. D’après Goodrow, son problème tient au fait qu’il est littéralement hidden. Sa succession rechigne en effet à ce que les galeries présentent ses installations sur les foires. Figurent aussi parmi ces stars oubliées sélectionnées cette année Klaus vom Bruch et Paco Knöller.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°245 du 20 octobre 2006, avec le titre suivant : Cologne se jette à l’eau

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