Best of Chareau

La sélection de la galerie Doria

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 8 novembre 2002 - 546 mots

La galerie Doria expose jusqu’au 21 décembre une sélection des plus belles créations, souvent inédites, de Pierre Chareau.
Pureté des formes, qualité des matériaux, belles finitions et nouveaux principes de construction caractérisent ce génie du courant moderniste de l’entre-deux-guerres.

PARIS - “C’est la première exposition de Pierre Chareau où je ne présente que des pièces emblématiques”, annonce Denis Doria, spécialiste de ce grand pionnier de la modernité. Il a fallu des années au marchand pour réunir une quarantaine de pièces exceptionnelles du créateur des années 1920-1930, qui vont de l’œuvre majeure au chef-d’œuvre. La plupart des objets sont des pièces uniques, tel un grand canapé de milieu, aux lignes pures, conçu vers 1930 pour Marcel Kapferer à Boulogne. “Son envergure est imposante (4,28 m). De vrais bouts de canapé en noyer, spacieux, abritent des tables gigognes qui se déploient ou se replient selon le principe de l’éventail, si caractéristique de Chareau, [entraînant] la transformation de l’objet au gré des besoins.” Un meuble d’applique mural, jamais vu auparavant, séduit immédiatement : en fer forgé, poirier et poirier alisier, il est composé de quatre épaisses lames de métal supportant un long caisson rectangulaire à trois portes coulissantes gainées de parchemin. Chareau a su introduire la ferronnerie dans ses créations en lui donnant un élan nouveau. Pour le galeriste, “utiliser le métal dans du mobilier destiné à la grande bourgeoisie, à l’époque, c’était fou !”.

Designer, inventeur, Chareau excelle dans le meuble à système, tel un grand fauteuil de 1922 en acajou, à dossier rectangulaire réglable par une barre à trois positions. Mais surtout, le génie de Chareau culmine dans un psyché-coffre à bijoux de 1926, un modèle en palissandre de Rio et fer forgé. Autour d’un axe vertical doté de charnières, s’articulent, à droite, un grand miroir rectangulaire vertical et, à gauche, un caisson à deux portes coulissantes surplombant une étagère et une tablette, pivotante. C’est l’un des objets phares de l’exposition, mais pas forcément le coup de cœur du galeriste.

Fauteuils historiques
Denis Doria affectionne particulièrement une paire de fauteuils imposants de 1920, en osier peint en noir, à dossier gondole à six pans coupés et jupe basse servant de piètement. Ils sont historiques : le modèle fut utilisé par Rob Mallet-Stevens, qui a fait appel aux plus grands artistes de son temps (parmi lesquels Chareau, pour le mobilier) pour le décor des films d’avant-garde du cinéaste Marcel L’Herbier, L’Inhumaine en 1924 et Le Vertige en 1927.

Ces deux fauteuils figurent également dans la Maison de verre construite entre 1928 et 1931, au 31 de la rue Saint-Guillaume, à Paris, pour le docteur Dalsace et considérée comme le chef-d’œuvre de Pierre Chareau. “Tout l’esprit de la modernité réside dans la construction de ces fauteuils. En choisissant l’osier, à la fois le matériau le plus modeste et le plus constructif, Chareau nous surprend, nous fait un pied-de-nez.” Pour Pierre Doria, Chareau est le Picasso du meuble et il lui rend ici magnifiquement hommage.

- EXPOSITION PIERRE CHAREAU, jusqu’au 21 décembre, galerie Doria, 1 rue des Beaux-Arts, 75006 Paris, tél. 01 43 25 43 25, du mardi au samedi 11h-13h et 14h-19h. - Portfolio PIERRE CHAREAU, MOBILIER, éd. Galerie Doria, 20 pages de texte en deux cahiers et 76 planches recto-verso, 450 euros, disponible fin novembre. ISBN : 2-95171721-0

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°158 du 8 novembre 2002, avec le titre suivant : Best of Chareau

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