Fidéliser les visiteurs

Le Journal des Arts

Le 1 mars 1997 - 758 mots

Après avoir enregistré un record de fréquentation en 1994 avec 10,5 millions d’entrées payantes, les musées nationaux ont connu deux années difficiles, en 1995 et 1996, mais la tendance actuelle est de nouveau orientée à la hausse. Ces chiffres ne prennent cependant pas en compte les nouvelles pratiques de visite des musées liées à la propagation des cartes de fidélité et des laissez-passer.

Si la fréquentation des musées nationaux a triplé en trente ans, passant de 3,4 millions d’entrées payantes en 1960 à 10,3 millions en 1990, elle est retombée à 9 millions depuis deux ans. En 1994, un record a été atteint avec 10,5 millions d’entrées payantes, grâce à l’ouverture de l’aile Richelieu au Musée du Louvre à la fin de 1993. Comme en 1990, après l’inauguration de la pyramide, celle-ci s’est traduite par une hausse d’environ un million d’entrées payantes. Toutefois, la fréquentation hors Louvre, "plus significative du comportement moyen des visiteurs", selon Muséostat, a diminué d’un million depuis 1989, chutant de 6,9 millions à 5,9 millions en 1996. Déjà, entre 1981 et 1982, un million de visiteurs s’étaient évaporés, avant de voir le nombre d’entrées payantes remonter en flêche à partir de 1984, se stabiliser autour de 7 millions en 1985 et 1986, et repartir de plus belle à partir de 1987.

Les "locomotives" de la RMN
Crainte des attentats à partir du mois d’août, mise en place du plan Vigipirate, grèves dans les transports et le système scolaire au mois de décembre : les phénomènes conjoncturels mis en avant par la Réunion des musées nationaux (RMN) pour expliquer la baisse notable de 1995 semblent s’être répercutés au début de 1996. À moins que les raisons de cette désaffection soient plus profondes. Visités à 70 % par des touristes, les "locomotives" de la RMN (Louvre, Versailles, Orsay…) sont indirectement victimes de la baisse des nuitées enregistrée par l’Observatoire régional du tourisme : moins 4 % en région parisienne et moins 8 % à Paris en 1995. S’y ajoutent la faiblesse de certaines devises étrangères et la morosité qui frappe l’ensemble des activités de commerce.
Après un début d’année difficile qui semblait prolonger le tassement de 1995, l’amorce d’un redressement de la fréquentation s’est profilé à partir du second trimestre 1996, d’abord à Paris et en région parisienne, puis en province. Ce frémissement concorde d’ailleurs avec les résultats plus positifs enregistrés par l’Obser­vatoire régional du tourisme en ÎIe-de-France pendant la même période. Ainsi, une progression globale de 5 % a caractérisé le dernier trimestre 1996 par rapport à l’année précédente, atteignant même 11 % pour Versailles et Orsay, et 10 % pour le Louvre. Ce frémissement pourrait se confirmer en 1997 et s’étendre à l’ensemble des musées de province, dont plusieurs d’entre eux ont déjà vu leur fréquentation se rétablir : Musées des beaux-arts de Nantes (plus 7 %), de Rouen (plus 19 %), de Quimper (plus 21 %), Musée d’art moderne de Villeneuve-d’Ascq (plus 8 %)…

Un million de visites supplémentaires
Mais tous ces chiffres laissent de côté les nouveaux produits mis à la disposition des publics du musée, à savoir les différentes cartes et laissez-passer proposés, entre autres, à Beaubourg, au Louvre, à Orsay… qui permettent à leur possesseur de visiter les collections plusieurs fois dans l’année. "La billetterie des musées s’est diversifiée : beaucoup de visiteurs s’ajoutent à ceux qui acquittent leur droit d’entrée à la caisse, et cette évolution n’est pas suffisamment prise en compte", souligne Claude Fourteau, chargée de la politique des publics au Musée du Louvre. Ce dernier a par exemple vendu plus de 20 000 cartes Jeunes en 1996, et les Amis du Louvre ont été multipliés par trois entre 1990 et 1996, passant de 20 000 à 60 000. En outre, la gratuité instaurée le premier dimanche de chaque mois, depuis janvier 1996, a permis à la fréquentation de croître de 70 % ces jours-là. De même, la carte Musées et monuments (valable 1,3 ou 5 jours), qui regroupe 68 établissements d’Île-de-France au sein de l’association Inter Musées, s’est vendue à 380 000 unités en 1996, contre 125 000 en 1990, ce qui correspondrait à environ un million de visites supplémentaires l’année dernière.

Si le redressement amorcé ne se confirmait pas, les musées seront sans doute contraints de développer leurs actions de promotion (campagnes de communication, journées portes ouvertes…), d’adapter leur offre en fonction des différents publics (horaires étendus, nouveaux services…) et d’imaginer de nouvelles sources de financement. L’exemple de la Lote­rie britannique (lire ci-contre), dont le principe a été adopté en Italie, pourrait peut-être indiquer la voie à suivre.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°34 du 1 mars 1997, avec le titre suivant : Fidéliser les visiteurs

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque