Art contemporain

Rétrospective

Fin de parcours pour Panamarenko ?

Par Christophe Dosogne · Le Journal des Arts

Le 18 novembre 2005 - 540 mots

L’artiste, qui expose actuellement sur cinq niveaux aux Musées royaux des beaux-arts de Belgique, à Bruxelles, a annoncé qu’il prenait sa retraite.

BRUXELLES - Habillé en colonel de l’armée russe, sa tenue de combat favorite pour s’en aller pourfendre de sa vindicte l’institution qui l’accueille, Henri Van Herreweghe, alias Panamarenko (né en 1940), a pris un coup de vieux en ce matin de septembre. À 65 ans bien sonnés, hirsute dans son déguisement de combattant poétique, il a un peu l’allure d’un clown triste. Celui qui, sa carrière durant, n’eut de cesse de s’inventer un monde de machines d’une poésie pur sucre n’a plus le cœur à l’ouvrage. D’ailleurs, sa décision est prise : il part à la retraite et abandonne toute création ! Sans doute la disparition récente de sa mère, castratrice mais adorée, suivie de près par son mariage, ont-ils pesé dans la balance. Effet d’annonce ? Seul, du fond de sa ferme gantoise, l’intéressé connaît l’issue réelle. Sa fortune est faite et un large stock d’œuvres en souffrance, distillées au compte-gouttes, devrait lui assurer une confortable pension… Ces pièces, réunies à Bruxelles, témoignent de la créativité débridée d’un homme presque brut, qui ne s’est jamais soucié des modes, ni des cénacles, des critiques ou des marchands. Mais pourquoi une rétrospective aux Musées royaux des beaux-arts de Belgique ? Ce projet n’est qu’un second choix. En effet, c’est Piet Coessens, alors directeur de la Société des expositions du Palais des beaux-arts de Bruxelles, qui prit l’initiative de cet hommage, repris ultérieurement par Frederik Leen au profit des Musées royaux des beaux-arts de Belgique. Cette donnée permet de mieux comprendre la bancale mise en espace de l’exposition. Car cette consécration institutionnelle est pour le moins diffuse et inégale.

Grand enfant
Dans le grand narthex du Musée d’art ancien se déploie avec majesté le fameux Aeromodeller (immense ballon de 27 mètres de longueur). Mais, si les espaces du Palais des beaux-arts auraient pu se prêter admirablement à une déambulation tout aérienne, laquelle eut permis à l’œuvre de s’exprimer dans toute sa potentialité onirique, le Musée d’art moderne n’offre pas de telles perspectives. Certes, les salles où sont présentés les calculs savants de ce Léonard de Vinci postmoderne – l’artiste renie pourtant toute ascendance arguant que ses machines, elles, volent réellement – sont d’une grande beauté et autorisent à l’envi la contemplation des splendides dessins « scientifiques ». Pourtant, seuls les espaces où sont rassemblés les oiseaux mythiques et autres Archeopteryx créés par Panamarenko – ce grand enfant qui, toujours, rêva de vivre en un monde parfait entouré d’arbres et d’animaux – sont parfaitement réussis. Parce que la compréhension du travail de l’artiste passe aussi par l’identification des êtres du règne animal qui l’ont fasciné au point d’avoir voulu les recréer. Ailleurs, ses œuvres sont comme éteintes, figées dans le formol esthétisant d’une présentation institutionnelle qui leur enlève la magie créatrice et la poésie un peu braque du génial inventeur.

Panamarenko, Rétrospective

Jusqu’au 29 janvier 2006, Musées royaux des beaux-arts de Belgique, 3, place Royale, et, pour les multiples, hall d’entrée de la banque Dexia, 44, bd Pacheco, Bruxelles, tél. 32 2 508 32 11, www.expo-panamarenko.be, du mardi au dimanche 10h-17h, le jeudi jusqu’à 21 h. Catalogue, 224 p., 30 euros.

Panamarenko

- Commissaire de l’exposition : Frederik Leen - Nombre d’œuvres : 90 machines, 120 dessins - Surface d’exposition : sur 5 niveaux

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°225 du 18 novembre 2005, avec le titre suivant : Fin de parcours pour Panamarenko ?

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