Réunification berlinoise

Les collections dispersées de la Gemäldegalerie fusionnent

Le Journal des Arts

Le 13 mars 1998 - 518 mots

La Gemäldegalerie de Berlin va enfin réunir ses collections, dispersées depuis la Seconde Guerre mondiale entre « l’île des Musées », à Berlin-Est, et Dahlem, dans la banlieue ouest. Le site choisi pour accueillir l’ensemble reconstitué, le complexe culturel du Kulturforum, dans le quartier du Tiergarten, suscite encore la polémique, bien que l’inauguration soit programmée pour le mois de juin.

BERLIN (de notre correspondante) - La Gemäldegalerie abrite l’une des plus complètes collections de tableaux du XIIIe au XVIIIe siècle. Elle comprend des œuvres importantes signées Jan van Eyck, Pieter Bruegel l’Ancien, Rubens, Rem­brandt, Vermeer, Raphaël, Titien, Caravage, Botticelli, Poussin, Watteau, Gainsborough, Le Greco et Vélasquez. Commencée en 1830, la collection n’a cessé de s’accroître jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle 400 pièces majeures ont été perdues. Après la guerre, la collection a été répartie entre les deux zones de Berlin. Quelque 900 tableaux sont restés à l’Est, sur “l’île des Musées”, 1 600 autres ont été acheminés à Dahlem, dans la banlieue ouest, où ils sont exposés “temporairement” depuis les années soixante.

Le 12 juin devrait voir la réunion des deux collections, au sein du grand complexe du Kulturforum, dans un nouvel édifice créé par les architectes munichois Heinz Hilmer et Christoph Sattler. Rebaptisé Museum der europäischen Kunst (Musée d’art européen), il rejoindra le Cabinet des estampes et la Bibliothèque d’art, et prendra place aux côtés des bâtiments historiques du Kulturforum : la Philharmonie de l’architecte du Bauhaus Hans Scharoun, qui a conçu le complexe culturel berlinois en 1964, et la Neue Nationalgalerie de Mies van der Rohe, “boîte” de verre au toit noir et plat, chef-d’œuvre de l’architecture moderne.

Malgré ces hauts lieux culturels, le quartier est restée relativement isolé et difficilement accessible, en raison des vastes terrains vagues qui l’entourent. Hitler avait fait déblayer la zone afin de préparer la construction d’une grande avenue triomphale aboutissant à la Porte de Brandebourg, mais elle a été lourdement bombardée pendant la guerre. Avec la chute du Mur et les nombreux chantiers en cours dans le quartier voisin de la Potsdamer Platz, le Kulturforum prend un nouveau départ.

Dès 1962, la Stiftung der Preus­sischer Kulturbesitz – la fondation dont dépendent les musées, les bibliothèques et les archives d’État de Berlin – avait décidé que la Gemäldegalerie serait un jour installée dans le Kulturforum. Mais l’opération a été constamment repoussée en raison de problèmes financiers et d’un débat sans fin sur la manière dont les plans originaux de Scharoun devaient être complétés.

Malgré l’ouverture imminente et très attendue du Museum der europäischen Kunst, le site est d’ailleurs toujours cause de discorde. Le Sénat de Berlin avait alloué 1,31 million de deutschemarks (environ 4,4 millions de francs) pour l’aménagement d’un parc attenant au musée qui aurait dû être terminé pour l’inauguration. Un concours avait été lancé au mois de novembre, mais le Parlement a annulé l’initiative du Sénat, arguant que les fonds n’étaient plus disponibles. Par ailleurs, 23 000 signatures ont été recueillies pour protester contre les projets de modification de l’entrée de la Philharmonie. Selon la Scharoun Society, dénaturer ainsi les plans de l’architecte serait “criminel”.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°56 du 13 mars 1998, avec le titre suivant : Réunification berlinoise

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