Musée

L’histoire mouvementée de la collection « troyenne » de Schliemann

Par Antonin Gratien · lejournaldesarts.fr

Le 23 juin 2019 - 532 mots

LONDRES / ROYAUME-UNI

Le British Museum va exposer le trésor découvert par l’archéologue allemand dont il avait refusé l’acquisition il y a 150 ans.

Dôme couvrant le parvis du British Museum. Londres, Royaume-Uni. 2009
Dôme couvrant le parvis du British Museum. Londres, Royaume-Uni. 2009

Une centaine d’objets troyens seront la vedette de l’exposition « Troie : Mythes et Réalité » qui se tiendra du 21 novembre 2019 au 8 mars 2020 au British Museum. Le premier rendez-vous - manqué - du musée avec cet ensemble date de 1875, quand l’archéologue responsable de leur découverte lui avait proposé de l’acquérir.

« Le British Museum avait refusé leur achat par manque d’espace. 150 ans plus tard, nous nous rattrapons. Il aura fallu du temps avant que ces biens retrouvent le chemin de Londres », a commenté Alexandra Villing, co-commissaire de la future exposition portant sur l’histoire de Troie et l’interprétation de son mythe, depuis Homère à nos jours.

L’ensemble de poteries, vaisselles, armes de bronzes et sculptures en pierre troyennes qui constitueront l’attraction principale de « Troie : Mythes et Réalité » proviennent d’une fouille menée par Heinrich Schliemann dans les années 1870.

Persuadé que l’Illiade était inspirée de faits historiques, l’archéologue allemand s’était mis en quête des vestiges de Troie. Sur les conseils d’un confrère britannique, Frank Calvert, il porta ses recherches sur la butte d’Hissarlik, à l’extrême nord-ouest de l’actuelle Turquie. Là, il y découvrit plusieurs centaines de bijoux, armes et ustensiles datant de l’Antiquité. Heinrich Schliemann voulut par la suite les céder au British Museum pour un montant de 50 000 livres d’époque. Faute de moyens logistiques adéquats, le musée déclina l’offre.

En 1877, la collection fût prêtée et exposée durant trois ans dans le South Kensington Museum, l’actuel Victoria & Albert Museum. Heinrich Schliemann en fit ensuite intégralement don à l’Empire allemand qui les exposa dans l’ancien Musée des arts décoratifs de Berlin, puis dans le Musée ethnologique de la capitale.
 

À la veille de la Seconde Guerre mondiale, les autorités allemandes placèrent les antiquités dans des réserves protégées. Après la chute de Berlin, l’Armée Rouge saisit une partie de cette collection dont le « trésor de Priam » constitué des bijoux et objets en métaux précieux.

La prise de guerre fut transférée en juillet 1945 vers les réserves du Musée Pouchkine, à Moscou. Tenue secrète, la localisation des antiquités ne fût découverte qu’en 1987. L’Allemagne engagea plusieurs demandes de restitutions auprès du gouvernement russe après la dislocation de l’URSS – en vain. La collection fut à nouveau dévoilée au public en 1996 lors d’une exposition Schliemann organisée par le Musée Pouchkine. Depuis, le « Trésor de Priam » fait partie des collections permanentes de l’institution, ainsi que de celles du Musée de l’Ermitage.

Le British Museum n’ayant pas demandé de prêts à la Russie, seule la partie allemande des découvertes de Schliemann seront visibles dans « Troie : Mythes et Réalité ». Les artefacts seront accompagnés de deux 200 autres objets. Certaines datent de l’Age du bronze, d’autres sont nettement plus tardifs comme l'Achille blessé (1825, Musée de la Chatsworth House), ou des photographies de l’artiste contemporaine Eleanor Antin.

Première présentation de l’histoire de Troie au British Museum, cette exposition s’annonce comme un évènement. Mais le sponsor de l’exposition, British Petroleum (BP), fait débat. Plusieurs protestations ont récemment eu lieu au sein du musée pour exiger que l’institution rompe ses liens avec ce géant de l’extraction pétrolière.

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