Histoire

Histoire Strasbourg à l’heure de la gravure Allemande

Le Journal des Arts

Le 29 janvier 2008 - 523 mots

La capitale alsacienne revient sur l’art de l’estampe au XVIe siècle

STRASBOURG - Le cabinet des Estampes et des Dessins des Musées de Strasbourg poursuit la démarche d’exposition de la gravure germanique initiée en 2003 avec la manifestation intitulée « Les Dieux comme les hommes » en présentant plus de quatre-vingts œuvres de Dürer, Cranach L’Ancien et Hans Baldung Grien issues de ses collections et de celle du Musée de Karlsruhe.Sélectionnées par Anny-Claire Klaus pour leur qualité de conservation, ces œuvres forment un ensemble en trois temps significatif de l’évolution de l’art de l’estampe au début du XVIe siècle.
Une vitrine centrale est consacrée à quinze planches de L’Apocalypse, ouvrage fondateur gravé par Dürer entre 1496 et 1498, au retour de son voyage en Italie. Les images de grand format ne sont plus de simples illustrations subordonnées au texte. Certaines se caractérisent par une composition dense, d’autres sont plus hiérarchisées au profit de la lisibilité de l’ensemble, le blanc de la feuille gagnant le statut d’un véritable fond. L’exposition présente ensuite les trois chefs-d’œuvre de Dürer que sont Le Chevalier, La Mort et Le Diable de 1513, La Mélancolie et le Saint-Jérôme dans sa cellule de 1514. Dans ces œuvres célèbres, le graveur atteint le sommet de son art, y exprimant sa fascination pour le rendu des textures, de la brillance d’un pelage dru au velouté d’une plume.
Quelques années plus tard, Hans Baldung Grien se démarque du maître au travers d’une expression marquée par le maniérisme et l’attrait pour la représentation des forces animales ou magiques. Une série de trois feuilles de 1534, figurant des chevaux et des étalons, transcrit avec force la vitalité sauvage des bêtes s’ébattant dans la nature. Son Palefrenier ensorcelé de 1544 interpelle par l’efficacité de sa formule visuelle. Tombé à terre alors qu’il vient de nourrir un cheval présent dans le haut de l’image, le corps du palefrenier est représenté dans un raccourci saisissant qui évoque le Christ mort de Mantegna. Le positionnement de sa dépouille est l’occasion d’un discours sur l’espace de la feuille et l’illusion perspective, marquant une étape supplémentaire dans la conception de la gravure comme médium autonome. Le corps crée la profondeur spatiale et occupe l’exacte moitié du format, tandis que ses semelles visibles et verticales semblent matérialiser la surface gravée.
Concluant le parcours, quatre épisodes de la Passion du Christ gravés en 1509 par Cranach révèlent ses talents de portraitiste. Dans l’Arrestation du Christ, il saisit le moment où, alors que Saint-Pierre vient de couper l’oreille de l’un de ses assaillants, le Christ remet celle-ci en place, refermant la blessure. La brutalité déclinée avec une grande variété d’expressions dans le groupe des attaquants paraît à cet instant gagner le visage de Saint-Pierre. Le Christ, seul au centre de l’image, lève les yeux vers le spectateur avec un regard empli d’une profonde humanité.

- ATTRAITS SUBTILS, DÜRER, BALDUNG GRIEN ET CRANACH L’ANCIEN, jusqu’au 9 mars, Galerie Heitz, Palais Rohan, 2, place du Château, 67076 Strasbourg, tél. 03 88 52 50 00, tlj sauf mardi de 12h à 18h. Catalogue éditions des Musées de la Ville de Strasbourg, 240 p., 35 euros, ISBN 978-2-35125-039-6.

DÜRER, BALDUNG GRIEN ET CRANACH L’ANCIEN - Commissaire : Anny-Claire Haus, Conservateur du cabinet des Estampes et des Dessins - Nombre d’œuvres : 82

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°274 du 1 février 2008, avec le titre suivant : Histoire Strasbourg à l’heure de la gravure Allemande

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