Histoire

Peintres de l’armée et peintres de batailles, une filiation discutée

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 26 février 2023 - 479 mots

Si les peintres de l’armée accompagnent aujourd’hui l’armée de terre et ses hommes par leurs créations, ils n’ont plus les mêmes liens avec le pouvoir que les anciens peintres de batailles.

Adam François van der Meulen (1632-1690), Le Passage du Rhin, 12 juin 1672, huile sur toile, 66 x 82 cm. © Sotheby's, public domain
Adam François van der Meulen (1632-1690), Le Passage du Rhin, 12 juin 1672, huile sur toile, 66 x 82 cm.

Histoire. L’origine de ces derniers n’est pas facile à dater, mais plusieurs artistes étaient déjà bien établis en tant que peintres officiels des batailles sous le règne de Louis XIV, et sans doute sous Louis XIII selon Catherine Cadieu. Même s’il n’y a pas de filiation directe, « les peintres de l’armée s’inscrivent en quelque sorte dans la tradition des peintres des conquêtes du roi au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, de Van der Meulen en 1667 à Martin le fils en 1756 », rappelle le lieutenant-colonel Antoine Champeaux (Delpat), historien militaire. Il souligne les appellations successives et les changements de statut de ces artistes qui peignaient ou sculptaient des scènes de guerre, un genre en soi : « peintres des conquêtes du roi, peintres de bataille, artistes attachés au dépôt de la Guerre (1744 à 1887), peintres du ministère de la Guerre (22 avril 1914), correspondants de guerre (22 juin 1944), peintres aux armées (2 avril 1981) et enfin peintres de l’armée (31 mai 2005) ». Les dénominations ont donc fortement varié en fonction des guerres et des changements de régime, et, ajoute Antoine Champeaux, il a aussi existé des artistes non officiels « qui s’adonnèrent à la peinture militaire […] et connurent un âge d’or jusqu’aux bouleversements résultant de la Grande Guerre ».

Parmi les peintres de l’armée, cette filiation n’est pas nécessairement une évidence. Olivier Jarraud, lui, l’endosse et se dit « héritier des peintres de batailles ou du dépôt de la Guerre ». Pourtant, selon la commissaire principale Laetitia, « les peintres des armées en général connaissent le contexte historique [de leur statut] mais ils n’ont pas un sentiment de responsabilité envers ces prédécesseurs ». La filiation semble se faire de manière plus subtile, par les relations continues entre ces artistes, les officiers des différentes armées et le ministère de tutelle, dans des lieux marqués par l’histoire. Olivier Jarraud souligne également le rôle des anciens au sein de l’association des Peintres de l’armée qu’il préside, « un rôle important pour la cohésion du groupe ».

Cette continuité et cette mémoire collective s’incarnent dans l’insigne des peintres de l’armée, dont le modèle actuel imaginé par Henri Gault (1920-2005) date de 1995. Il représente un heaume surmontant un bouclier décoré de fleurs de lys, de feuilles de chêne et de laurier et d’une épée : la symbolique est complexe. D’après la notice rédigée par Henri Gault, les origines de l’insigne remontent au milieu du XVIIe siècle, d’où la fleur de lys royale, et l’insigne a évolué en fonction des règles encadrant les insignes des corporations. Selon Antoine Champeaux, les peintres de l’armée s’inscrivent donc aujourd’hui dans une longue histoire : « Ils prolongent l’histoire de la peinture régalienne, et plus précisément militaire, avec leurs représentations de l’armée, de ses chefs, civils ou militaires, de ses soldats et de leurs valeurs. »

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°605 du 17 février 2023, avec le titre suivant : Peintres de l’armée et peintres de batailles, une filiation discutée

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