Un juge britannique ordonne la destruction d’œuvres de l’artiste Graham Ovenden, condamné pour pédophilie

Par Julie Paulais · lejournaldesarts.fr

Le 16 octobre 2015 - 614 mots

LODNRES (ROYAUME-UNI) [16.10.15] – Pour la justice britannique, les œuvres mais aussi la collection de l’artiste Graham Ovenden, condamné en 2013 à 27 mois de prison pour indécence et attentat à la pudeur sur un enfant, devraient être détruites.

« Quand finit l’art et quand commence l’obscénité ? Et quand cela est-il acceptable que la loi ordonne que des peintures et des photographies soient détruites par l’Etat ? ». The Independent a révélé en effet que les œuvres créées par l’artiste anglais reconnu coupable de pédophilie doivent être détruites, d’après une décision de justice prise à Londres mardi 13 octobre.

Elizabeth Roscoe, juge au tribunal d’Hammersmith, estimant que les œuvres de Graham Ovenden, représentant le plus souvent des enfants à moitié dénudés, étaient indécentes, a demandé leur destruction, ainsi que celle de la collection réunie par l’artiste, qui comprend notamment une quarantaine de photographies de l’artiste français Pierre Louys datant du XIXe siècle, ou des œuvres de l’artiste allemand Wilhelm von Pluschow. Une seule exception a été faite pour une peinture commandée par la princesse Diana pour une vente de charité.

C’est la première fois qu’une telle décision de justice est prise. « Malheureusement, je vais déclencher la colère du monde de l’art », a déclaré le juge Roscoe, citée dans The Telegraph. « Je ne juge pas l’art ou les mérites artistiques, et je ne suis pas qualifiée pour déterminer l’âge historique ou la valeur de certaines des images. J’évalue les images sur la base des standards de décence reconnus aujourd’hui ».

Graham Ovenden, 72 ans, a été reconnu coupable en 2013 de six chefs d'accusation d’indécence avec un enfant et d’attentat à la pudeur sur enfant lors de séances de pose dans les années 1970 et 1980. Ayant déjà purgé une peine 27 mois de prison, l’artiste a toujours clamé son innocence et se déclare victime d’une chasse aux sorcières. Certains sont déjà intervenus pour le défendre, notamment des enfants lui ayant servi de modèle, ou l’artiste David Hockney.

L’artiste a cherché à démontrer l’absurdité de ce jugement, en insistant sur le fait qu’une seule peinture a été épargnée, représentant pourtant une jeune fille les fesses nues, car commandée par la princesse Diana. De même, Graham Ovenden a souligné qu’une photographie de Pierre Louys, montrant une jeune prostituée de l’époque victorienne, a été exposée dans plusieurs musées, sans que cela ne pose problème. L’artiste avait d’ailleurs acheté ces photographies chez Sotheby’s en 1978-1979. « Je suis un artiste célèbre. Je suis également un photographe célèbre, et ils détruisent du matériel qui est dans le domaine public depuis presque quarante ans », a-t-il déclaré à The Independent à la fin de l’audience.

Rappelant à Graham Ovenden qu’il a 21 jours pour faire appel avant que les images soient détruites, le juge Roscoe a ajouté que la collection de photographies, dont certaines poses sont « sexuellement provocantes », révélait « une obsession des jeunes filles nues ». Graham Ovenden a quant à lui demandé que les œuvres soient déposées à la bibliothèque du Victoria and Albert Museum plutôt qu’être détruites.

Depuis le début de cette affaire, les musées britanniques se trouvent dans une position délicate. La Tate Britain a ainsi momentanément supprimé de ses bases de données en ligne 34 des œuvres de Graham Ovenden, que le musée avait acquises en 1975, mais a plus tard remis les pièces abstraites réalisées avant la période lors de laquelle auraient eu lieu les abus. Les visiteurs peuvent toutefois faire une demande au musée pour voir les œuvres au cabinet des estampes et des dessins. Le Victoria and Albert Museum a également retiré plus de la moitié des quatorze œuvres d’Ovenden qu’il possède de son site web.

Légende photo

La peinture de Graham Ovenden commandée par la princesse Diana pour une vente de charité

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque