Italie - Restauration

Un tableau d'Artemisia Gentileschi retrouve sa nudité grâce à l’informatique

Par LeJournaldesArts.fr · lejournaldesarts.fr

Le 6 novembre 2023 - 421 mots

Une version numérique a dépouillé L’Allégorie de l'Inclination des drapés de censure qui masquaient sa nudité.

Artemisia Gentileschi (1593-1656), Allégorie de l'inclination, 1616, 152 x 61 cm, huile sur toile : à gauche, avant la restauration, avec les voiles ajoutés en 1686, à droite la restauration numérique © Casa Buonarroti, Florence
Artemisia Gentileschi (1593-1656), Allégorie de l'inclination, 1616, 152 x 61 cm, huile sur toile : à gauche, avant la restauration, avec les voiles ajoutés en 1686, à droite la restauration numérique.
© Casa Buonarroti

Les prouesses de l’informatique permettent de remonter dans le temps d’un tableau. C’est ce que montre l’exposition « Artemisia au Musée de Michel-Ange » à la Casa Buonarroti (Florence) qui présente une copie numérique de l'Allégorie de l’Inclination d’Artemisia Gentileschi (1593-1656) avant les retouches du « Volterrano ». 

L’allégorie fut peinte en 1616 pour la Casa Buonarroti, commanditée par Michel-Ange Buonarroti (dit le Jeune), le neveu  de Michel-Ange en sa mémoire. Les parties intimes, seins et cuisses avaient été masquées soixante-dix ans plus tard par « Il Volterrano », Baldassare Franceschini, à la demande d’un descendant du commanditaire désireux de préserver la pudeur des habitantes de la villa. Elle représente un nu féminin incarnant la créativité de l’artiste, assise sur un nuage et tenant une boussole dans ses mains. L’allégorie fut recouverte d’un épais drap vert sur ses jambes et d’un voilage diaphane sur la poitrine.

Censurer les nus n’était pas rare dans l’Italie de l'époque, lorsque les pouvoirs religieux pouvaient être rigoristes : un sort réservé à la fresque d’Adam et Ève chassés de l’Eden (1425) de Masaccio en 1674. De même pour les personnages du Jugement dernier de Michel-Ange (chapelle Sixtine), rhabillés par Volterra dit le « braghettonne » (« le grand culotté »). Ce n’est bien plus tard, lors de restaurations dans les années 1980 et 1990, que les feuilles de vignes et vêtements des censeurs furent retirés. 

Le projet « Artemisia CloseUp » dirigé par la restauratrice en chef Elizabeth Wicks, a aussi permis de retrouver la composition et les couleurs d’antan de l’allégorie. La radiographie et de la réflectographie infrarouge ont pénétré avec une grande précision les couches de peinture, révélant les premières esquisses et repentirs de l'artiste. Une empreinte de doigt a aussi été repérée sur un mollet. 

Le retrait des couches de peinture de Franceschini aurait détruit le glacis de Gentileschi. De plus, les draps sont désormais considérés comme partie intégrante de l'histoire de l’œuvre. Les restaurateurs lui ont néanmoins rendu son éclat en enlevant les vernis décolorés qui donnaient une teinte orangée aux chairs et diminuaient le lustre du lapis-lazuli dans le fond.

Peintre du XVIIe et fille d’Orazio Gentileschi, Artemisia est célèbre pour ses toiles ténébristes - Judith décapitant Holopherne (1613) demeurant son œuvre la plus célèbre. L’exposition « Artemisia au Musée de Michel-Ange » dévoile jusqu’en janvier 2024 les deux versions avec la présentation du processus de restauration qui aura duré un an.

Artemisia UpClose - Casa Buonarroti

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