Allemagne - Archéologie

Un cimetière de victimes de la peste découvert à Nuremberg

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 2 mai 2024 - 512 mots

La fosse commune récemment découverte contiendrait un millier de dépouilles de victimes de l’épidémie de 1632.

Fosse commune de victimes de la peste découverte à Nuremberg. © In Terra Veritas.
Fosse commune de victimes de la peste découverte à Nuremberg.
© In Terra Veritas

Nuremberg (Allemagne). Découverte lors d’un sondage sur un chantier de construction dans le centre de Nuremberg, en février dernier, la fosse commune de 6 000 m2 est composée de huit puits contenant chacun « plusieurs centaines de corps », selon le département de Conservation du patrimoine de la ville et les archéologues en charge des fouilles. D’après leurs premières estimations, le nombre total de dépouilles pourrait avoisiner les 1 500, voire 2 000. Aucun autre site fouillé en Europe à ce jour n’a livré autant d’ossements humains.

Surpris par cette découverte sur une parcelle où ils pensaient trouver des restes datant de la guerre de Trente Ans, les archéologues ont d’abord pensé à un site de la Deuxième Guerre mondiale : Nuremberg a subi de nombreux bombardements aériens entre 1943 et 1945 qui ont fait des centaines de victimes civiles. Le site porte d’ailleurs des traces de ces bombardements puisque l’un des puits a été partiellement détruit. Une autre hypothèse, celle des victimes d’une épidémie de peste, s’est confirmée après la datation au carbone 14 et l’examen des tessons de céramique présents alentour. Il reste à confirmer le génome du bacille de la peste par des analyses bactériologiques.

La peste a produit plusieurs vagues épidémiques en Europe à partir du XIVe siècle, notamment en Allemagne au XVIIe siècle. À Nuremberg, le carbone 14 donne un intervalle entre la fin du XVe siècle et la fin du XVIIe siècle. La datation a pu être affinée grâce à des monnaies trouvées dans les premiers puits fouillés. Les archéologues estiment donc la création de la fosse commune à 1632 et 1633, période d’une épidémie de peste à Nuremberg qui a fait plusieurs milliers de victimes. Les historiens avancent le nombre de 30 000 morts de la peste dans la ville aux XVIe et XVIIe siècles. L’épidémie de 1632 est attestée dans un document de 1634 qui indique que « plusieurs centaines de corps étaient enterrés » à proximité du site.

Si les cimetières médiévaux ont servi pendant plusieurs siècles, les épidémies de peste ont rapidement saturé ces cimetières urbains et les dépouilles étaient enterrées dans des fosses communes. Les archéologues précisent que les corps de Nuremberg n’ont pas été enterrés « selon les rites funéraires chrétiens » vu l’urgence de la situation. En Europe, il était en effet d’usage d’enterrer les chrétiens sur le dos avec la tête positionnée à l’ouest et les pieds à l’est, alors que dans les puits du site les dépouilles sont placées plus ou moins assises, serrées les unes contre les autres. Des squelettes de nourrissons et d’enfants ont également été trouvés au milieu de celles des adultes.

Les prochaines étapes des fouilles porteront sur les derniers puits du site et sur les études démographiques. Les anthropologues espèrent déterminer« l’âge et l’état de santé des victimes » ainsi que leur régime alimentaire. Par extrapolation, ils pourront dresser un portrait de la population de Nuremberg au XVIIe siècle, puisque la peste tuait aussi bien les enfants que les adultes, dans toutes les classes sociales.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°632 du 26 avril 2024, avec le titre suivant : Un cimetière de victimes de la peste à Nuremberg

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque