Taxe foncièrement lourde

Les musées britanniques bientôt soumis à l’impôt sur le capital

Par Martin Bailey · Le Journal des Arts

Le 8 mars 2002 - 599 mots

De nouvelles mesures émanant du ministère britannique des Finances viseraient à assujettir les musées nationaux à un nouvel impôt sur le capital. Calculée sur la base de la valeur des terrains et bâtiments, la taxe pourrait contraindre ces institutions déjà en mal de financement à payer au Trésor public des sommes de plus en plus importantes. Des négociations jugées insatisfaisantes sont en cours.

Londres (de notre correspondant) - Les musées nationaux britanniques doivent à nouveau affronter une situation difficile, provoquée cette fois par le ministère des Finances. En effet, ce dernier souhaite mettre en place une “taxe sur le capital” (capital charge) relative aux terrains et immeubles de ces institutions. “Nous sommes très inquiets des conséquences que pourrait avoir une ‘taxe sur le capital’ et sommes actuellement en pourparlers avec le ministère de la Culture, des Médias et des Sports (DCMS)”, a déclaré un porte-parole de la Conférence des directeurs des musées nationaux. Un nouveau système “de budgétisation des ressources” permettrait de s’assurer que les ministères et les organismes financés par l’État font bon usage de leurs actifs. Dès l’exercice financier 2003-2004, une “taxe sur le capital” de 6 % sera prélevée sur les actifs. Pour s’acquitter de l’impôt, les musées recevront la première année des subventions du DCMS. Il ne sera ainsi question que de jeux d’écritures. Toutefois, dès la deuxième année, l’impôt sera à la charge des musées, sauf s’ils parviennent à négocier d’autres subventions. Si ce système peut s’avérer approprié pour la plupart des organismes publics, il est en tout autrement des musées et autres institutions culturelles. La “taxe sur le capital” du British Museum devrait se chiffrer à quelque 14 millions de livres (23 millions d’euros) par an. Une augmentation de la taxe de 10 %, résultant de l’augmentation de la valeur de ses propriétés, équivaudrait donc à 1,4 million de livres supplémentaire par an. Or, la situation financière actuelle du musée ne permet pas de telles dépenses. La taxe devrait s’appliquer aux terrains, aux immeubles et aux capitaux fixes des musées, et exclure les actifs provenant des donateurs ou apportés par la Loterie. Ne pouvant pas s’opposer frontalement à la politique du Trésor, le DCMS n’a, selon un de ses porte-parole, d’autre choix que d’examiner “avec le ministère des Finances les garanties possibles qui permettraient de gérer les risques financiers inhérents à la budgétisation des ressources”. La British Library, qui subit le même traitement que les musées, est installée sur un site estimé aujourd’hui à 450 millions de livres. Or, la valeur du terrain augmentera de manière conséquente au cours des années à venir en raison de l’aménagement du terminal de l’Eurostar dans la proche gare de St-Pancras. L’impôt pourrait alors conduire les musées à considérer plus avantageux de dépenser les liquidités autogénérées en placements profitables plutôt que de les réinjecter dans l’exploitation de l’institution. Le système pourrait, par ailleurs, décourager les travaux d’entretien des bâtiments historiques, puisque les locaux en état de délabrement perdraient en valeur. Le document présenté à la Conférence des directeurs des musées nationaux met en garde : “Il n’est pas impossible que pour acquitter une ‘taxe sur le capital’ revue à la hausse en raison d’une revalorisation du terrain une institution devienne insolvable ou n’ait pas suffisamment de liquidités pour honorer ses engagements à court terme.” En outre, le document reconnaît que les discussions avec le gouvernement ne sont pas satisfaisantes : “Les avancées sont minimes, voire inexistantes, l’affaire étant déléguée à des fonctionnaires sans pouvoir. Il est impossible de connaître l’orientation en vigueur et d’avoir des contacts avec les décideurs, aussi bien au DCMS qu’au ministère des Finances.”

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°144 du 8 mars 2002, avec le titre suivant : Taxe foncièrement lourde

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