Restauration

Restauration, les sénateurs voudraient un guichet unique

Par Sindbad Hammache · Le Journal des Arts

Le 17 juin 2020 - 769 mots

Élaboré comme un vade-mecum pour les maires prochainement élus, le rapport publié par le Sénat propose de coordonner les acteurs territoriaux du patrimoine.

France. Le 28 juin, les Français voteront pour le second tour des élections municipales. Les maires nouvellement élus auront sous leur responsabilité le patrimoine historique de leur commune et sa restauration. Mais la volonté de bien faire et l’enthousiasme d’un début de mandat ne leur suffiront pas pour s’y retrouver dans les divers labels, les nombreux acteurs du patrimoine et la diversité des dispositifs de financement. C’est le constat de départ du rapport sénatorial publié le 4 juin dernier, sur « les maires face au patrimoine historique architectural ». Pour les deux rapporteurs, Michel Dagbert (PS) et Sonia de la Provôté (UDI), l’enjeu du rapport est de proposer un guide pratique aux nouveaux édiles : « Notre objectif était de sortir un document qui soit accessible, lisible et qui puisse servir de vade-mecum aux nouveaux élus », résume Michel Dagbert.

Pour seconder les maires dans la préservation du patrimoine local, le rapport compte sur les forces déjà en présence : les Architectes des bâtiments de France (ABF), les Conseils d’architecture, urbanisme et environnement (CAUE) ou les Directions régionales des affaires culturelles (Drac). Pour s’y retrouver dans ce « maquis de compétences », les sénateurs imaginent de réunir tous ces acteurs patrimoniaux au sein d’une « task force » départementale, qui deviendrait l’interlocuteur unique des maires avant, pendant et après les travaux de restauration.

Ce regroupement éviterait des erreurs qui peuvent coûter cher : « Une demande de subvention européenne est très technique par exemple, explique Sonia de la Provôté, s’il y a une simple erreur, le projet ne se fera pas. »

Sur l’assistance de maîtrise d’ouvrage, les besoins des communes sont importants. Tous les interlocuteurs du rapport le pointent : il y a un avant et un après l’ordonnance du 8 septembre 2005, qui met fin à la maîtrise d’ouvrage de l’État sur les chantiers de monuments historiques. « Il y a une grosse attente des maires sur ces sujets, alerte la sénatrice du Calvados, le besoin est devenu très vif. »

La « task force » départementale pourrait pallier ces carences en coordonnant les forces vives du patrimoine : une avancée essentielle pour Fabien Sénéchal, président de l’Association nationale des architectes des bâtiments de France (ANABF). « Il faut de nombreuses compétences pour élaborer ces projets, et ce qui nous manque aujourd’hui, c’est la coordination, explique l’architecte. De notre côté, ce sont des choses que l’on essaie de faire depuis très longtemps. » Le rapport sénatorial ne se positionne toutefois pas sur l’organisation concrète de ce regroupement. « Le Sénat n’a pas l’habitude de se poser en donneur de leçon, justifie Michel Dagbert, libre au département de choisir le mode d’organisation. »

Sur le terrain, les situations divergent d’un département à l’autre. « Dans certains, le CAUE est à la pointe des questions patrimoniales ; dans d’autres, ce sera la Drac ou les services patrimoniaux du département », souligne Sonia de la Provôté. Chacun de ces opérateurs pourrait selon les cas prendre la main sur le « guichet unique » destiné aux communes.

Une implication plus grandes des architectes

Restent alors deux certitudes : l’échelle départementale, « échelon opérationnel » selon Fabien Sénéchal, et le rôle central que devraient jouer les ABF.

Le rapport veut rendre à ces derniers leur casquette d’interlocuteur privilégié des maires, chaque fois qu’un projet de restauration émerge. « On souffre parfois d’une image rigoriste, admet le président de l’ANABF, car certains acteurs ignorent notre rôle de synthèse sur le terrain. » Lorsqu’il n’est pas consulté en amont du projet, le rôle de l’ABF peut vite ressembler à celui d’un censeur. « Il faut les impliquer dans la boucle le plus tôt possible », soutient Michel Dagbert. Le rapport leur réserve ainsi une place à toutes les étapes du projet patrimonial, de l’assistance dans le choix des entreprises jusqu’à l’édition de brochures conseils. « Il faut que l’administration positionne l’ABF comme un accompagnateur, et ce rapport le dit très clairement », relève Fabien Sénéchal.

Les sénateurs conseillent aussi aux maires de mobiliser tous les architectes présents sur le territoire, que ce soit les architectes conseil de l’État (ACE) ou les indépendants exerçant sur la commune. Et si ces derniers n’ont pas été formés à l’École de Chaillot, ils peuvent apporter leur aide dans l’une des directions fléchées par le rapport : la transition des usages pour le patrimoine inutilisé. Les architectes seront aussi sollicités pour intégrer le patrimoine à l’urbanisme global de la commune, un autre axe abordé par le rapport. « Pour restaurer un patrimoine, il faut une intention, un projet urbain, explique Fabien Sénéchal, et sur ce volet-là, les architectes et urbanistes libéraux ont tout à fait leur place. »

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°548 du 19 juin 2020, avec le titre suivant : Restauration, les sénateurs voudraient un guichet unique

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