Les avatars de Sagonte

Dé-restauration d’un théâtre antique romain en Espagne

Le Journal des Arts

Le 31 mai 2002 - 439 mots

Objet de polémiques, le théâtre romain de Sagonte en Espagne va être sujet à une campagne de dé-restauration. Jugés illégaux et irrespectueux des lois espagnoles sur le patrimoine national, les travaux entrepris dans les années 1990 avaient pourtant reçu l’aval de l’adjointe à la Culture de la région.

MADRID (de notre correspondant) - Après de nombreuses années de querelles, le théâtre romain de Sagonte, au nord de Valence, en Espagne, est sur le point de retrouver son aspect originel. Telle a été la décision rendue par le collège d’architectes de Valence après la plainte déposée par l’avocat Juan Marco Molines. En effet, le théâtre, premier édifice classé monument national par l’Espagne en 1896, a subi une campagne de travaux en 1990 menée par les architectes Manuel Portaceli et Giorgio Grassi sous la houlette du département de la Culture de la Communauté de Valence. L’intervention essentielle qui avait pour objectif de recouvrir les ruines sans les altérer et de les protéger des intempéries a consisté en l’installation de plaques en marbre blanc sur les gradins. D’autre part, une nouvelle scène en briques, fort critiquée, avait été ajoutée. À la suite d’un recours en justice, le tribunal de Valence a déclaré les travaux de restauration conduits en 1990 illégaux et a ordonné dans la mesure du possible la réversibilité des opérations. Le projet de dé-restauration, évalué à 6 millions d’euros, sera élaboré par une commission composée en partie d’archéologues, d’historiens et d’architectes. Selon le rapport du collège d’architectes de Valence, la restauration de zones comme les gradins et la scène est vraisemblablement réversible ; en revanche, les secteurs où avaient été mis au jour des vestiges archéologiques tels des ateliers romains, parfois endommagés – voire rasés –, ne pourront de fait pas retrouver leur état d’origine. Indigné par une telle décision, l’architecte Manuel Portaceli, auteur des premiers travaux en 1990, a déclaré au quotidien espagnol El Mundo combien “il serait regrettable qu’une œuvre, connue dans le monde entier, soit tenue de disparaître ; en outre, il serait absurde de conduire de nouveaux travaux pour restituer un état pseudo-originel”. Édifié sur les pentes d’une montagne au Ier siècle avant J.-C. sous le gouvernement de Tibère (42 av J.-C. – 37), le théâtre de Sagonte disposant de 8 000 places avait déjà été envisagé par Auguste. La cité de Saguntum dont les origines remontent au Ve siècle avant J.-C., avait connu un grand développement commercial avec les Phéniciens et plus particulièrement avec les Grecs, jusqu’au siège des Carthaginois en 219 avant J.-C. Grâce à l’expansion de leur ville, ses habitants avaient été les premiers de la péninsule Ibérique à obtenir la citoyenneté romaine.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°150 du 31 mai 2002, avec le titre suivant : Les avatars de Sagonte

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