Le street art en clichés

En aval, l’appareil photo permet aussi de garantir à l’art urbain une forme de conservation, de le soustraire au moins partiellement à l’éphémère. Dans ces conditions, le concept de l’exposition « Strokar », organisée au Centre Wallonie-Bruxelles (CWB) par Fred Atax, reporter, et Alexandra Lambert, directrice de la Maison de la mode et du design (MAD) à Bruxelles, n’est pas tout à fait dénué de bon sens, ni d’intérêt. L’idée ? Proposer à quarante street artists, pour la plupart belges et français, d’intervenir librement sur les tirages issus de voyages à travers le monde, et particulièrement dans quelques pays « en situation critique ». Fidèle à la pratique du détournement et au dialogue noué par l’œuvre in situ avec son contexte, l’exposition semblait ainsi promettre un regard neuf sur les photographies de Fred Atax et, plus loin, sur leur sujet. Les œuvres nées de cette contrainte artistique sont plus ou moins heureuses. Souvent verrouillés dans l’esthétique street art la plus attendue, beaucoup se contentent d’ornements pop et bariolés, qu’on peine à mettre en perspective avec ce que les photographies disent de l’état du monde. Mais l’exposition ménage aussi quelques bonnes surprises, dont les propositions de Bault et d’HMI CNN. Comme dans la rue, l’intervention artistique vient alors souligner tel détail de la photographie, rehausser tel motif, pour mieux faire surgir la fantaisie, la poésie, l’étrangeté ou la violence dans le réel…