Tomaszewski

La liberté de la discrétion

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 1 juin 2006 - 377 mots

Durant les trente-trois années où il enseigna à l’académie des Beaux-Arts de Varsovie, sa ville natale, Henryk Tomaszewski reçut la visite de nombreux apprentis étrangers.
Pierre Bernard, graphiste français qui signe notamment l’identité graphique de tous les événements du Centre Pompidou, fut de ceux-là et lui rend aujourd’hui hommage, à travers une exposition regroupant une centaine d’affiches et quarante-deux dessins.
En France, on connaît peu l’œuvre de ce créateur méticuleux qui ne produisait pas plus de quatre compositions par an. Le parcours, réparti entre les Silos-Maison du Livre et de l’Affiche, et le musée de la Crèche de Chaumont, permet de découvrir des œuvres de commandes et surtout des dessins inédits, révélateurs du style de Tomaszewski.
Alors que l’an dernier, le visiteur pouvait reconnaître les icônes imaginées par Cassandre dans les années 1930 – comme le triptyque Dubonnet – ici l’œuvre plus discrète, minimale et poétique s’avère non moins puissante et importante dans l’histoire du graphisme.
Le style du graphiste polonais est élémentaire, sans falbalas, traitant la couleur comme un véhicule bien plus qu’un décor. À la manière de poèmes, ses affiches pour l’agence publique Film Polski, témoignent de cette économie sans manières. Pour les films et les pièces qu’il annonçait par exemple, Henryk Tomaszewski n’aimait pas raconter les histoires mais préférait dépeindre une atmosphère avec quelques éléments articulés à une gamme chromatique décisive.
Pour Symphonie pastorale (1946), le visage de Michèle Morgan dessiné avec précision est couvert par transparence d’une main verte, allusion au handicap de l’héroïne, à qui une opération lui permettrait de recouvrer la vue. L’affiche témoigne de cette démarcation volontaire de l’esthétique réaliste socialiste mais aussi du constructivisme et du fonctionnalisme ambiants.
Tomaszewski a su rester libre, discret opérateur de la culture, seule bouffée d’oxygène dans ces décennies de plomb. Une liberté et une conviction que le Festival de Chaumont a décidé de célébrer à sa juste valeur.

Autour de l’exposition

Informations pratiques Le 17e Festival international de l’affiche et des arts graphiques de Chaumont se tient jusqu’au 25 juin 2006, du mardi au vendredi de 14 h à 19 h, samedi et dimanche de 10 h à 19 h. Renseignements au bureau du Festival, Les Silos-Maison du livre et de l’affiche, 7/9 avenue Foch, 52000 Chaumont, tél. 03 25 03 86 80, www.ville-chaumont.fr/ festival-affiches

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°581 du 1 juin 2006, avec le titre suivant : Tomaszewski

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