Art non occidental

Les Baoulés et leurs masques

À Chicago, une nouvelle approche de l’art profane et sacré.

Par Andrew Patner · Le Journal des Arts

Le 24 avril 1998 - 446 mots

Rompant avec les sempiternels hommages à l’Impressionnisme, l’Art Institute de Chicago s’intéresse aujourd’hui au peuple Baoulé de Côte-d’Ivoire. Par une intelligente mise en scène, il s’attache à restituer le contexte d’élaboration des quelque 125 objets rassemblés pour l’occasion.

CHICAGO (de notre correspondant). Au cours des dernières années, l’Art Institute of Chicago a connu une fréquentation importante grâce aux impressionnistes. Il est difficile de renouveler éternellement ce type de manifestation, même si une exposition consacrée à l’artiste américaine Mary Cassatt est prévue pour le mois d’octobre. D’autant que les critiques reprochent au musée de ne pas s’intéresser à d’autres cultures et traditions. Les fondations privées, qui participent pour une large part au financement des musées américains, font d’ailleurs pression pour que le “multiculturalisme” devienne l’une des priorités. Pour répondre à ces préoccupations, la Yale University Art Gallery et le Museum for African Art de New York se sont associés pour monter une magnifique exposition consacrée à l’art profane et sacré du peuple Baoulé de Côte-d’Ivoire. Ni “anthropologique”, ni “purement artistique”, elle présente des œuvres d’une qualité exceptionnelle, soigneusement mises en scène. Les diaporamas conçus par le metteur en scène de théâtre Chris Miller et l’éclairagiste Robert Wierzel créent une interaction entre les concepts occidentaux et baoulés, avec près de 125 objets en bois, en or ou autres matériaux. Les œuvres “primitives” présentées dans les musées occidentaux servent souvent à illustrer l’inspiration de Gauguin, Picasso et Matisse ; ici, l’exposition s’attache à restituer leur contexte.

Variété des masques
Dans la société baoulé existe une très nette séparation des tâches entre les hommes et les femmes. Des masques élaborés, en bois et paille, sont utilisés lors de cérémonies interdites aux femmes, et ils sont exposés ici dans une pièce séparée ; de même, une vidéo montre des danses de femmes auxquelles les hommes n’avaient pas le droit d’assister. Parmi les pièces les plus remarquables, d’autres masques, dits Mblo, figurent des personnages, incarnés par des danseurs – hommes et femmes – issus de la même fa­mille. Certaines sculptures représentant des esprits échappaient au contraire au regard de la communauté et étaient soigneusement conservées à l’intérieur des maisons. Les objets, provenant de musées et de collections privées américaines, françaises et belges, restituent la complexité des traditions artistiques baoulés. Le commissaire de l’exposition, Susan Vogel, a passé trente ans à rassembler une large documentation, à dater et attribuer des œuvres, et à demander aux artistes d’expliquer, avec leurs propres mots, la signification de leurs créations.

BAOULÉ : ART AFRICAIN, REGARD OCCIDENTAL, jusqu’au 10 mai, Art Institute, 111 South Michigan Avenue, Chicago, tél. 1 312 443 3600, tlj 10h30-16h30, mardi 10h30-20h, samedi 10h-17h, dimanche et fêtes 12h-17h. Catalogue 312 p., Yale University Press.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°59 du 24 avril 1998, avec le titre suivant : Les Baoulés et leurs masques

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